Mars 1962

 

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1 Mars 1962 :

 47 attentats, 33 morts, 38 blessés.

Hold-ups.

A Mers-el-Kébir un groupe de musulman se livre à une piednoirade, voici comment le Monde raconte les faits : " C'est vers 14 h 30, jeudi 1er mars, que des groupes de Musulmans ont fait irruption dans la conciergerie du stade de La Marsa à Mers-el-Kébir, tout près de la base militaire. Au cours d'une véritable crise de folie meurtrière collective, ces hommes ont tué sauvagement la gardienne, une jeune Européenne de trente ans, Mme Rosette Ortéga, et ses deux enfants, André quatre ans et Sylvette cinq ans.

" La jeune femme fut massacrée à coups de hache, tandis que dans un réflexe de mère affolée elle tentait de s'interposer entre les Musulmans déchaînés et son petit garçon. Puis les déments brisèrent le crâne du petit André contre un mur . " Alors qu'ils allaient partir, leur forfait accompli, ils aperçurent la petite fille qui rentrait du jardin, des fleurs dans les bras. Aussitôt, l'un des hommes la saisit par les pieds et lui écrasa la tête contre la muraille.

" Quand M. Jean Ortéga, employé à la Direction des Constructions navales, rentra chez lui, les corps des malheureuses victimes baignaient dans des mares de sang; Mme Ortéga gisait les bras en croix, à l'entrée de son appartement, le petit garçon à côté d'elle. Dans la cour gisait le corps de la petite fille, tenant dans sa main crispée des géraniums. " Photo

Comme d'habitude les musulmans accomplissant des piednoirades sont des fous, et les pieds-noirs qui se livrent aux ratonnades des fachistes racistes méritant la mort, on reconnaît bien là les nuances subtiles du Monde.

 Le communiqué, autorisé par la censure dans la presse oranaise, déclarait: "Hier matin, à Mers-el-Kébir, un groupe de Musulmans a assassiné une jeune femme européenne et ses deux jeunes enfants. Trois des terroristes musulmans ont été abattus aussitôt après par les forces de l'ordre. Des magasins musulmans furent ensuite saccagés au cours d'une effervescence."

 Communiqué, on peut l'apprécier, assez laconique, bien balancé entre FLN et OAS, et intercalé discrètement dans quatre colonnes d'attentats divers. Ce crime atroce soulève une immense émotion.

 Vaste opération anti O.A.S. à Paris, une centaine d'arrestation, en particulier parmi les militaires. Parmi eux, Yves Gignac clandestin, proche collaborateur de Salan, animateur de mission un, la moins connue mais pas la moins efficace des missions OAS en métropole.

 

2 Mars 1962 :

56 morts, 63 blessés.

Parmi les morts, trois harkis dans la banlieue d'Alger, un militaire français dans la casbah.

Le jeune Robert Boissières, 19 ans, né à Toulouse, étudiant endroit à la fac d'Alger est tué d'une rafale dans le dos alors qu'il collait des affiches OAS avenue Jonnart à Alger. D'après d'autres sources il aurait été tué dans les mêmes circonstances, par des C.R.S. (et non un militaire du contingent) le 21 mars, rue Michelet.

Les attentats touchent Oran, Bône, Arba (une jeune femme).

 

3 Mars 1962 :

46 attentats, 33 morts, 71 blessés.

Parmi les plus frappants, deux grenades dans la foule à Bône font 35 blessés, un poste militaire est attaqué par un groupe FLN à Oran, 2 militaires tués, 7 blessés, les rebelles ont deux tués.

Enterrement à Mers El Kebir :

Les obsèques furent marquées par la grande dignité d'une foule imposante. Le convoi, parti d'Oran, fut suivi par une file de voitures s'étirant sur huit kilomètres, tandis qu'à l'entrée de Mers-el-Kébir les deux corbillards étaient accompagnés par dix-huit mille personnes, dont dix mille venues d'Oran. Le chanoine qui célébrait la messe, demanda à ses paroissiens de conserver leur sang-froid.

Trois plastiqueurs se tuent avec le plastic qu'ils manipulaient à Toulon. Il s'agissait de Jean Feigna, toulonnais de 31 ans, tombé amoureux de l'algérie lors de son service militaire, ancien militant du RPF de De gaulle, chef du reseau, Michel Hendericksen, étudiant de 23 ans, et Henri Lapissardi, 39 ans.

Plastics à Avignon et à Marseille.

Condamnation à mort par contumace de Achard, ancien préfet de Collo, le seul chef de secteur de l'O.A.S. à Alger qui ne soit pas un militaire de carrière. Très stressé par les dures conditions de la clandestinité, gros buveur, Achard a commis quelques erreurs, en particulier il a cru à l'histoire de Lavanceau, du SDECE, qui se proposait de rallier à l'O.A.S. le FAAD, l'a mis en contact avec Salan, et le fit ainsi arrêter.

 

4 Mars 1962 :

47 attentats, 22 morts, 56 blessés.

Alger, Oran, Bône, Constantine sont touchés.

On note entre autres l'égorgement du harki de Paris, Mammeri Mohamed, en congé dans sa famille de Saoula près d''Alger.

 

5 Mars 1962 :

51 attentats, 35 morts, 130 blessés.

Parmi les plus originaux, la prise d'assaut de la prison d'Oran par un commando OAS qui exécute deux tueurs du FLN condamnés à mort mais graciés et en blesse 30 autres.

Une ratonnade à Constantine, où les juifs, excédés des attentats impunis, à l'issue des obsèques d'une petite fille de dix ans tuée la veille se livrent à la chasse au faciès, dix morts.

Nuit blanche à Alger, 125 plastics en moins de deux heures, d'autres disent 132, la police estime que plus de 50 équipes de plastiqueurs ont été mobilisées.

Les attaques de mars 1962 contre le barrage tunisien

Ces attaques tendent à mettre les négociateurs français dans une position plus facile vis à vis de l'opinion publique pour abandonner ce qu'il leur faut abandonner. Malheureusement, malgré les ordres données par De gaulle de dégarnir le barrage, et les épurations de l'armée, cette dernière résiste - ou les troupes F.L.N. manquent d'allant, il n'y aura pas de Dien ben Phu en algérie, ce qui aurait arrangé tout le monde sauf les militaires, l'abandon reste clairement dû à la volonté politique.

Ben Khedda accusera Boumedienne de n'avoir pas voulu gagner cette bataille.

L'attaque la plus puissante contre le barrage Est a été déclenchée le 6 mars 1962 sur un large front. Elle est décrite de façon détaillée dans les Journaux de marche du 153ème RIM, de la Zone Est Constantinois (ZEC) et dans le Bulletin mensuel de renseignement du Corps d'armée de Constantine. Selon ce dernier; 300 actions ont été lancées par l'ALN du 6 au 14 mars, de la mer à Bir el Ater. 6.000 obus ont été tirés en 5 jours (les 6,7,8,13 et 14 mars, avec une accalmie du 9 au 12). Trois zones ont été particulièrement visées: La Calle (3.000 obus), Bec de Canard (2.300 obus dont 1.200 sur Ain Zana), Le Kouif (700 obus). De nouveaux moyens lourds ont été mis en oeuvre: canons de 85 antichars; obusiers de 122 et mortiers de 120. Un Groupement opérationnel a été mis sur pied, et les Commandos engagés disposaient d'appuis lourds et de postes radio (C9 -C10 -PP8). La DCA a été très active (canons de 20 en particulier). 13 cadavres ont été trouvés, 1 FM et 8 armes de guerre récupérés. (lH 2833/1-2836/1).

Le bulletin d'activités du Corps d'armée (lH 2932/2) évalue les pertes à la frontière tunisienne, du 6 au 14 mars, à 6 tués et 18 blessés amis, 10 tués et 35 blessés civils, 9 tués et 4 blessés prisonniers de l'ALN. 1 FM récupéré. Les pertes estimées de l'ALN seraient d'au moins 50 tués et 150 blessés. L'activité aérienne a été intense entre le barrage et la frontière. Le GATAC a fait 714 sorties avec moyens lourds. Le bulletin d'activités du Commandant supérieur (EMI/3 -1H 1856/3) fait le point suivant :

"Entre le 6 et le 13 mars, l'ALN de Tunisie a procédé à de nombreux et puissants harcèlements du barrage, par armes lourdes bien abritées. 122 sabotages des réseaux ont été relevés, mais aucun franchissement n'a été tenté. Nos ripostes d'artillerie et d'aviation, bien que très efficaces, n'ont pu prendre avantage sur les positions de batterie adverses, bien protégées du fait des restrictions imposées pour l'emploi des armements lourds en territoire étranger et ami."

" Les dégâts et les pertes en vies humaines sont sensibles, mais ne sont pas à la mesure du volume des tirs effectués, écrit le général Multrier commandant la Zone Est Constantinois. Les tirs sont bien groupés, mais mal ajustés. A Ain Zana, 300 impacts de 85, mais à 500 m du poste. L'Etat-major d'Alger s'était fort inquiété, craignant qu'il ne s'agisse d'une attaque massive. Il n'en fût rien. C'était une manifestation de prestige avant le cessez-le-feu. Heureusement! Il eut fallu revoir toutes les positions, et en venir, sans doute, à une fortification bétonnée. Le poste de la cote 882 n'ayant pas été attaqué ne put démontrer son excellence.

D'après Faivre, Les archives inédites de la politique algérienne, l'Harmattan, ISBN 2-7384-9117-0

On peut penser que le GPRA souhaitait une attaque massive, avec éventuellement une victoire qui pourrait être présentée comme un Dien-Bien-Phu, et qui aide à la conclusion des accords vis à vis de l'opinion française. Et que Boumedienne, qui voyait loin, a préféré remplacer cette attaque par un baroud d'honneur, moins coûteux en homme et lui assurant son commandement qui lui aurait été supprimé en cas d'échec.

 

6 Mars 1962 :

43 attentats, 23 morts, 32 blessés.

Trois jeunes filles enlevées dans le grand Alger, elles ne seront jamais retrouvées.

Un commando FLN attaque une patrouille militaire française, (à Mecheria) un soldat blessé, 5 FLN tués, deux autres blessés. Attaque analogue à Mascara. Le F.L.N. ne veut plus voir les militaires français dans ses zones de non droit.

Plusieurs des sous officiers de la harka de Bou Alam désertent emportant toutes les armes de leur poste de garde.

Le TO concernant Oran donne les précisions suivantes: Coté OAS quatre attentats par arme à feu, 3 tués, un blessé FSNA, 2 incendies volontaires, 4 plastics, un blessé FSE.

Coté FLN, 8 attentats par arme à feu, un à l'arme blanche, 4 tués (3 FSE, 1 FSNA) 6 blessés FSE.

4560 personnes contrôlées, 1332 véhicules fouillés, 8 FSE appréhendés, 4 pistolets automatiques saisis.

Bien entendu les divers contrôle sont tous à l'égard des européens.

 Souvenirs de Meyer, ancien chef d'état major des armées, alors Lieutenant:

Un officier S.A.S, appliquant les consignes, enlève leurs munitions à ses moghaznis, il ne leur laisse que cinq cartouches. Voyant cela six harkis dont un sergent rallié, un autre sergent Ouazzani ancien policier, un autre rallié décident de déserter à leur tour. Ils laissent le message suivant :

"Nous en avons eu assez de vous suivre et de continuer à vous obéir - Nous avons vu et compris que l'ennemi c'est vous - Vous avez trompé vos amis - Nous avons vu que vous déménagez en laissant vos amis à vos places, c'est à dire dans quelques postes - Votre politique nous a trompés et vous nous avez laissé la peur - Et aussi la harka et le commando se sont mis d'accord pour vous tuer tous deux, Meyer et Bernard, mais tout cela a échoué - Nous ne vous avons pas trompés en mangeant ensemble, on regrette en venant ici, mais maintenant celui qui restera sera tué par eux - Nous, on ne trahit pas - Nous n'irons ni au djebel ni au F.L.N. - Celui que nous rencontrerons, nous sommes d'accord pour l'affronter tant que nous aurons des armes entre les mains - Sauf pour l'O.A.S., nous sommes ses amis - Salutations respectueuses au lieutenant Meyer et au sous-lieutenant Bernard

Il Dine (infirmier à la S.A.S.)

(...)

Dans la nuit du 15 mars, le sergent déserteur Ouazzani se présente aux sentinelles d'un poste de tirailleurs. Il vient de s'échapper du commando de la mintaqua où tous les déserteurs ont été conduits. Ils ont été désarmés, attachés et condamnés à mort. Ils seront tous exécutés les jours suivants, le dernier, le caporal Mohamed ben Scheikh, le 2 avril, dans le massif du Garet Gachoua. Le sergent Ahmed ben Tifour (rallié) subira un traitement spécial : il sera mis à mort par ses anciens camarades de la nahia avec une sauvagerie particulière. Mutilé progressivement, son supplice durera plusieurs jours, ses membres seront disposés dans un burnous, devant la tente de sa femme.

( l'armée dissout la harka)

le sergent Ouazzani fait son autocritique. Le sergent Mazouzi, ancien de l'escadron de Senlis, l'escadron des escortes présidentielles, pleure en silence. Dans moins d'un mois, il sera enlevé sous sa tente, et sauvagement exécuté parmi d'autres.

D'après les souvenirs de françois Meyer, lieutenant chef de harka.

 Deux plastics à la préfecture d'Oran, suivis d'un incendie, détruisent complètement les archives concernant les "activistes".

La situation est telle à Oran que l'amiral Barthelemy quitte sa superbe villa des environs pour se réfugier dans la base de Mers el Kebir, et que le général Katz ne quitte plus son PC que déguisé en sous officier de gendarmerie.

 

7 Mars 1962 :

25 attentats, 14 morts, 25 blessés.

Enlèvements.

Plastics.

Jouhaud, dans son livre Ô mon pays perdu (fayard, 1969, 35-05-5094-01) raconte :

Des délégations de confession musulmane, représentant les différents douars de la commune, se désolidarisant des tueurs, se présentaient à la mairie de Mers-el-Kébir et demandaient au maire, M. Janvier Ferrara, de fraterniser avec la Communauté française, comme par le passé. Ils désiraient se rassembler avec leurs camarades français et défiler dans les rues de la commune, drapeau bleu, blanc, rouge en tête, sur l'initiative d'Européens qui s'étaient rendus auprès d'eux, pénétrant non armés dans les douars.

L'Echo d'Oran était autorisé à reproduire la manifestation, voici son compte rendu :

" Après un entretien avec la municipalité, les anciens combattants et les organisations patriotiques, une visite a été faite dans les différents douars, autorités en tête. Au fur et à mesure se formait un groupement des deux communautés. Près de sept mille personnes dont deux tiers de musulmans, brandissant de nombreux drapeaux tricolores, ont ainsi parcouru la route menant à Mers-el-Kébir, prenant la direction de la place Aristide-Briand.

" En tête du long cortège, le drapeau des anciens combattants porté par M. Boujiba Mohammed, avec sa garde d'honneur, formée de deux membres des deux communautés...

" Sur la place Aristide-Briand, vite noire de monde, le restant du cortège se plaçant dans les rues convergentes, le maire a prononcé une courte allocution. Il a demandé aux deux communautés de vivre, comme par le passé, dans le calme et la dignité sous les plis du drapeau tricolore. M. Ferrara terminait au cri "Vive la France!" que toute l'assistance reprit en choeur.

" Aussitôt après, ancien combattant et chef du douar du plateau Saint-Georges, M. Salah ben Mohammed s'est adressé en langue arabe à ses coreligionnaires, leur demandant de vivre dans la fraternité avec les Européens de la commune. Il a flétri le crime monstrueux commis dernièrement à Mers-el-Kébir, en demandant à Dieu de punir sévèrement les coupables. Il a ensuite traduit son allocution en langue française et terminé en criant à son tour " Vive la France! "

" De chaleureux applaudissements ont ponctué ces deux allocutions et la foule s'est retirée après avoir chanté une vibrante Marseillaise.

fin du compte rendu du journal, Jouhaud reprend la parole :

Ainsi, après ces crimes monstrueux, une manifestation de solidarité franco-musulmane, sous les plis du drapeau français, pouvait encore avoir lieu, au grand étonnement, du reste, des pouvoirs publics. Ce qui frappait les observateurs était le nombre important de jeunes Musulmans, alors que, généralement, on s'accordait à les voir pencher vers le F .L.N . Ensuite, l'absence de tout incident avec un service d'ordre uniquement assuré par les civils Kébiriens, l'armée et la gendarmerie n'ayant déployé aucun dispositif spécial. C'était un miracle qui, sur place, frappa les autorités maritimes.

Le commandant Biard, commandant le quartier, qui s'était porté en tête de la manifestation avec le maire Ferrara, l'adjoint Barthelemy, le responsable O.A.S. Saint-Dizier, chargea le commando O.A.S. Jaubert de protéger les Musulmans fidèles. Hélas! la presse française, trop généralement, ne releva pas ce symbole. Il était urgent de lâcher l'Algérie. Le sort réservé à ses habitants laissait indifférente la plus grande partie des métropolitains. .

Je tirais la leçon de cette journée dans une émission pirate passant sur toutes les chaînes :

" Personne, plus que nous, ne peut déplorer le cycle des violences.

- Personne, plus que nous, ne peut regretter les heurts entre communautés. Car nous seuls, Algériens, savons les atroces épreuves que nous avons endurées, que nous endurons toujours.

En rappelant comment s'était développé, depuis 1954, le cycle des violences, je concluais :

" Et justement de Mers-el-Kébir, généreusement loué à la France pour quinze ans, car on loue maintenant le sol de la patrie, monte une grande leçon d'humanité et d'espérance: le beau rêve de fraternité retrouvée peut et doit, demain, être une magnifique réalité.

" On sait les faits: après l'odieux massacre par les fellagha d'une mère de famille et de ses deux enfants, les colères se déchaînaient; les pires violences risquaient de faire leurs ravages dans ce paisible village où vivaient, dans une parfaite harmonie jusqu'alors, les différentes communautés. Encore la violence! La violence. Quel autre moyen en vérité, de se défendre contre les hors-la-loi quand la Justice est désarmée et que les tueurs sont reçus par nos ministres?

" Or, qu'est-il arrivé? La grande majorité des Musulmans a crié son horreur du crime des fellagha.

" Ils étaient quatre mille, des vieux de 14-18 avec leurs décorations, des moins vieux de 39-45, des jeunes à peine parvenus à l'âge d'homme, qui chantaient " la Marseillaise " et brandissaient le drapeau tricolore.

" Ils étaient quatre mille qui ne craignaient pas d'être les victimes expiatoires d'une politique criminelle et qui disaient leur foi dans les destinées françaises de leur petite patrie-

" L'un d'eux, du haut d'une estrade, a proclamé: " Nous avons été frères. Il n'y a aucune raison que nous ne le restions pas toute la vie. Ceux qui ont poussé certains à faire ce qu'ils ont fait, Dieu les châtiera. Vive la France! Vive l'Algérie française! "

" Que chacun médite sur l'enseignement d'un tel exemple, manifestation d'un sentiment latent, anticipation d'un devenir plus humain, plus fécond. Il me laisse, quant à moi, les plus pures raisons d'espérer.

" J'adresse à toute la population musulmane et européenne de Mers-el-Kébir mes vives et affectueuses félicitations pour la belle leçon de fraternité et d'attachement à la France, qu'elle vient de donner.

" Et, avec une émotion bien profonde, j'adresse à M. Ortéga qui, des abîmes de son désespoir, a fait don de sa douleur à la patrie, l'assurance de mon admiration et de ma sympathie sincère. "

 A Evian, reprise des négociations FLN/gaullistes, interrompues officiellement depuis trois mois. (Les négociations des Rousses étaient clandestines).

 

8 Mars 1962 :

38 attentats, 20 morts, 58 blessés.

Parmi les plus représentatifs, le rabbin de la communauté juive à Mascara.

Le capitaine Jacquot, froidement exécuté à Oran par le FLN, les tueurs en voiture ne l'ayant que touché, un en descend, achève le capitaine et reprend la voiture.

Frey décide de rapatrier ce qui reste de barbouzes.

Le FLN, en support de ses négociateurs d'évian, lance une nouvelle offensive contre le barrage, 75 morts, 150 blessés, nouvel échec.

Jouhaud, dans son livre Ô mon pays perdu (fayard, 1969, 35-05-5094-01) raconte :

Des précautions sévères furent prises, pour la visite de Messmer qui inspectait l'Oranie. Le ministre, atterrissant à La Sema, ne traversa pas, par mesure de sécurité, le centre de la ville. On vit un convoi formé de plusieurs dizaines de chars légers, d'automitrailleuses, d'une centaine de camions de militaires armés jusqu'aux dents, contourner la cité maudite, s'engager par la route du port pour atteindre enfin le Château-Neuf. De mon studio, boulevard du Front-de-Mer, je voyais défiler cette escorte au milieu de laquelle se trouvait le grand maître de notre Défense. J'attendais la suite du scénario, préparé minutieusement. Les honneurs furent rendus à Messmer à l'entrée du fort et tandis que, lentement, il passait devant la compagnie d'honneur, au son d'une musique altière, un boum assourdissant, un plastic venait d'éclater dans l'enceinte imprenable.

Cramoisi, le ministre, pourtant courageux, regarda furieux le général Cantarel qui crut, en une seconde, son avancement définitivement compromis, ses ambitions envolées, ses espoirs évanouis. Que la destinée tenait à peu de chose! .

Le général Cantarel cependant, face à ce coup du destin, ne perd pas son sang-froid: il va reprendre l'avantage par un exposé que l'on ne pourra qualifier que de très brillant. Orateur né, esprit clair et lucide, trouvant toujours le mot juste, agrémentant son exposé de formules vivantes qui portent, notre commandant de corps d'Armée sent qu'il séduit son ministre. Il expose dans une dernière envolée des conclusions optimistes, tout à l'honneur de ses officiers qui devront être récompensés dans la personne de leur chef; c'est alors qu'une nouvelle explosion se produit. Un deuxième plastic vient d'éclater à proximité de la salle de conférence. Le général baisse les bras, comme un boxeur vaincu: il est K.O.

Le personnel civil fut congédié, car seul un Pied-Noir, n'ayant pas l'honneur de porter l'uniforme, pouvait être tenu pour responsable de ce manque de correction à l'égard d'un ministre. Hélas! quelques jours après, deux nouvelles séries de plastics éclataient et la salle des cartes était détruite, incident sans importance, puisque notre Armée ne pouvait plus faire la guerre. Les soldats pieds-noirs du contingent furent alors expulsés du Château-Neuf, puis les sous-officiers de même origine douteuse.

Fort heureusement, comme il me fut rapporté, si le ministre fut mécontent sur le moment, il quitta Oran avec un tel plaisir qu'il oublia cette soirée de "strounga".Quant à notre bonne population oranaise, elle en rit encore.

Dans la bonne presse, on a appelé ça "attentat manqué contre Mesmer ".  Messmer (de l'académie française) venait à Oran commenter le communiqué suivant :

M. Pierre Messmer, Ministre de la Défense

Communiqué du 8 mars 1962 aux Chefs de Corps de l'Armée française

" Après un contrat de réflexion de six mois non renouvelable comme personnel civil et sans armes, une période probatoire de trois ans offrira, aux Français d'Algérie comme aux musulmans attachés à la France, un délai suffisant pour choisir le pays de leur installation définitive ainsi que leur nationalité. Il est hautement souhaitable que la minorité des Algériens décide de continuer à vivre dans son pays natal "

le mot important, là c'est "arme". Messmer livre sans état d'âme 150.000 personnes à la mort.

 

9 Mars 1962 :

41 attentats, 20 morts, 30 blessés.

Parmi les plus spécifiques, un barbouze est pendu entre deux immeubles à Bab el Oued, l'hôtel le Radja, libéré de ses barbouzes est rasé par 50 kilos de plastics.

Plastic dans la préfecture de police d'Oran, les installations (et les fichiers) des renseignements généraux sont détruites.

Depuis quelques mois, le F.L.N. muni d'artillerie lourde pilonne depuis la Tunisie les postes qui défendent le barrage. Les militaires demandent avec insistance le droit de riposter, ce droit leur est enfin donné mais seulement pour les batteries les plus proches du territoire algérie, ils bombardent, la propagande F.L.N. essaye d'en faire un nouveau Sakiet.

 

10 mars 1.962 :

Une camionnette piégée explose à Issy-les-Moulinaux, trois morts, nombreux blessés. Bien que ce type d'attentat aveugle ne soit pas dans le style de l'O.A.S. mais rappelle fâcheusement les exactions du F.L.N. le gouvernement s'empresse de mettre cet attentat au compte de la mission 3 (André Canal).

Canal nie par une lettre adressée aux journaux, niera pendant son procès, niera bien après l'amnistie et jusqu'à sa mort. Il accuse les barbouzes gaullistes d'avoir mis en place cette provocation, cette allégation est renforcée par deux faits:

D'une part, trois individus ont été arrêtés le 31 mars, mais immédiatement remis en liberté, le ministère de l'intérieur refusant de confirmer un fait connu de tous les journalistes qui faisaient les commissariats, et même portant plainte pour "diffusion de fausses nouvelles" contre le journal l'Aurore. Ces trois hommes ont ensuite disparu de toute procédure, et aucun suspect n'a jamais été arrêté ni même interrogé.

D'autre part, des tracts furent diffusés en région parisienne par les gaullistes, or ils avaient été imprimés la veille de l'explosion.

Sans aucun doute l'amateurisme des hommes de main recrutés pour l'occasion a transformé en meurtre ce qui devait apparaître comme une tentative avortée, on ne peut croire que les gaullistes considéraient comme des oeufs destinés à l'omelette le peuple français. Melnik dans son livre de souvenir, revendique avoir fait sauter la voiture piégée du quai d'Orsay, et ne dit rien de celle-ci.

 L'O.A.S. Oran met la dernière main à un plan destiné à faire basculer toute l'armée dans son camp, à partir d'un noyau constitué du groupement Buzy-Debat, (un bataillon d'infanterie de marine, deux escadrons de hussards, le cinquième REP, des éléments d'artillerie, une harka du commando Georges) et de plusieurs harkas, de l'ensemble des GMS.

BENOIT François,. (français de souche nord-africaine) soldat au 18e BCP, puis au GMS 48 est capturé par 5 personnes dans un bar à Sétif lors d'une permission de 24 h, détenu à la maiison d'arrêt de Batna, puis à Lambèse, (pesait 80 kg au début, puis 60 kg à sa libération le 24-03-1965 par la Croix Rouge. 3 ans prisonniers du F.L.N. et tout le temps attaaché).

 

11 Mars 1962 :

15 morts, 29 blessés.

Parmi eux un journaliste à la dépêche d'algérie, une fillette de cinq ans à Bône.

Enlèvements, surtout de jeunes femmes.

Un commando FLN attaque un poste militaire français, 16 blessés.

A Oran Jouhaud fixe la date de l'insurrection, qui devra se faire autour de Tlemcen. Jouhaud dispose de l'infanterie de marine, de 3000 harkis, de tous les GMS, du cinquième étranger, d'un régiment de hussard.

Il est prévu qu'un territoire soit ainsi libéré, et que l'O.A.S. demande à participer aux négociations d'Evian.

La date est le 15 Mars. Alger, informé, demande de retarder pour se coordonner avec le maquis de l'ouarsenis, qui doit se mettre en place plus tard.

De la place des Quinconces, une rue étroite mène à l'hôpital militaire Baudens. Il y a des hommes en armes partout. La police et les C.R.S. fouillent maisons et voitures. Les abords du P.C. de Katz (qui débouche, simple coïncidence, sur le boulevard de Stalingrad) sont encore plus rébarbatifs et plus truffés de troupe et de faux civils que de coutume. Toute personne, quel que soit son âge, son sexe, son origine, est systématiquement fouillée.

On arrête ma voiture militaire (l'auteur est, à l'époque, capitaine d'active) et l'on m'en fait descendre. Le chauffeur est interrogé, inspecté. Je présente mon autorisation de port d'arme. On visite le coffre. Il m'est impossible de poursuivre, car la rue est complètement bloquée. Contraste: au-dessus de chaque porte, de chaque fenêtre, flotte un grand drapeau français. Des tracts O.A.S. tricolores recouvrent absolument toutes les façades. De petits drapeaux, groupés en longues banderolles, sont tendus d'une maison à l'autre, en travers de la chaussée. Quartier de dockers, de petits ouvriers et de pêcheurs. Hommes, femmes, enfants attendent en silence que passent le "Service d'ordre" et ses équipes de fouille.

J'aperçois, le bras en l'air, le visage et les paumes des mains appuyés contre un mur, trois infirmiers militaires en tenue. Sur les trois, deux sont des adjudants aux cheveux gris. Les C.R.S. tâtent longuement les poches et les doublures. Un des sous-officiers se retourne. J'entrevois sa barrette de décorations: médaille militaire, croix de guerre 39-45, croix de guerre T.O.E., croix de la valeur militaire. Ils restent ainsi en plein soleil et à la vue de tous, pour le plaisir sans doute. J'entre dans l'hôpital. Les hommes du poste de police, de jeunes infirmiers du contingent, commentent amèrement le spectacle: "Bien sûr, un peu sec l'adjudant, mais au fond un brave type, tu sais! Ça, c'est gros! Franchement, c'est dégueulasse!" C'est tout. Ils ont jugé pour moi, comme ils le font depuis des semaines dans le jargon et le vocabulaire troupiers. Ces jeunes gens qui ont vu arriver tant de blessés et de malades du barrage et de l'intérieur, qui se sont si souvent rendus le soir, ou à l'aube, vers l'hélicoptère qui amenait une intervention urgente, les voilà qui assistent à la fouille d'un quartier où ils n'avaient que des amis et l'injure faite en pleine rue par les hommes de M. Frey à leurs sous-officiers les plus anciens et les plus respectables. Ecoeurant? Dégradant? Non: simple aboutissement d'ordres signés de Gaulle, et que Katz applique bien entendu... de la meilleure manière qui soit.

Le même jour, 20 heures . Les concerts de casseroles sont apparus depuis juin 1961 comme un des rares moyens d'expression et de défoulement dont les européens des villes pouvaient encore user. La radio étant contrôlée et placée sous le barbelé, la presse étant jugulée et totalement censurée, les réunions publiques étant interdites ainsi que toute manifestation collective, enfin le couvre-feu instauré vers 22 heures puis 20 heures empêchant toute rencontre amicale ou même familiale, les moyens d'expression étaient devenus inexistants. C'est alors que, naturellement, la population fit donner les batteries des fameuses casseroles. Un soir, Alger déclencha cette innovation. Trois jours plus tard, toutes les villes d'Algérie martelaient leur mécontentement.

Ce soir, un concert est annoncé pour 20 heures dans Oran, heure de l'allocution annoncée par M. Joxe. A 19 h 50, plusieurs explosions se font entendre aux sorties sud de la ville: panne générale d'électricité. L'image des écrans de télévision a fait place au blanc laiteux du cadran, l'émission officielle devient inaudible, couverte par un appel de l'O.A.S. tout aussi inaudible, rapidement suivi de la Marche des Africains. A 19 h 55, le grand cirque commence et la symphonie des casseroles se déchaîne. En fait, on frappe sur tout objet sonore. Casseroles et chaudrons dominent l'ensemble, en instruments de base. Mais bouteilles, rideaux de garages, tubes métalliques, portes, sifflets, trompettes d'enfants, tout est utilisé. Telle est la réponse de ce million de Français désespérés au discours inutile et très officiel du bradeur d'Evian. Quelques chiens ont même été dressés dans certains quartiers pour accompagner le concert. Je ne croyais pas à cette plaisanterie, jusqu'au jour où j'ai constaté le fait moi-même sur place. Au signal de son maître, le chien aboyait les trois brèves et les deux longues: les moments d'histoire les plus pathétiques se font souvent accompagner d'un cortège de détails atrocement ridicules ou tristement amusants.

Malgré le couvre-feu, quelques familles sont descendues dans la rue de Tlemcen. Des drapeaux O.A.S., sigle noir sur fond blanc, sont accrochés aux fenêtres et aux lampadaires, entrecroisés avec des drapeaux tricolores. Devant le petit cinéma de quartier stationne l'agent de police de service. Comment pourrait-il réagir devant l'assaut de tout un quartier survolté ? Devant lui, trois jeunes hommes dressent une échelle pour accrocher un grand drapeau sur le toit du cinéma. L'agent, immobile, les yeux fixés sur je ne sais quelle devanture, semble ne rien voir. Une jeep passe lentement, la foule l'arrête au carrefour et lui demande de sonner "Algérie Française", ce qui est fait sur-le-champ: c'est la condition sine qua non pour passer et poursuivre. Chaque véhicule est ainsi stoppé et chaque coup de klaxon est accompagné des cris enthousiastes de la population. Le concert se poursuit. Une famille complète défile au milieu de la rue. Les deux garçons portent la grande poêle à frire réservée à la paëla sur laquelle le père frappe avec un maillet de bois; la mère martèle avec une cuillère un chaudron imposant; la mémé en robe de chambre accompagne le cortège en tapant sur une bouteille vide, une fillette ferme la marche et fait tinter une petite fourchette sur sa timbale. Famille du petit peuple pied-noir qui s'accroche à son désir de demeurer dans son pauvre appartement bien étroit, mais sous son soleil et sous son drapeau. Le spectacle dure pendant quarante-cinq minutes.

Quarante-cinq minutes du même bruit métallique, excitant au possible, qui ont mis à bout les nerfs déjà tendus de la ville entière. Il en fut de même à Bel-Abbès, à Alger, à Bône, à Constantine, à Mostaganem. Et M. Joxe a parlé sous ce fond sonore. Que lui importe? Les dés, ses dés à lui, sont jetés. Ce bruit de casseroles ne pourra rien changer. Le peuple de France ne l'aura ni entendu, ni même su. Et comment d'ailleurs le comprendrait-il puisqu'il ne vit pas à l'unisson de cette province malheureuse, lointaine pour lui, et contre laquelle l'a volontairement braqué la propagande officielle depuis tant de mois. La ville s'endort. Une fusée rouge monte dans le ciel, quelques rafales déchirent la nuit vers la Senia. Nuit comme les autres, nuit de sursauts et de lente agonie.

"Journal d'une Agonie" du colonel Bernard Moinet, ISBN 2 907862 91 x

 

12 Mars 1962 :

42 attentats, 29 morts, 32 blessés.

Une bande de tueurs du F.L.N. parcourt les rues d'Alger et tue tous les européens, 12 morts dans le centre d'Alger, dont un jeune militaire en civil. La presse et les médias expliquent que c'est une réaction bien naturelle aux sanglants attentats de l'OAS.

Salan écrit à Canal, de grâce, cessez les plastics, ils nous font un mal énorme, Canal ne l'écoute pas plus qu'il n'a écouté Sergent sur le même thème.

Devant l'insecurité (et requisitionné pour y loger les gardes mobiles) le Lycée Bugeaud ferme avant la date normale. Les éleves des classes preparatoires aux grandes écoles sont informés qu'il n'y aura pas d'épreuves organisées cette année à Alger. Ils sont invités à prendre contact avec les lycées métropolitains. Ceux qui ont pu trouver une place d'avion, (et se sont assis sur les consignes de l'O.A.S. de ne pas "deserter") se retrouvent à Marseilles où le lycée est debordé., et en envoie une section à Montpellier. Que certains aient pu, dans ces coditions, intégrer une école est un dernier hommage à la qualité de l'enseignement à Alger et de ses professeurs.

Le gouvernement interdit le survol de la France à tous les avions privés.

 

13 Mars 1962 :

52 attentats, 29 morts, 55 blessés en algérie.

L'émetteur de radio télé d'Oran étant pratiquement inutilisé suite aux nombreuses actions de l'O.A.S. (plastic sur l'émetteur, son alimentation, enlèvement des techniciens...) Katz décide de le déplacer dans une caserne où il sera en permanence surveillé, alimenté par les groupes électrogènes militaires et opéré par du personnel fiable.

L'émetteur est démonté et un commando de l'O.A.S., déguisé et muni des bons papiers en prend tranquillement livraison. L'émetteur servira ensuite beaucoup, ses émissions devenant bi journaliéres.

 A Montreuil, (Bagnolet?) des membres du FLN attaquent une patrouille de police, un policier Tigrine Mohand et un terroriste tués.

Les troupes sont consignées à Toulon.

 

14 Mars 1962 :

36 attentats, 18 morts, 31 blessés.

Parmi eux, harkis, gendarmes.

Pour la première fois, l'aviation française mitraille les terrasses d'Oran, à la demande du général Katz. (Il a interdit aux habitants de monter sur leurs terrasses.) Les grandes consciences et les autorités morales approuvent cette mesure humanitaire. Jamais l'armée n'avait nulle part en algérie mitraillée de telle façon une ville musulmane. Il est vrai que jusqu'en 1962, aucune d'entre elle n'était ouvertement FLN.

 Plastic à Nancy.

Les troupes sont toutes consignées en métropole.

Le monde signale que la moitié des juifs de Constantine ont quitté leur ville, la plupart sans idées de retour, souvent vers Israël. Comme d'habitude avec le Monde, c'est un mensonge, la plupart des juifs de Constantine en particulier et d'Algérie en général ont rejoint la france. Une fois de plus le Monde relaie la propagande FLN, cette fois sur le thème "ils sont partis de leur plein gré, car racistes, il ne pouvaient accepter de vivre sous un gouvernement musulman pourtant si humain".

 

15 Mars 1962 :

45 attentats, 41 morts, 45 blessés, nouveau sommet.

Parmi eux, brigadier de police à Alger, instituteur musulman à Alger, conseiller municipal musulman à Blida, jeune suisse de quinze ans à Alger, gendarme à Mostaganem, passants à Tiaret.

Accrochage entre l'armée et un groupe du F.L.N., dans les environs de Tlemcen le capitaine est tué.

Un homme rendu fou par la mort de sa femme et de sa fille s'arrête à un arrêt du bus à Hussein Dey et mitraille les musulmans qui attendaient l'autobus, tuant dix personnes et en blessant six. Il se rend à la police sans résistance. Les grandes consciences s'indignent.

Coté OAS, tir au bazooka à Alger sur l'immeuble de la délégation générale, exécution de six personnes des centres sociaux éducatifs, considérés comme des centre FLN, dont l'écrivain connu Mouloud Feraoun. Il s'agit surtout d'éliminer Jacques Despinoy, alias colonel Foyer qui utilise cet organisme pour recueillir auprès du FLN des informations sur l'O.A.S. qu'il transmet ensuite à la mission C, et de profiter d'une visite de Petitbon pour faire d'une pierre deux coups.

Ces "centres sociaux éducatifs" avaient été créés par Soustelle à l'initiative de germaine Tillon, pour encadrer et former la jeunesse musulmane. Vite devenus des centres de formation FLN, ils avaient été mis en veilleuse et remplacés par les Centre de Formation de la Jeunesse Algérienne mis en place et encadrés par l'armée.

En 61, les centres sociaux sont relancés par les gens du rocher noir, en particulier le préfet Petitbon, chargé des liaisons avec le FLN. C'est lui qui avait convaincu Leroy et Villard de livrer les chefs de l'O.A.S. Un indicateur de l'O.A.S. Salarino avait averti que Petitbon serait au château royal, le siège des centres sociaux. Degueldre avait monté une opération contre Petitbon et Despinoy. Un autre indicateur avait averti Petitbon des intentions de l'O.A.S., Petitbon n'est pas venu, il a averti Despinoy, mais il n'a pas pensé à avertir Feraoun et les autres assistants à la réunion, qui furent assassinés.

A Oran l'O.A.S. recule à neuf heures l'heure du cessez le feu, fixée à huit heures du soir par Katz. Tous les Oranais se font un devoir d'être dans la rue de 8 à 9.

 Lors du comité des affaires algériennes de ce jour, une note du général commandant en chef en algérie qui demande que les harkis soient autorisés à rester groupés et armés un an après le cessez le feu, note qui figure dans les archives de l'armée n'est pas lue (?) en tout cas elle n'est pas citée dans le compte rendu qui figure aux archives dudit comité.

Par contre y figure une note du ministre des armées pour ouvrir des centres de regroupement et de protection en Algérie, pour les mêmes harkis.

 

16 Mars 1962 :

42 attentats, 24 morts, 22 blessés.

Parmi eux, une jeune fille à Oran qui ne s'est pas laissée enlever et a été égorgée sur place, un GMS à Alger, un officier de police à Oran, l'épouse d'un gardien de la paix à Sidi bel Abbés.

A Tlemcen, pensant que des barbouzes ont été infiltré dans le personnel de l'hôtel de ville l'O.A.S. encercle le bâtiment et contrôle l'identité de tous les présents.

Les détenus FLN de la prison d'Oran, dont les autorités françaises "ne peuvent plus assurer la sécurité" sont transférés par avion sur Blida par quatre Nord Atlas militaires qui font plusieurs voyages. On n'en fera pas autant en mai juin pour les pieds noirs.

 

17 Mars 1962 :

Plus de deux mille explosions ont été enregistrées officiellement dans la ville depuis septembre 1961. La première charge a explosé le lendemain de l'arrivée du premier Préfet de Police d'Oran. Depuis, une sorte d'accoutumance s'est établie: on s'habitue à tout, même aux plus sinistres choses. Lors des premières manifestations de ce genre, la police intervenait en trombe, inspectait les maisons environnantes, enquêtait à grand renfort de P.R.G., de Sûreté du Territoire, de gendarmes, de C.R.S., d'envoyés des Préfectures et de militaires. C'était le spectacle bien réglé des cohortes de voitures qui venaient s'entasser à l'endroit même de l'explosion, comme pour récolter à plaisir une rafale d'arme automatique, ou les éclats d'un second engin.

Puis les interventions des enquêteurs lassés se firent plus tardives, plus espacées. On ne mesurait plus, on ne relevait plus les empreintes, on ne photographiait plus au flash. Les plastics étaient trop nombreux et trop importants en une seule sieste ou en une seule nuit. En outre, jamais une équipe de plastiqueurs n'avait pu être interceptée, voire même dépistée. Ecoeurés, se heurtant au silence de toute une population qui se contentait de donner pour toute réponse: "Nous n'avons rien vu" tout en continuant à balayer les débris de verre ou de briques qui jonchaient le trottoir et la chaussée, les éléments d'intervention ne se déplacèrent même plus.

Devant la loi du silence, ils ne pouvaient qu'enregistrer les faits, sans pouvoir en tirer aucune conclusion. Les centaines d'exactions ainsi dirigées contre les habitations ou les magasins ne firent que quatre morts et une vingtaine de blessés légers. Et j'ai toujours été étonné par ce nombre limité de victimes réelles. Car les appartements étaient véritablement soufflés, les portes arrachées, déchirées et projetées à plusieurs mètres, les lustres, les carreaux, les bibelots, les cadres également volatilisés, les murs souvent criblés d'éclats de métal ou de pierre. Parfois, d'énormes trous d'où montaient de grandes colonnes de fumée grise faisaient figure d'autant de gouffres béants dans les escaliers, ou au milieu même d'une pièce, ou encore dans une cloison. Dans ce fatras de briques, de ciment, de verre brisé et dans l'odeur âcre de la poussière qui séchait la gorge, pas de blessés. Une peur terrible, beaucoup de femmes évanouies, beaucoup d'hommes blêmes, les poings crispés. Et tout autour, derrière les sourires voilés de tout un quartier complice, le silence.

Je viens d'avoir ce soir une preuve de la précision des coups de main réalisés et de la désignation des objectifs. Deux fortes explosions viennent de retentir vers 21 heures devant un café de la rue de Tlemcen. De ma fenêtre, je vois monter les colonnes de fumée et j'aperçois comme un corps allongé au milieu de la route. Je crois à un attentat F.L.N. dirigé contre un petit bar où, le soir, se retrouvent, autour de la traditionnelle anisette quelques dizaines d'européens. Or, il s'agit de plastic. Je trouve sur place une voiture déchiquetée et, en guise de cadavre, une moto éventrée, projetée sur la route. Les gendarmes sont sur place et font leur compte rendu par radio, sans même descendre de leur voiture: il y a eu plus de dix explosions en cinq minutes, dans un rayon de cinq cents mètres. Tranquillement, les commerçants dégagent les débris de leurs carreaux et de leurs vitrines; tout a volé en éclats à cinquante mètres à la ronde. Qui donc a-t-on visé? Pourquoi deux explosions? Je ne saurai rien avant le lendemain matin.

C'est Sadia, la femme de ménage, qui m'explique l'affaire, car on en a beaucoup parlé dans le quartier musulman durant toute la soirée. La voiture visée appartenait à un israélite, récemment sorti de prison, avant même d'avoir accompli sa peine de trois ans pour complicité avec le F.L.N. Ce soir-là, monsieur le libéré recevait la visite d'un arabe, collecteur de fonds F.L.N. En deux secondes, la voiture de l'un et la motocyclette de l'autre ont été détruites par deux charges rapidement déposées par trois hommes, passagers d'une Frégate, qui a disparu un instant après. Or, la rue était noire de monde et deux ou trois patrouilles de gendarmerie se trouvaient à proximité. Cette précision, cette promptitude dans le renseignement et dans l'action laissent à réfléchir. Sadia conclut simplement: Oh, tu sais ils ne sont pas à plaindre. Ils nous ont pris tellement d'argent depuis qu'ils sont dans le quartier! Et elle dit cela avec une expression de méchanceté et de colère. La race des collecteurs de fonds s'est en effet abattue comme la vermine sur la population d'Algérie. Au nom de la rébellion, on a soutiré des milliards à l'ouvrier et au paysan qui parvenaient déjà difficilement à faire survivre leur famille. Où est passé tout cet argent? Il s'est bien souvent transformé en fonds perdus, dans les mains de quelques trafiquants ou d'intermédiaires sans vergogne qui en ont tiré et qui en tirent encore le plus large profit. Longtemps, la collecte fut freinée dans les centres urbains, car il était difficile de ramasser un tel impôt mensuel, parfois bi-mensuel, en toute quiétude. Mais, depuis un an, les agents opèrent sans être gênés en quoi que ce soit, malgré la réprobation unanime, mais timide et craintive, de tout un peuple malheureux. Certains, parfois, tentent de s'opposer à l'opération: le couteau ne les rate pas. Mais le gendarme, direz-vous? Que fait donc le gendarme? Le gendarme verbalise.

"Journal d'une Agonie" du colonel Bernard Moinet, ISBN 2 907862 91 x

Le prefet de police Maurice Papon, soucieux de l'avenir des harkis de la force de police auxiliaire, signe un arreté réglant leur intégration dans les rangs de la police parisienne. 304 sont ainsi integrés, seuls une cinquantaine ne sont pas recrutés, mais ils sont recasés dans des services d'entretien, ou dans le privé. Progressivement ils obtiendront la nationalité française, Le capitaine Montaner, jusqu'en avril 1967, s'occupera de ses hommes, et en particulier de leurs familles restées en algérie et qu'il rapatrie à force de tenacité. Dans sa courte existence, (deux ans) l'unité compte 28 tués et 82 blessés. En outre une vingtaine de ses informateurs ont également été tués.

 

18 Mars 1962 :

Les déclarations d'intention d'évian sont paraphés (du coté F.L.N. par le seul Belkacem), ils fixent le cessez le feu au lendemain 19.

Le texte, qu'on lira ici, prévoit que personne ne sera inquiété pour le passé. Le droit de quitter l'algérie pour tous ceux qui le souhaitent. La double nationalité pour tous les non musulmans pendant trois ans seulement. Pas d'expulsions ni d'expropriations sans avertir le gouvernement français. Les nationaux français doivent cependant choisir entre exercer leurs droits civiques en france ou en algérie.

En contrepartie, poursuite du plan de Constantine (environ 50 milliards) aide de 100 milliards par an pendant trois ans, renouvelable.

Maintien de la base de Mers El Kebir. Un article secret ICI (dont l'existence a été reconnu par le gouvernement français) prévoit la poursuite des expériences atomiques et chimiques au Sahara, c'est le seul qui fût respecté. D'autres articles secrets doivent exister, en particulier les anciens SAS sont persuadés qu'il y a eu des textes précis concernant le désarmement et le sort des harkis. Les textes concernant ces articles secrets ne sont pas disponibles aux chercheurs, bien qu'ils devraient l'être conformement aux régles en vigueur pour les publications des archives d'état.

De gaulle fait libérer Ben Bella le soir même; ce dernier prend immédiatement - avec ses collègues - l'avion pour Genève et déclare à la télé "c'est la solution du bon sens."

Les élus d'algérie publient un communiqué "les populations d'algérie se défendront elles-mêmes;"

Le sort des européens d'algérie était scellé par l'article 2 du chapitre 2A qui permet aux européens de faire la demande de nationalité algérienne après les trois ans de la période temporaire. Ils n'étaient donc pas de droit algériens, mais devaient obtenir l'accord du F.L.N., accord qui ne sera pratiquement jamais accordé. De plus cette nationalité n'est qu'une sous nationalité, celle d'un dhimmi en pays musulman.

L'armée française rentre aux casernes, l'article 5 prévoit qu'elle stationne de façon à éviter tout contact avec les forces du F.L.N. Un décret secret du gouvernement leur indique : "l'armée française ne pénétrera pas dans les zones fixées pour le stationnement des forces F.L.N. Tout contact avec les forces F.L.N. sera évité". Dans ses mémoires, le général Fourquet, successeur d'Ailleret en tire les conclusions : " la sécurité diminue instantanément;"

L'OAS intercepte des armes en partance pour la métropole, 200 lance rockets, 83 mitrailleuse de 12,7, fusils mitrailleurs, pistolets mitrailleurs, des milliers de fusil, des munitions. Il manque les percuteurs, mais tous les ateliers de mécanique d'Oran les fabriquent.

Jouhaud à Oran, désespérant de décider le capitaine qui a donné son prénom Georges au commando, convoque son adjoint, un F.L.N. rallié Youssef. Youssef ne vient pas, le commando sera mis à mort par le FLN avec des raffinements exrtraordinaires.

Deux frères, Henri COUTURIER 18 ans , Paul COUTURIER 14 ans . Enlevés à Ténès le 14 janvier 1962 par des terroristes FLN avec la complicité de barbouzes gaullistes.

Séquestrés, suppliciés, torturés durant deux mois glacials dans le maquis du massif du Zaccar (Orléansville-Algérie)

Retrouvés ligotés, ventres ouverts, égorgés et émasculés le 18 mars 1962. Les pouvoirs publics ayant refusé de restituer les corps à la famille profondément éplorée et meurtrie ad vitam æternam il lui a été impossible d'avoir ni offices religieux, ni obsèques ni sépultures.

 

19 Mars 1.962 :

"Voilà une algérie nouvelle, libre, prospère, heureuse, qui trouvera dans son indépendance les ressources de sa fierté, dans sa coopération avec la France l'exaltation de ses souvenirs et les raisons de ses espérances."

C'est dans cette superbe langue de bois que jean Morin, ministre résident à Alger, annonce aux français d'algérie leur mort future dans d'horribles tortures ou leur exil. (la valise ou le cercueil).

Les " déclarations d'intention": Citation

" Le 19 mars fut proclamé un cessez-le-feu entre l'Armée française et le FLN. Cet accord tenait en 11 articles. Le premier était ainsi rédigé:

" Il sera mis fin aux opérations militaires et à toute action armée sur l'ensemble du territoire algérien le 19 mars 1962 à 12 heures". Cet accord ne sera que partiellement respecté, en raison d'un certain nombre d'incidents temporaires et locaux. Il annoncera la fin du conflit, connu sous l'appellation de Guerre d'Algérie.

Il en va tout autrement du second article :"Les deux parties s'engagent à interdire tout recours aux actes de violence collective et individuelle. Toute action clandestine et contraire à l'ordre public devra prendre fin."

S'il est vrai qu'à partir du 19 mars, une certaine convergence a rapproché le FLN et les forces spécialisées pour mettre fin à l'activité des commandos de l'O.A.S., ce qui découlait de l'application même de cet article 2, le FLN a continué à ordonner et à organiser des activités clandestines. Il en a résulté des troubles divers venant s'ajouter à ceux que suscitait l'O.A.S. Ceci a entraîné des violations répétées de l'accord particulièrement de l'article 3 (les forces du FLN devaient se stabiliser à l'intérieur des régions correspondant à leur implantation du moment) tandis que de nombreux enlèvements étaient perpétrés ce qui violait de surcroît la Déclaration des Garanties jointe à l'accord.

Précisons en outre que sous la dénomination générale d'Accords d'Evian, se trouvent rangés, avec l'accord de cessez-le-feu, un décret d'amnistie de toutes les infractions commises avant le 20 mars 1962 (sauf pour l'OAS, non signataire, et dont les actes sont juridiquement considérés comme de droit commun) et une Déclaration Générale.

Cette dernière se subdivise en parties détaillées. Elles sont au nombre de trois : l'une concernant l'organisation du référendum d'autodétermination, l'autre l'organisation des pouvoirs publics jusqu'à l'autodétermination et la troisième, mais non la moindre, une Déclaration de Principes. Cette déclaration énonce les règles devant assurer la protection de la minorité européenne dans le cadre du futur état algérien indépendant, les règles de la coopération entre les deux pays, celles devant présider à la mise en valeur du Sahara, et à la coopération culturelle. Cette partie de l'accord ne fut pas moins violée que les précédentes.

Le GPRA fit savoir que les déclarations relevaient du droit interne français. (Note manuscrite jointe au Dossier Rose du Quai d'Orsay.) (et donc ne s'imposaient pas à eux).

D'après Monneret, " la phase finale de la guerre d'algérie ", l'harmattan, ISBN2-7475-0043-8 "

 

Ces accords n'en sont pas, analyse juridique : Citation. des "accords" dénués de toute portée juridique :

Pouvait-on au moins espérer que les accords conclu avant l'indépendance comporteraient des engagements qui protégeraient les intérêts français durant une période de transition ? En France, les prétendus accords d'Evian ont été salués par une explosion de soulagement comparable, toute proportion gardée, à celle qui accueillit Daladier au retour de Münich: ils annonçaient le retour des jeunes du contingent !

Mais quelle était leur portée véritable ?

A l'usage des électeurs du référendum de 1962, la Documentation française a édité une plaquette intitulée "Les accords d'Evian" qu'on peut aisément se procurer encore aujourd'hui. S'il dispose d'une incontestable force de communication ce titre est parfaitement erroné! Dès la seconde page, on ne parle plus d'accords mais "des termes fixés par les Déclarations d'Evian ". Jamais, dans le texte lui-même, le mot accord n'est utilisé ! Entre "des accords" et "des déclarations", il y a pourtant plus qu'une nuance !

Le 20 mars 1962, le général de Gaulle, Président de la République, par un message au Parlement, présente ce document. Lui même se garde bien d'user du terme accords. Il le désigne comme reproduisant "la conclusion des négociations d'Evian avec les représentants du FLN".

Si on est doté d'un solide sens de l'humour, relire aujourd'hui ce document officiel peut constituer un exercice tout à fait réjouissant. On y apprend que les droits de propriété (des Européens en Algérie) seront respectés.: "Aucune mesure de dépossession ne sera prise à leur encontre sans l'octroi d'une indemnité équitable préalablement fixée".

(...) "Ils auront une juste et authentique participation aux affaires publiques" et "une équitable participation... dans les diverses branches de la fonction publique" (algérienne).

"La mise en valeur des richesses du sous-sol" (saharien) sera assurée par un organisme technique "ayant un caractère paritaire" (mi-algérien, mi-français). "Les textes officiels (lois et décrets, algériens) seront publiés ou notifiés dans la langue française en même temps qu'ils le seront dans la langue nationale". Etc., etc...

Si, bien qu'ils aient été violés dès la première heure, aucun gouvernement français n'a jamais tenté un quelconque recours devant la cour internationale de Justice de La Haye, c'est que l'existence des "accords" d'Evian en tant que contrat ayant une valeur juridique internationale est des plus douteuse. Et ceci pour une série de raisons dont une seule serait suffisante pour assurer leur nullité:

1 -Les "accords" se présentent sous la forme d'un texte diffusé unilatéralement par la Documentation française et publié au J.O., texte dépourvu des signatures, tant des trois négociateurs français (Louis Joxe, Robert Buron et Jean de Broglie) que de celles des quatre négociateurs désignés par le FLN (Belkacem Krim, Saad Dahlab, Ben Tobbal, M'hamed Yazid). On ne sait donc ni si les négociateurss ont réellement donné au texte leur accord formel (et nous allons voir que les raisons d'en douter sont des plus sérieuses), ni quelle entité ils étaient censés avoir engagée par leur éventuelle signature.

2 -des deux parties à la négociation, l'une avait un statut d'Etat souverain tandis que l'autre était un "Front", c'est à dire un rassemblement politico-militaire auquel la France s'est refusée, du moins jusqu'au jour du scrutin d'autodétermination - qui est postérieur aux accords -à reconnaître toute existence légale. Ne voulant pas davantage reconnaître le GPRA en tant que Gouvernement provisoire de la République algérienne, la France a pu certes trouvé pratique de négocier avec le FLN. Mais la nature juridique exacte de la personne morale qu'elle s'est ainsi choisie comme partenaire à la négociation, reste à définir .

Comment dès lors soutenir valablement que les gouvernements qui se sont ensuite succédés à Alger étaient tenus par des "accords" conclus par un ectoplasme juridique ?

3 -Le texte des "accords" d'Evian ne stipule rien. On se borne à énoncer des intentions. Relatant ce qu'on pouvait savoir des négociations d'Evian, la presse de l'époque ne parlait d'ailleurs jamais que de la publication prochaine de "déclarations d'intention" (cf. par exemple Le Figaro du 7 mars 1962). Le terme accords, terme abusif inventé par des "communicateurs", n'a été introduit que tardivement comme titre de la plaquette publiée par la Documentation française.

Il s'est ensuite imposé dans le langage courant. Mais à tort. Le référendum du 8 avril 1962 "autorisait" le Président de la République "à conclure les actes qui seront à établir après que les Algériens se soient prononcés par référendum". L'essentiel était donc renvoyé dans le futur, après que l'Algérie serait devenue indépendante et souveraine. "Si elles sont adoptées par les populations algériennes lors du scrutin d'autodétermination, elles (les déclarations gouvernementales) acquerront la valeur d'un texte organique du nouvel Etat et serviront de base aux conventions qui seront ultérieurement conclues".

"Acquerront la valeur", "serviront base", "seront ultérieurement conclues". Qui donc, au nom de l'avenir, prenait de tels engagements? Qui était lié par eux ?

4 -ce faisant, le gouvernement français a offert à l'autre partie l'occasion de l'enfermer dans un piège. Puisque les négociateurs d'Evian n'étaient là qu'en tant qu'envoyés du FLN et non en tant que membres du gouvernement provisoire algérien ou plénipotentiaires délégués par lui, les textes vers lesquels la négociation s'orientait devaient, pour prendre valeur d'engagement, être préalablement soumis aux instances décisionnelles de la révolution algérienne.

Avant de conclure la négociation, les représentants du "Front" demandèrent donc à se rendre à Tripoli, soumettre l'état des discussions au GPRA, gouvernement provisoire en exil, et au CNRA, Conseil national de la Révolution algérienne, instance d'orientation politique du FLN .

Ces consultations offraient l'occasion d'une surenchère. Allié à Ben Bella, lequel avait été récusé comme négociateur par la France et en avait conçu l'amertume qu'on imagine, Boumedienne obtint du CNRA, le 7 juin 1962, que les textes en cause soient secrètement rejetés. Secrètement voulait dire que les négociateurs français devaient tout ignorer de ce rejet qui ne serait révélé au grand jour que lorsque l'indépendance serait devenue un fait acquis.

En revanche et pour sa propre part, le gouvernement français s'est lui-même lié par ces textes. Ceci d'une manière d'autant plus rigoureuse qu'il les fit sacraliser en France par le référendum du 8 avril 1962 !

En somme, ces "accords" de dupes, en réalité des déclarations d'intention unilatérales, ne se sont jamais imposées qu'à l'une des deux parties, l'autre ayant dès l'origine et secrètement décidé qu'ils seraient nuls et non avenus.

5 -quelques années plus tard, à l'occasion d'un contentieux (arrêt Morali), le Conseil d'Etat a eu l'occasion de s'interroger sur la nature exacte des "accords" d'Evian. Ne parvenant pas à la définir lui-même, ce qui est déjà assez symptomatique, il renvoya la question au gouvernement. Embarrassé, ce dernier mit quelques délais à lui répondre. Puis il argumenta... comme il put:

"Les déclarations du 19 mars communément désignées (sic) sous le nom "d'accords d'Evian" constituent une convention internationale", affirma-t-il, en raison d'une part de l'échange de lettres entre le Président de la République française et le Président de l'exécutif provisoire algérien et d'autre part du fait de leur enregistrement du 24 août 1964 au Secrétariat général des Nations unies (réponse du ministre des Affaires étrangères au Conseil d'Etat - mars 1968).

Cette thèse officielle est aussi contournée que fragile.

En effet, "l'exécutif provisoire" dont elle se sert pour tenter d'attribuer une portée juridique internationale aux "déclarations" du 19 mars, ne doit être confondu ni avec le gouvernement provisoire de la République algérienne en exil (GPRA) que le gouvernement français ne reconnaissait d'ailleurs pas, ni avec le gouvernement algérien qui, après le scrutin d'autodétermination, s'est mis en place à Alger à compter du 3 juillet 1962.

Cet "exécutif' est une institution éphémère, exclusivement destinée à préparer le scrutin d'autodétermination. Il n'a eu d'existence que du 19 mars au 3 juillet 1962. Il a été créé et mis en place par le gouvernement français lui-même et ne pouvait tirer sa très provisoire légitimité que de lui. Il ne pouvait représenter que lui. C'est d'ailleurs le gouvernement français qui a désigné son président en la personne Abderahmane Farès, grand notaire algérois, précédemment président de l'Assemblée algérienne.

Quel que soit le respect que l'on doit à ce très honorable personnage, un échange de correspondance entre lui et le chef de l'Etat français possède à peu près la même valeur contractuelle et internationale qu'un échange de notes entre le chef du gouvernement et un préfet. Pour contracter ces fameux "accords", il n'y avait toujours pas deux parties, mais une et une seule: l'Etat français.

Quant à l'enregistrement, deux ans plus tard et à la seule initiative de la France, du texte de ces déclarations au Secrétariat général du "machin", il évoque irrésistiblement un classement sans suite aux archives de l'histoire.

6 -D'ailleurs, même le président de cet "exécutif provisoire" a, dans sa réponse, pris de précautionneuses distances. Tandis que la lettre du général de Gaulle évoque "la mise en vigueur des déclarations du 19 mars", (à noter qu'à nouveau, le général évite soigneusement d'utiliser le terme "accords") la réponse de M. Abderahmane Farès se limite, sans prendre en retour le moindre engagement, à donner acte au chef de l'Etat français que la France "transfère ses compétences" à l'Algérie !

A supposer que M. Farès ait disposé d'une quelconque légitimité pour parler au nom de l'Algérie indépendante, lui non plus ne l'a prudemment liée en rien. Il s'est borné à enregistrer les intentions unilatérales du gouvernement français!

 En résumé, en tant qu'instruments de droit international, les "accords" d'Evian n'ont jamais existé. C'est bien pourquoi ils n'ont jamais été utilisés comme tels. En revanche, en publiant unilatéralement ces "déclarations" et en soumettant leur approbation au référendum, le gouvernement français se liait irréversiblement. Il s'engageait notamment à maintenir son assistance économique au niveau précédent, celui du financement du Plan de Constantine.

Il se livrait surtout à un retentissant effet d'annonce.

Devant l'opinion tant métropolitaine qu'internationale, il proclamait: la guerre est finie, je me suis débarrassé de cette "boîte à chagrin" !... La manière importait peu.

Afin que l'analyse soit exhaustive, on peut aussi examiner la validité juridique des "accords" d'Evian non plus en tant que documents contractuels internationaux mais sur le plan intérieur. On constate alors que le décret n° 62 -315 du 20 mars 1962 a préalablement exclu du scrutin sur le référendum du 8 avril 1962 les citoyens français les plus directement concernés par son objet, à savoir ceux, européens ou musulmans, qui habitaient les départements d'Algérie.

Le caractère conforme à la Constitution d'une telle disposition d'exception resterait à apprécier.

En revanche, son effet moral sur les Français d'Algérie fut, on l'imagine, sans ambiguïté. "Grande a été (leur) amertume de n'avoir en rien été associés à des négociations qui engageaient leur avenir et celui de leurs enfants. La roue de l'histoire est passée sur eux en les ignorant. Cent trente ans d'efforts, de souffrances, de sacrifices, de bonheur aussi, étaient effacés d'un coup ".

René Lenoir - mon algérie, tendre et violente, Plon. Cité dans "Algérie, mémoire déracinée", René Mayer, l'harmattan, ISBN 2-7384-8489-1

En ce qui concerne les signatures, depuis, le document original a été mis à la disposition des chercheurs, il est paraphé par les trois négociateurs français et le seul Krim Belkacem coté F.L.N., les deux autres négociateurs n'ayant pas paraphé ni signé.

 Le même jour le gouvernement français prend un décret instituant un tribunal de l'ordre public et quatre cours martiales. Ces cours, composées de trois militaires français, jugent les O.A.S. sans instruction, sans avocats et sans recours. Seules celles de Tlemcen et de Tizi Ouzou seront crées, elles auront très peu d'affaires.

Le même jour à Saint Denis du Sig, un groupe F.L.N. entre dans le village de façon officielle, les militaires français regardent, la population aussi. Le F.L.N. regroupe 16 hommes et une femme, quatre harkis démobilisés, la femme d'un autre harki qui avait fui, et douze employés d'une ferme qui, avec l'aide du propriétaire avaient toujours résisté au F.L.N.

En public, ils se mettent à torturer les 16 personnes, membres brisés, nez et lèvres coupées, éviscérés, à tel point que les habitants du village écoeurés exigèrent qu'il fut mis fin à leur supplice.

"J'ai vécu quelque chose de beaucoup plus dur qui a été, heu ... , le, heu ... dans la nuit du 19 au 20 mars [1962], ou quelque chose, heu ... heu ... d'avoisinant, enfin, je ne me trompe que d'un jour peut-être, j'ai vécu des ... des ... un drame assez affreux, quoi, on a trouvé le chef du village, dit "le village nègre", à Saint-Denis-du-Sig, c'est-à-dire le village musulman, 20000 personnes environ, heu ... égorgées, heu ... défigurées, mutilées, et, heu ... également ... une bonne douzaine de ... heu ... de musulmans dont plusieurs de mes moghaznis, dont celui qui me servait d'ordonnance, qui s'appelait Miloud.

Donc, j'ai ... j'ai ... je me trouvais donc alors à ce moment-là à Saint-Denis-du-Sig, j'ai été chargé de faire l'évacuation des familles musulmanes qui habitaient, heu ... le village nègre, heu... ça ne s'est pas fait facilement parce qu'il a fallu les embarquer dans les camions, et en fait tous ces gens-là, j'étais très embêté moi-même, parce que j'avais le sentiment de les compromettre gravement en les évacuant ...

FRANÇOISE GASPARD. - Ils étaient déjà compromis ... - Oui, mais je les compromettais davantage encore, puisque parce que par définition, heu... le village nègre était bouclé par un certain nombre d'unités, et moi j'allais évacuer; avant que la Légion vienne, heu ... heu ... faire le nettoyage, j'allais évacuer les familles qui étaient considérées comme étant heu ... les familles de moghaznis, de harkis, de gens qui... heu... qui avaient travaillé pour nous. Donc ce n'était pas très agréable, y compris pour tous ces gens qui ... heu ... qui avaient travaillé avec nous. Donc ce n'était pas agréable, y compris pour tous ces gens dont certains, après tout, pouvaient ne pas partager les opinions, heu ... de leur frère, de leur mari, de leur fils, etc.

F. G. - Car à partir du moment où il y avait un harki on emmenait la famille ...

- On emmenait la famille. C'était l'ordre que j'ai reçu. Il fallait les embarquer, y compris à coups de pied dans le derrière dans les camions de l'armée, et tout ça dans un village nègre qui était en principe tenu par un commando du F.L.N. "

Cet officier si prévenant, et si embarrassé aussi trente ans plus tard, s'appelait Jean-Pierre Chevènement, il intervenait le 4 Août 1989 sur France culture.

Lors de l'émission "Droits d'inventaire" de Marie DRUCKER du mercredi 3 décembre 2008 à 22h sur FR3, en pésence de Max GALLO et du journaliste de Libération Jean-Dominique MERCHET, Jean-Pierre CHEVENEMENT, officier SAS durant la guerre d'Algérie, a confirmé avoir été le témoin du massacre de ses propres moghzanis en Algérie le soir de la "paix" d'Evian du 19 mars 1962. Ce massacre avait fait la "une" du "Parisien Libéré" du 21 mars 1962. PHOTO Le 11 novembre 1997, Jeune Pied-Noir avait écrit à Jean-Pierre CHEVENEMENT, alors ministre de l'Intérieur, pour qu'il témoigne et ouvre les archives du crime d'état du 19 mars 1962. Une lettre restée sans réponse. A l'époque, le ministre avait préféré se taire. Jean-Pierre CHEVENEMENT a aussi été le témoin des enlèvements massifs d'européens du 5 juillet à Oran, où lui même faillit être enlevé ! (cf. son livre "Le courage de décider" - Robert Laffon - 2002) Pourquoi, Jean-Pierre CHEVENEMENT n'a-t-il pas porté secours à ses Moghaznis désarmés et abandonnés ? Pourquoi n'a-t-il pas alerté la presse et l'opinion publique des crimes dont il a été le témoin direct ? Pourquoi n'a-t-il pas ouvert les archives sur ce "crime d'état" ? Au nom de quels principes, au non de quelle morale a-t-il préféré se taire durant plus de vingt ans, jusqu'à son premier témoignage lors de l'émission de François Gaspard " 500.000 harkis à la recherche de leur histoire". voir ci-dessus .

 

 Les affiches préparés par le gouvernement français sont apposées dans la nuit par l'armée dans les plus petits villages (dont Saint Denis du Sig) où elles se trouvent parfois encore. On peut y lire : "pour vos enfants, paix en algérie".

 Le couvre feu est établi à 21 heures, il y avait plus de deux ans qu'il n'existait plus dans les grandes villes.

Salan parle dans une émission pirate il demande de harceler partout les ennemis.

Le bruit a couru hier dans l'Algérois, qu'une dizaine d'Européens avaient été tués à Nelsonbourg près de Médéa.

En réalité, renseignements pris dans la localité même, il s'agissait de rumeurs qui ont déformé un événement survenu dans cette région à savoir un sérieux engagement à Ben Chicao entre un commmando OAS et un groupe F.L.N., engagement qui a fait une dizaine de victimes - ( 5 morts du côté du F.L.N. dit-on a Médéa, 2 morts et 5 blessés du côté de l'O.A.S)

(la nouvelle république)

 Le F.L.N. poursuit son travail d'assassinat :

Un à Alger.

Une voiture est mitraillée à maison carré, trois morts (dont un bébé de quelques semaines) trois blessés.

Six morts en Oranie.

Le maire de Randon, conseiller général, et deux jeunes hommes sont égorgés à Bône.

Le journaliste "libéral" Hubert Poggi, assassiné rue de la lyre d'une balle dans le dos, est enterré discretement. Les tueurs du FLN ne demandent pas aux européens leurs opînions avant de leur tirer dessus.

L'armée arrête ses comptes au 19 mars, il y a eu depuis le premier Novembre 1954, 2788 tués, 7451 blessés et 375 disparus parmi la population européenne. Rien qu'à Oran en un jour, le 5 juillet 62, il y aura 3000 morts, on admire les effets fabuleux du cessez le feu.

 

20 Mars 1962 :

En algérie, 40 attentats FLN, 30 morts, 124 blessés.

Parmi eux, les forces de l'ordre tuent 4 manifestants FLN et en blessent 24 à Rouiba., en tuent 7 à Aïn Taya.

Pour pas faire de jaloux, les mêmes forces de l'ordre blessent 9 manifestants algérie française à Bône.

Les harkis de l'O.A.S. vengent leurs camarades tués à saint Denis du Sig, ils exterminent 32 F.L.N.

Dans le coin, le F.L.N. diffuse le tract suivant :

" Oh! France de malheur, tout est fini pour toi. Mais la France ne fait qu'agrandir son histoire, mais elle ne peut que diminuer instantanément ses forces. C'est une grande armée forte avec des armes automatiques et lourdes. Toutes ses armées sont celles des soldats femmes de la maigre France.

Plus vous grandissez les renforts, plus nous vous piétinons. Je fais appel à Guy Mollet qu'il faut trois cents hommes de France pour combattre un vrai fellagha âgé de 17 ans seulement.

Notre armée qui donne de puissants échecs aux armées de la blague de la faible petite France, écoutez population française, notre armée de la Libération nationale est composée de Marocains, Tunisiens et Algériens.

Rappelez-vous que, quand nous serons indépendants et dans un minimum de temps, nous combattrons les trois cents kilomètres que nos ancêtres ont envahi en France. Voici les limites, Poitiers, Saint-Étienne, Lyon, les environs des Alpes et les Pyrénées. Toutes ces terres et ces villes sont celles de nos ancêtres. Après la guerre d'Afrique du Nord, nous allons envahir les trois cents kilomètres qui nous appartiennent et les ports de Toulon, Marseille, Bordeaux.

Nous sommes les fils de Mohamed, fils de l'Islam.

Voici, l'amitié est finie entre la France et l'Afrique du Nord. Vous allez avoir le Diên-Biên-Phu, pas celui de notre amie l'Indochine, il est mille fois plus grand.

Adieu la France, c'est maintenant la dernière ordure du globe terrestre. L'Algérie est en lutte contre le colonialisme. Malheur à tous fils du diable.

Toi, Monsieur, tu es son moteur. Tu as facilité sa tâche. Tu es donc vomi par l'humanité, excommunié. Le peuple te condamne, parce que tu as agi contre ses intérêts. Traître à l'humanité, tu es vomi par l'humanité, tu es un collaborateur. Notre devoir est de t'abattre. Nous sommes fiers d'agir selon les consignes du Tribunal du Peuple qui est la volonté de Dieu. Indigne à la nation, on t'exécute. Une nation pure est une nation forte. C'est elle qui élimine les traîtres. "

LE FLOCH Michel, appelé au 60e R.I., capturé le 20-03-1962 à Oran, et libéré le 30-03-1962 par le F.L.N. à Alger.

François CASANEJA, 17 ans, tué au plateau saint michel d'Oran, lors d'un affrontement avec les gendarmes rouges.

De gaulle demande et obtient les pleins pouvoirs pour lutter contre l'O.A.S. Le référendum approuvant Evian est fixé au 8 avril.

Une circulaire indique aux forces de l'ordre en métropole que les accords d'évian sont valides aussi pour eux, et qu'il est interdit de mener aucune action offensive.

Le livre que Soustelle a écrit dans la clandestinité "l'espérance trahie" paraît, non aux éditions de la table ronde de Laudenbach (Gallimard, actionnaire à 50% l'a menacé de faillite s'il le publiait) mais aux " éditions de l'alma", une société crée par Laudenbach pour l'occasion. Il n'a pas été possible de l'interdire, Soustelle n'est inculpé de rien, c'est un français qui a choisi de vivre à l'étranger.

C'est un immense succès de librairie.

 En algérie les militaires reçoivent avec étonnement la circulaire qui leur donne les consignes précises : Citation.

Elles sont contenues dans un T.O. du 18 mars 1962. Le point essentiel en est que l'Armée française s'interdisait d'entrer dans les zones d'implantation du FLN. Mais, en fait, il convient d'indiquer que la capacité d'intervention de nos troupes était plus limitée encore. Elle se bornait aux cas de légitime défense, pour tout ce qui concernait l'atteinte aux biens publics et privés. Qu'on en juge: "Au cas où des éléments regroupés de l'ALN (ou du MNA) se livreraient à des opérations de pillage, saccage, destruction, harcèlement et embuscades sur nos forces et nos installations ou sur des biens publics et privés nos forces ne devront riposter que pour assurer leur propre défense et celle de nos installations tout autre action ne pourra être engagée que sur réquisition par l'autorité civile".

Il est clair que cette directive tend à limiter le rôle de l'Armée à un minimum. La conception du cessez-le-feu qui prévaut est celle-ci: les forces françaises doivent réduire leur activité pour que s'apaisent les tensions. C'est à l'autorité civile, qu'est remis le soin de décider et d'agir. Il y a là une double erreur d'appréciation: le pouvoir politique français ne s'attend qu'à des incidents limités, marginaux ; il n'envisage pas la violation massive, grave du cessez-le-feu qui va se produire. Il croit aussi que le Haut Commissaire et l'Exécutif Provisoire disposeront de la Gendarmerie et de la Force Locale, et pourront diriger le maintien de l'ordre. Or, la Force Locale restera inorganisée, la Gendarmerie restera orientée dans la lutte contre l'O.A.S. Ce sont donc les militaires qui vont rester dans les secteurs et les sous - secteurs, responsables de l'ordre pour l'essentiel. A Alger et à Oran, ils sont soumis au Préfet de Police, en théorie du moins, car la haute hiérarchie militaire, a tendance à se concerter plutôt avec le Haut Commissaire. Bref, une situation complexe apparaît. Les troupes restent chargées de la défense des biens et des personnes, selon la directive Ailleret du 9 septembre 1961, mais, la tendance est de ne pas se heurter au FLN sauf cas particuliers, sujets à interprétation et réclamant beaucoup de discernement. La prudence sera donc à l'ordre du jour.

Ces nouvelles directives, l'esprit qui préside à leur mise en oeuvre, et la difficile réalité sur le terrain vont aboutir à un décalage aigu entre ce qui est envisagé et le vécu des populations. L'effervescence dans le camp indépendantiste, le développement du gangstérisme vont bénéficier de la retenue des troupes françaises et de l'inexistence de l'Exécutif en matière d'ordre public. Une des conséquences du cessez-le-feu sera de laisser dans une position délicate les Européens dont les appartements, les fermes, les voitures sont occupés ou confisqués par centaines, bientôt par milliers. La vague d'occupation des logements de certains quartiers périphériques d'Alger est une conséquence directe de la situation créée par l'application des directives Debré. La conception du cessez-le-feu qui a prévalu est fondamentalement restrictive. Certes, elle limite de façon importante les possibilités de heurts entre les nationalistes et l'Armée mais uniquement, en invitant cette dernière à une attitude de non-intervention de principe. Rien de tout cela n'est à proprement parler nécessaire ou indispensable, surtout si l'on se souvient que les forces françaises ont vaincu le FLN sur le terrain. Ces directives reposent sur la conception, qui va se révéler parfaitement illusoire, que les nationalistes algériens sont un partenaire fiable, responsable, honnêtement désireux d'appliquer les Accords. Conséquence: les textes qui précisent la conception du cessez-le-feu et son orientation de base ouvrent un boulevard aux éléments contrôlés et incontrôlés du FLN.

Ces dispositions sur le cessez-le-feu rendent purement théoriques les "garanties" d'Evian, Les longues pages détaillées, fruit de longues négociations où elles sont inscrites, deviennent un simple catalogue de bonnes intentions sans aucune sanction, dès lors que, simultanément, les troupes reçoivent des instructions largement restrictives. En fait, la politique du gouvernement français souffre ici d'une contradiction fondamentale, Elle va contribuer à miner les Accords d'Evian et à les vider de sens.

(...) Soulignons toutefois que la défense des biens publics ou privés n'est pas oubliée dans les instructions précitées, l'Armée ne doit pas s'en charger, mais il appartient à la Gendarmerie française et à la Force Locale de le faire. Cette dernière n'existe, redisons le, que sur le papier; quant à la Gendarmerie elle est hors d'état d'assumer cette mission.

(...). On remarquera également que la directive du 18 mars ne fait pas mention des atteintes à la sécurité et à la vie des personnes. Cette omission est étonnante. En renvoyant pour l'exécution des clauses du cessez-le-feu "à la Commission Militaire Mixte et aux Commissions mixtes locales mises en place aux niveau des Corps d'Armée et des Zones", l'autorité française charge implicitement ces organismes du problème des personnes (donc des enlèvements). Encore, prescrit-elle, d'informer chaque fois le Haut Commissaire (Fouchet), qui est le seul habilité à donner une suite appropriée aux incidents qui se produisent, Nous verrons cependant que certaines unités de l'Armée interviendront tout de même, soit au titre du flagrant délit, soit pour empêcher des heurts entre les communautés, ce qui restait au nombre de leur missions permanentes.

Durant la période où elles exercèrent leurs activités, du 19 mars au 1er juillet, du cessez-le-feu au référendum, les commissions mixtes obtinrent parfois des libérations. Le chiffre peut toutefois paraître faible: 43 pour 320 rapts, 10 libérations étant directement obtenues par l'Armée française, ce qui prouve à quel point les interventions de cette dernière étaient limitées.

Il nous paraît important de souligner que le fait de recourir à ces commissions montre que le gouvernement français plaçait délibérément le problème des enlèvements dans le cadre des Accords d'Evian eux-mêmes.

Autrement dit, quelles que soient leur gravité ou leur fréquence, il ne voulait voir dans les actions du FLN que des accrocs réparables mais pas une remise en cause. Ceci explique qu'à partir de là, une conjoncture difficile se soit créée. Ces réunions de commissions mixtes étaient en effet loin d'être des parties de plaisir. Elles étaient le plus souvent des lieux d'affrontement aigu. A l'exception de la Kabylie, qui, une fois de plus, affichait sa singularité, les délégués du FLN ne jouaient pas le jeu, ou plutôt, ils jouaient le leur qui était d'étendre l'influence du Front sur la population et, de ne pas laisser de trous dans le filet qu'il s'efforçait de déployer sur l'Algérie. Chaque fois que le problème des enlèvements était abordé, les délégués nationalistes faisaient de l'obstruction et affirmaient ne rien savoir.

Au total, ces directives imposent à l'Armée française une réserve et une retenue considérables. En effet, chaque fois que le cessez-le-feu sera violé et il le sera à partir du 17 avril massivement, l'alternative est impossible à tenir .

Ou préserver les Accords et ne pas intervenir ou intervenir et les fragiliser. Compte tenu des choix effectués, compte tenu de la longue évolution qui a mené à Evian, compte tenu des concessions faites du côté français, il n'y a pas de retour en arrière possible. Renoncer à Evian et reprendre les opérations n'est pas pour le gouvernement d'alors une option envisageable. L'intérêt national, tel qu'il est conçu par le général de Gaulle,- ses adversaires diront la raison d'Etat - exige en priorité de se dégager d'Algérie. De ce point de vue, l'intérêt des Français sur place, la défense des biens et des personnes sont tenus pour moins importants.

Nous verrons cette situation se reproduire à plusieurs reprises dans les semaines et les mois qui suivront. Qu'il s'agisse des rapts, des spoliations, des harkis, des abus divers commis du côté algérien, la position française restera immuable: ne rien faire qui puisse ruiner les Accords d'Evian. En dépit des vicissitudes, ceux-ci doivent rester l'axe de la politique française et la Charte des rapports avec l'Algérie. Comme le dira le général De gaulle à Alain Peyrefitte au Conseil des Ministres du 4 mai 1962 : " L'intérêt de la France a cessé de se confondre avec celui des pieds-noirs. "

Monneret, " la phase finale de la guerre d'algérie ", l'harmattan, ISBN2-7475-0043-8

On a pu écrire, à la lecture de ces déclarations d'intention et des deux points concédés par le F.L.N. que le général De gaulle avait sacrifié l'interet des français (d'algérie, de toutes confessions) à celui de sa gloire, la bombe et les bases de Regane, et le pétrole.

 

Dès le 20 mars 1962, les ordres donnés par l'OAS à tous les commandants de zone et à leurs subordonnés sont clairs: "Un des buts essentiels de notre action dans l'immédiat est d'apporter le maximum d'entraves à l'installation et au fonctionnement des institutions illégales qui vont être mises en place."

"Toute forme d'obstruction et de sabotages dans tous les domaines" est laissée à leur "entière initiative" et cette activité est leur "mission n° 1". Faut-il interpréter ce document comme un blanc-seing laissé aux responsables locaux et à une amorce de soulèvement? La réponse est négative, car cette conclusion a été précédée d'ordres invitant à faire cesser "toutes grèves autres que celles de l'administration proprement dite", ce qui signifie la reprise du travail à la SNCFA et à l'EGA. La seule mesure ouvertement subversive est l'interdiction faite aux fonctionnaires de participer aux organismes prévus par les accords (exécutif provisoire, haut-commissariat). Assimilée à une "trahison", cette participation serait "punie comme telle".

Au coeur de l'OAS, Olivier Dard; ISBN 978-2-262-03499-3

 

21 Mars 1962 :

50 morts , blessés non comptés.

Parmi eux : à Oran fusillade entre les forces de l'ordre, qui ont localisé l'émetteur pirate de l'O.A.S. et les commandos O.A.S. qui le défendent : un mort O.A.S. et 16 blessés non moins O.A.S., les gendarmes avaient des blindés. Mais l'émetteur est parti en lieu sûr.

A Mostaganem, des F.L.N. pas au courant des accords d'évian attaquent des militaires qui ripostent, 9 morts.

Citation: Mais, que dire de celle qui se déroulera le 21 mars, après les accords d'Evian, à Djeniene Meskine, sur la route d'Oran à Sidi-Bel-Abbès? Je cite L'Echo d'Oran :

"Deux délégations sont descendues respectivement de la Cité et du douar. Tous les hommes du village, accompagnés de leurs femmes et de leurs enfants, suivaient les porteurs de drapeaux tricolores et scandaient " Algérie française " tous se dirigeant vers la mairie. En cours de route, des Européens du centre et des ouvriers, de la C.A.D.O., toute proche, se joignaient aux manifestants. Et ce fut bientôt un millier de personnes qui stationnaient devant la mairie. Puis, dans un silence impressionnant, devant toute cette foule figée au garde-à-vous, le grand drapeau tricolore était monté au haut du mât, hissé par deux employés municipaux, un Européen, et un Musulman... Puis une femme musulmane, prenant la parole, exhortait, en français et en arabe, tous ses concitoyens à la fraternisation. Pour finir, une vibrante Marseillaise réunissait, d'une même voix et d'un même coeur, les deux communautés, réunies comme autrefois.

On pouvait donc encore voir se rassembler Européens et Musulmans sous les plis de notre emblème, malgré le F .L.N . Malgré le F.L.N., car la veille, trois rebelles étaient venus commettre des actions terroristes. Surpris par un groupe de G.M.S. de Saint-Lucien, commandé par le capitaine Audon, deux rebelles étaient abattus et le lendemain la population criait sa volonté de rester française.

A Tébessa, le même jour, une manifestation analogue se déroulait.

D'après Jouhaud, Oh mon pays perdu.

 Dix plastics à paris entre autres françoise giroud, beuve merry, michel droit.

La Parisien, en gros titre de premiére page raconte le massacre des harkis du sous lieutenant Chevenement. Photo ICI

 

22 Mars 1962 :

Grève générale dans toute l'algérie, annoncée par les syndicats, pour lutter contre l'insécurité.

10 attentats à Alger, 5 morts, 10 blessés, il s'agit de dégager les européens des quartiers musulmans.

Plastics à la préfecture.

Mortier O.A.S. sur le palais d'été, sur la place du gouvernement (4 morts).

A Relizane, le F.L.N. liquide un bébé de quelques mois dans les bras de sa mère.

A Mostaganem, l'armée rencontre un groupe F.L.N., 9 morts, 2 blessés.

 L'incident fantôme du 22 mars à quoi fait allusion Vitalis Cros dans son interview. Citation: de Monneret

A la page 563 de "Les Feux du Désespoir", Y. Courrière écrit ceci: "Le 22 mars à 21h, 20 hommes des commandos Z attaquèrent une patrouille de half-tracks de la gendarmerie mobile qui sortait du tunnel des Facultés. Un tireur au bazooka, à plat ventre sur le trottoir, devant la vitrine du maroquinier Bissonet, au coin du boulevard Saint-Saens et de la rue Michelet, atteignit le premier blindé. Ce fut le signal de la fusillade. Au fusil-mitrailleur, à la mitraillette, à nouveau au bazooka les troupes de l'O.A.S., firent reculer la patrouille. Les half-tracks tentèrent de faire marche arrière et de ressortir du tunnel vers l'avenue Pasteur. Ils y parvenaient lorsqu'une pluie de grenades M.K.2 et M.26 lancées des jardins de la Faculté, au dessus du tunnel, pénétrèrent dans les caissons des véhicules. Des F.M. placés en embuscade rue Berthezène et avenue Pasteur achevèrent le travail. Seul le servant du bazooka fut atteint d'une rafale de mitrailleuse. Les autres s'enfuirent indemnes. Les gendarmes déploraient dix-huit morts et vingt-cinq blessés".

Ce bilan reste à prouver mais voilà une action d'éclat de l'O.A.S., survenue trois jours après le cessez-le-feu et propre à frapper l'opinion publique. Le slogan Alger=Budapest pouvait trouver là une certaine crédibilité. Les accords d'Evian récemment signés pouvaient bien, à la lumière de ce terrible "fait d'armes", paraître fragilisés. Le prestige de l'Armée Secrète et sa puissance, pouvaient impressionner. Ne frappait-elle pas où elle voulait, quand elle voulait ?

Or, chose curieuse, la presse de l'époque n'en porte aucune trace. Le Monde, Le Figaro, France-Soir n'y ont pas fait la moindre mention. Le général Chérasse qui commandait la Gendarmerie n'en a apparemment pas entendu parler non plus. Au procès du général Salan, il a été cité comme témoin et il a déposé. Dix-huit morts parmi les gendarmes, voilà une tragédie, qu'il aurait normalement dû connaître, et dont il aurait sans doute parlé pour accabler l'accusé. Et bien non! "il y a eu", dit-il, "4 attaques au mois de mars qui ont fait 24 victimes". On remarquera l'imprécision. Attaques sans date, 24 victimes et non pas 24 morts. Tout cela est vague.

Pourtant, il n'y a pas de doute, cette attaque a bien eu lieu. J-J Susini ainsi que I-M. Zagamé et I-M. Rouanet, anciens militants des commandos Z sont formels. Cette attaque est réelle. Elle s'est produite. Ils en ignorent par contre le bilan exact, le nombre de morts et le nombre de chars endommagés. Ils sont incapables en outre de préciser la date. Une chose est certaine, elle a eu lieu après le 7 février 1962, jour de la mort du capitaine Le Pivain. En effet, l'O.A.S. est alors persuadée que les gendarmes mobiles ont abattu délibérément cet officier. La décision a été prise dès lors de tirer sur eux. Nos trois interlocuteurs pensent en outre que ceci se plaçait après le cessez-1e-feu, au moment où l'organisation clandestine devait élever le niveau de ses actions et leur ampleur. (...)

Une question se pose relativement à cet incident du 22 mars. N'a-t-il pas effrayé le commandement ? L'ampleur des opérations des Forces Armées françaises menées ensuite à Bab-el-Oued, leur dureté, ainsi que la journée du 26 mars et ses conséquences, n'ont-elles pas été influencées par le redoutable engagement du Tunnel des Facultés ? Même si le bilan exact n'en est toujours pas connu.

(Monneret, " la phase finale de la guerre d'algérie " l'harmattan, ISBN 2 7475 0043 8

"A propos d'une référence à un attentat de L'OAS contre les gendarmes dans le tunnel des Facultés et qui aurait provoqué 18 tués parmi les forces de l'ordre, il convient de rétablir la vérité sur ce point précis. J'ai été personnellement témoin de la préparation de cet attentat et de son exécution, tout en bas de la rue de Mulhouse, à la jonction de cette rue avec la rue Michelet.

Cet attentat n'a provoqué aucune victime chez les gendarmes mobiles, un blessé par un éclat de grenade peut-être. Mais il est important pour les forces de l'ordre d'entretenir ce mythe de 18 tués parmi les forces de l'ordre. Pourquoi ? Parce que cela justifie la riposte scandaleuse à laquelle se sont livrés les gendarmes : ils ont tiré à la mitrailleuse et au FM sur toutes les habitations de la rue Michelet et du Boulevard Saint Saëns, prenant le risque d'un massacre de population civile complètement étrangère à l'attentat dont ils avaient été victimes. Cela faisait partie de la technique du BOUCLIER HUMAIN utilisé par les gendarmes mobiles lors de leurs opérations dans le grand Alger. Si nous avions été capables à la fin du printemps 1962, de tuer 18 gendarmes à Alger, il est probable que nous serions peut-être encore en Algérie.

J.C. PEREZ , par mèle."

En fait il est vraisemblable que si cette action fut spectaculaire, elle ne fut pas aussi meurtrière que le raconte Vitalis Cros (préfet d'Alger, responsable avec Ailleret de la boucherie de la rue d'isly) qui cherche ainsi à s'excuser (il n'aurait ainsi fait que pratiquer des représailles sur les civils, procédure normale). Yves Courriére se contentant comme à l'accoutumée de diffuser l'information officielle.

 Deux décrets amnistient respectivement les actes commis au titre de l'insurrection Algérienne (le FLN, le MNA, le parti communiste et leurs amis) et les actes commis au nom du maintien de l'ordre contre l'insurrection algérienne (Aussaresse, Massu, Vitalis Cros, De gaulle et autres). Valables sur le territoire de l'Algérie.

Le 14 Avril deux autres décrets identiques porteront sur les actes commis en métropole (les familles des victimes des erreurs du FLN apprécièrent).

 

23 Mars 1962 :

23 attentats, 15 morts, 42 blessés. (manquent bien sûr les chiffres censurés).

Nombreux hold up (le plus rentable, celui de la banque de france à Oran, deux milliards d'anciens francs). Il y avait beaucoup plus d'argent, mais le commando manquait de sacs.

Les vols commerciaux entre l'algérie et la France sont interrompus.

Des C.R.S. arrivent en renfort, afin de remplacer les compagnies recrutées en Algérie et qui ne sont pas "sures".

Le président de la chambre de commerce de Kabylie enlevé à Abbo.

Les habitants de Djenane-Mesguine, pour l'essentiel musulmans défilent aux cris de Algérie française et hissent les couleurs devant la mairie.

Citation: Le vendredi 23 dès l'aube, des équipes de l'O.A.S. armées et porteuses de brassards édifient des barrages à l'entrée de Bab-el-Oued. Les soldats français qui tentent de patrouiller sont désarmés. Il n'y a pas de fraternisation avec les commandos, mais les éléments militaires du secteur paraissent vouloir jouer la neutralité. l'Armée Secrète peut penser que son plan de créer à Bab El oued une algérie française libre est en train de se réaliser .

Hélas ! A dix heures, le premier rouage d'un engrenage tragique se met en place. A cette heure-là, Place Desaix, un camion militaire arrive et dérape sur la chaussée rendue glissante par des jets d'huile. Les ordres donnés sont clairs: ne pas tirer sur les militaires français, mais les désarmer.

Malheureusement, ceux-là, des appelés du train, ne veulent pas donner leurs armes. Parmi eux, un soldat musulman prend peur. (Dans ce quartier où les attentats systématiques ont fait fuir tous les autochtones, la panique le saisit.)

Selon Montagnon, il tire sur les commandos Alpha, tuant un homme, selon Courrière il n'a fait qu'armer sa MAT, mais la réaction des hommes de l'O.A.S. est immédiate. Ils ouvrent le feu; sept deuxième classe sont tués, onze sont blessés. Le 23 mars est pour les partisans de l'Algérie Française une journée fatale: entre eux et l'Armée désormais il y a du sang-

A partir de ce moment, le pouvoir allait immédiatement engager une offensive militaire sans précédent dans les rues d'Alger. La riposte à la tentative d'insurrection fut directement conduite par le commandant en chef, le général Ailleret assisté du général Capodanno. Tous deux s'étaient installés à la caserne Péllissier, située en face du Lycée Bugeaud, et à l'entrée même du faubourg de Bab-el-Oued. Gendarmes et CRS intervinrent les premiers. Ils furent reçus, comme il fallait s'y attendre par des tirs. La troupe se joignit au mouvement. Les blindés les précédaient tirant sur les façades. Les commandos Alpha et Delta résistèrent depuis les terrasses. A 17 heures, l'Armée de l'Air intervint avec des T6 et mitrailla les immeubles. Les commandos organisèrent leur repli.

Selon Courrière (page 567), une faille apparut dans le dispositif militaire: Bab-el-Oued était rigoureusement encerclé, mais à Saint-Eugène un officier favorable à l'O.A.S., laissa les commandos s'enfuir en retardant la mise en place de son dispositif. Nous savons aussi que certains militants clandestins s'enfuirent en recourant à des ruses diverses. L'un deux put regagner le centre d'Alger déguisé en malade dans une ambulance.

Bab-el-Oued fut soumis au couvre-feu permanent avec une heure seulement par jour pour faire les courses. L'interdiction de sortir et d'entrer fut appliquée rigoureusement tandis que le quartier était passé "au peigne fin". 3.309 hommes furent placés en "centre de transit", 7.418 appartements visités (Vitalis Cros, page 154). Pendant quatre journées consécutives, le faubourg subit un véritable blocus, tandis que les immeubles connaissaient perquisitions et saccages. A en croire ce qui se disait parmi les Français d'Algérie, il y avait eu plus de 20 morts et de nombreux blessés civils; parmi les tués une fillette de 10 ans dont le nom fut souvent cité à Alger à l'époque: Ghislaine-Louise Grès.

La population était traumatisée. Quelque chose s'était à jamais brisé. L'OAS avait perdu son prestige. L'impensable devenait réalité: il faudrait partir et en attendant survivre sans espoir de vaincre.

Toujours Monneret " la phase finale de la guerre d'algérie " l'harmattan, ISBN 2 7475 0043 8

 Les membres des commandos delta expliquent que pour la plupart ils sont partis par les égouts.

Alfred LEFÈBRE. "Le Sergent-chef Alfred Lefèbre, originaire de Chatou, fut un militant OAS, bien protégé par son appartenance au 9ème Zouaves. Il transportait les armes et les explosifs. Il trouva la mort dans la bataille de Bab El Oued, à la sortie de la rue Léon Roche, le 23 mars 1962, tué par les forces d'abandon gaullistes". Nous ne l'oublierons pas.

Jean Ghenassia

Lucien PALANGIAN. Né le 16 novembre 1942, a été assassiné par les forces gaullistes d' abandon qui investirent le quartier martyr d'Alger : Bab El 0ued le 23 mars l962-Bab El Oued s'était levé contre le crime signé De gaulle Charles : les Accords d'Evian du 19 mars. Lucien fut tué les armes à la Imain en défendant sa terre, sur la terrasse de l'immeuble situé à 'l'angle de la rue de l'Alma et de la rue Cardinal Verdier. Son père tenait le commerce de grains en bas de cet immeuble qui touche le marché principal de Bab El Oued.

Marc Minutelo, Bernabé et Jean-Claude Palangian

Les chiffres officiels sont de 35 morts, 151 blessés.

Un tel traitement, nulle part en Algérie n'a été imposé à un quartier musulman (nulle part en algérie le F.L.N. n'avait obtenu une telle unanimité dans la population.)

La réaction d'Ailleret est absolument conforme aux ordres reçus, en particulier les 20 et 21 décembre 61, après le comité des affaires algériennes du 20 et les 8 et 27 février, décisions du même comité.

 Plastics à Bordeaux et à Perpignan.

D'après Michel Debré (entretiens avec le général) ce jour de Gaulle lui promet: "Il n'y aura pas d'aide de la France si l'état algérien ne répond pas à certains critères, et parmi ces critères il y a ce qui touche à la liberté des français, à la liberté des musulmans fidèles (...)L'armée française doit être présente pour garantir ces règles".

 

24 Mars 1962 :

18 attentats, 17 morts, 20 blessés. (sans compter ce qui se passe dans le bled abandonné, et ce que Katz censure).

Parmi eux, Georges Godard, fils d'un medecin et d'une sage femme d'Alger, abattu par les gardes mobiles, à la 12/7 à bout portant. Il n'avait pas obtemperé lors d'un barrage routier.

Poursuite de la répression à Bab El Oued, en particulier tous les jeunes entre 18 et 21 ans sont raflés et déportés en métropole. (mesure générale à toute l'algérie, connue sous le nom de plan Simoun).

Dans le bled, à Bou Alam, près de geryville le F.L.N. fait lire par le maire sa première instruction officielle : "tous ceux qui porteront encore l'uniforme colonialiste après le 1 Avril seront exécutés . Par ailleurs les harkis et anciens harkis devront quitter le village de regroupement près de la SAS et regagner leur ancien douar."

La plupart souhaitent s'engager dans l'armée française, mais l'armée ne prend que les célibataires, ils sont presque tous mariés. Le douar regroupement de Yalou se pavoise aux couleurs française, drapeaux de fabrication locale.

Le commandant Guillaume, adjoint de Jouhaud pour le bled Oranais est arrêté "par hasard" à un barrage routier. En fait il a très certainement été livré par l'un ou l'autre des officiers qui lui avaient promis de démarrer ce jour l'insurrection, et qui n'ont pas bougé.

Fouchet, responsable suprême en algérie, distribue le tract suivant :

 FRANÇAIS D'ALGERIE

SI APRÈS UN DÊLAI DE RÊFLEXION DE 3 ANS VOUS NE CHOISISSEZ PAS LA NATIONALITÊ ALGÊRIENNE VOUS BENEFICIEREZ D'UN STATUT PARTICULIER

VOUS POURREZ A TOUT MOMENT ENTRER ET SORTIR D'ALGERIE LIBREMENT-

DANS LA VIE PUBLIQUE :

VOUS JOUIREZ DES DROITS CIVILS ET DES LIBERTÉS ESSENTIELLES.

VOUS POURREZ UTILISER PARTOUT LA LANGUE FRANçAISE.

VOUS POURREZ CHOISIR L'ECOLE DE VOS ENFANTS

 

.DANS LA VIE ECONOMIQUE ET SOCIALE :

VOUS POURREZ ACHETER, GÉRER ET CÉDER LIBREMENT TOUS LES BIENS,

VOS BIENS FONCIERS NE POURRONT ÊTRE EXPROPRIÉS QU'APRÈS UNE INDEMNISATION PRÉALABLE GARANTIE PAR L'AIDE DE LA FRANCE,

SI VOUS DESIREZ RENTRER EN FRANCE VOUS POURREZ Y EMPORTER VOS BIENS, MEUBLES ET CAPITAUX.

TOUT EN CONSERVANT LA NATIONALITE FRANÇAISE VOUS AUREZ LA GARANTIE D'UN TRAITEMENT PREVILEGIE.

 Pas un mot de vrai (pour sa défense Fouchet fait remarquer que tout ça c'est bon APRES les trois premières années, et qu'il n'a rien promis en attendant).

Dans les procès qu'intentent des rapatriés, en particulier pour se faire indemniser, ce tract qui promet une indemnisation par la France est considéré comme n'engageant pas l'état français.

Emeutes F.L.N. (pillages de magasins et vols de véhicules européens- surtout les Peugeot) à Guyotville, Sidi-bel-Abbés, Kouba, Orleansville.

Le sac de Bab-el-oued vu par un témoin; ICI photos

Un commando de l'O.A.S. arrêta le véhicule et demanda aux soldats de lui remettre leurs armes. Soudain, parmi eux, un appelé musulman fit claquer sa culasse en armant son pistolet mitrailleur, et ce fût le drame.

La fusillade éclata et, encore une fois, dans cette guerre d'Algérie des militaires et des civils s'affrontèrent directement. L'irréparable, en ce triste jour, fut commis, annihilant, par-là même, selon le souhait et les directives du Chef de l'Etat, tout espoir de voir l'Armée se soulever de nouveau...

Aussitôt, et durant toute la journée, les forces militaires et de police affluèrent. Des milliers de soldats, gendarmes et C.R.S. encerclèrent le quartier. Des barrages de fil de fer barbelé furent dressés. Bab-el-oued devint isolée du reste du monde...

La Délégation Générale ne cachait pas sa satisfaction. Le quartier serait privé de renforts et de ravitaillement. Enfin le règlement de compte allait avoir lieu! Bab-el-oued, symbole de la résistance en Algérie allait finalement recevoir le châtiment qu'elle méritait depuis longtemps déjà !...

Très vite, cependant, les visages des responsables allaient changer d'expression. Loin d'être impressionnés par ce gigantesque déploiement de force, les commandos de l'O.A.S. réagirent énergiquement. Ils se savaient pris au piège et leur résistance allait être farouche...

Ils formaient un noyau rebelle de cent cinquante hommes munis d'un armement hétéroclite mais connaissant admirablement chaque pouce de terrain et sachant pouvoir compter sur l'aide de l'habitant, face à vingt mille hommes décidés à les anéantir. Mais ils firent mieux que se défendre, à tel point que, prenant l'initiative des opérations, ils contraignirent, en plusieurs points, les forces de l'ordre à reculer sous leurs coups de boutoir.

Ailleret- qui depuis juillet 1961 avait été nommé en remplacement de Gambiez - fulminait. Pour l'encourager dans sa mission d'éradication, le locataire de l'Elysée ne lui avait-il pas offert une quatrième étoile ? Son prestige était en jeu ainsi que celui de tous ses acolytes: Fouchet, Haut Commissaire en Algérie, Debrosse, commandant la Gendarmerie Mobile, Morin Délégué Général, Vitalis Cros, Préfet d'Alger et tout ce beau monde, réfugié sous haute protection au Rocher Noir, décida alors de faire appel aux blindés et à l'aviation. Cette fois, c'était l'engagement total...

Ba-el-Oued, citadelle du "pataouète", quartier de la joie méditerranéenne et de la douceur de vivre, allait subir un terrible châtiment par le fer et le feu. Les premiers chars se présentèrent, tirèrent sans discontinuer sur les façades tandis que deux hélicoptères et quatre chasseurs T6 menèrent une vie d'enfer aux tireurs retranchés sur les toits. La puissance de feu était telle que les quelques officiers aguerris, qui se trouvaient là, se croyaient revenus à la seconde guerre mondiale. Les habitants se jetaient sous les lits alors que leurs vitres volaient en éclats et que les balles de mitrailleuses 12/7 et les obus occasionnaient dans les murs des trous énormes.

De toutes parts, les blindés affluaient, vomissant leurs nappes de feu et d'acier. Ils écrasaient les voitures en stationnement, montaient sur les trottoirs et éventraient les devantures des magasins.

Derrière: eux, suivaient les forces de l'ordre qui, aussitôt, investissaient maison après maison, se livrant à de sauvages perquisitions au cours desquelles ils n'hésitaient pas à molester les habitants: meubles brisés, matelas éventrés et arrestation systématique de tous les hommes en âge de porter une arme, y compris et livrés à leur seule estimation, des vieillards, de jeunes adolescents imberbes dont certains n'avaient pas 13 ans! Des milliers d'Européens totalement innocents étaient ainsi, sous les insultes et les quolibets, regroupés dans les quartiers musulmans ou dans des camps où bon nombre furent "oubliés" par la France !

Pour compléter l'isolement du quartier: on coupa les huit mille lignes téléphoniques qui reliaient encore les assiégés au reste du monde ainsi que le courant électrique, Les habitants furent prives d'assistance médicale, de ravitaillement et même des services de pompes funèbres pour les décès. Le couvre-feu fut établi sur-le-champ et les forces de l'ordre reçurent l'ordre de tirer, à vue et sans sommation "sur tout ce qui bougeait".

A 20 heures, il ne restait plus que vingt hommes qui menaient un héroïque combat d'arrière-garde pour permettre à leurs camarades rescapés de prendre la fuite par les égouts. A 21 heures, des ambulances quittèrent cet infernal ghetto avec, à leur bord, les derniers résistants. La bataille était finie.

Comme la Légion à Camerone, l'O.A.S. venait d'écrire là sa plus belle page d'Histoire.

Dans les appartements dévastés, on pleurait les morts et on s'efforçait de soigner les blessés. Qui ne saura jamais le nombre des victimes? Un goût âcre persistait au fond des gorges, l'odeur de la poudre et du sang stagnait dans les ruelles, des débris de toutes sortes donnaient aux ombres habituelles de la rue des contours mystérieux, c'était un monde inconnu et blessé qui s'étendait sur chacun.

Mais, pour autant, le calvaire des habitants européens n'était pas fini et la fouille systématique se poursuivait avec une hargne et une haine inqualifiable. Dans les appartements, après le passage des "forces de l'ordre ", il ne restait plus rien d'utilisable: à la place des écrans de téléviseurs apparaissait un grand trou noir comme une image fixe de la mort; les divans, les fauteuils et les matelas étaient crevés comme des sacs de son; les meubles n'avaient plus de portes, plus de tiroirs; les tableaux, les gravures et les photographies familiales avaient été arrachées des murs et piétinées; les bibelots brisés s'entassaient; le linge traînait de-ci, de-là; les réfrigérateurs, les garde-manger étaient cassés et renversés; toutes les provisions alimentaires étaient détruites. Les familles étaient abattues et muettes. Hébétées, elles regardaient leurs pauvres "richesses" réduites à l'état de détritus et en poussière. Souvent, il s'agissait du sacrifice de toute une vie.

Cependant, en métropole, on ignorait ce qu'était réellement Bab-el-oued. On ignorait qu'il s'agissait du quartier pauvre de la ville et que ses habitants étaient tous des ouvriers et, de surcroît, les plus pauvres de la terre algérienne. On ignorait que quatre vingt dix pour cent d'entre eux étaient communistes, inscrits au parti et que, écoeurés par l'attitude du P.C.F. ils avaient tous déchiré leur carte! Pourtant, ce sont eux qui fournirent la majeure partie des commandos DELTA de l'O.A.S. et c'est parmi eux que se trouvèrent les plus courageux et les plus tenaces. Pouvait-on, sans faire sourire, les qualifier de nantis ou de fascistes ?..

Pendant quatre jours, Bab-el-oued allait vivre un véritable cauchemar. Pendant quatre jours, ce quartier sera isolé du reste du monde, sans soins et sans ravitaillement.

Devant tant de misère, la foule algéroise se pressa devant les fils de fer barbelés qui ceinturaient cette proche banlieue, et implora le service d'ordre de mettre fin au blocus. Devant le refus systématique des autorités qui tenaient a aller jusqu'au bout de leur vengeance la solidarité Pied Noir allait prendre un aspect bien méridional, On collecta des vivres pour les assiégés et on les hissa à l'aide de couffins tirés par des cordes, quelques fois jusqu'aux étages des immeubles les plus proches. Mais bien vite la Préfecture de police interdit les collectes et maintint le couvre-feu intégral, tandis que Christian Fouchet, la voix hautaine, savourant son autosatisfaction adjurait sur les ondes de la télévision, les Français d'Algérie "de faire confiance à la France et de ne pas suivre les assassins de l'O.A,S," !

Le lundi 26 mars 1962, Bab-el-oued avait pris le tragique visage de Budapest. Le blocus était maintenu, les malades et les blessés se mourraient sans soins la faim tenaillait les ventres, les perquisitions et les arrestations se poursuivaient et lorsqu'un blessé, un moribond ou un mort était découvert, on le traînait par les pieds jusqu'aux camions militaires et là, on le "balançait" par-dessus bord!

Tout autour du réduit, la population algéroise était toujours amassée, tentant l'ultime offensive du coeur: : "Nous voulons rester Français ... Vous n'avez pas le droit de nous combattre et de nous livrer ensuite à l'ennemi ... Notre crime le plus grave, c'est de trop aimer notre pays la France ..."

Alors des tracts circulèrent, conviant la population du Grand Alger à se rendre en masse, drapeaux français en tête et sans armes dès quinze heures devant le ghetto de Bab-el-oued dans le but d'Infléchir le traitement injuste et inhumain infligé aux cinquante mille habitants de ce quartier martyr. Le drame suivant couvait.

José Castano, dans un journal pied noir.

Un des responsables de l'aviation en algérie affirme que les T6 n'ont pas mitraillé les terrasses et que leurs passages étaient de simple intimidation.

Monsieur Micucci dans l'Algérianiste de Decembre 2005 raconte avoir été témoin de lacher de grenades sur les terrases par un helicoptére alouette. "Une mitrailleuse 12,7 lui repondit et c'est alors qu'intervinrent les T6, à la mitrailleuse et à la roquette, qui tuérent les servants. Ils continuèrent à arroser les terrasses alentour, touchant les appartements situés en dessous."

Parmi les morts, CERALTA Anré, 18 ans, tué depuis les terrasses de l'avenue de la Bouzaréah par un tir de gardes rouges.

Le bilan officiel est de 20 morts et 80 blessés, mais certains habitants n'ont pas déclaré leurs morts.

 

 Plastics à Riom, Montpellier, Nice, Bordeaux, Clermont-Ferrand.

58 étudiants du lycée Stanislas (surtout ceux qui préparent saint cyr) refusent de s'associer à une minute de silence en l'honneur des algériens des centres sociaux victimes de l'O.A.S.

Ils sont immédiatement exclus du lycée et devront rechercher une autre vocation que l'armée.

A Jérusalem un représentant du Conseil National de la Résistance (le secrétaire de Soustelle) arrivé la veille, rencontre Menahem Béguin et lui remet un pli de Soustelle, demandant de l'aide. Il rencontre aussi Shimon Peres, ministre de la guerre qui lui fait un accueil plutôt froid. La réponse, le soir, est négative, Israël ne peut pas aider l'O.A.S., même pour sauver des vies juives en Algérie. Quelques jours après la visite le gouvernement israélien informera le gouvernement français de cette démarche. Entre temps, sous suggestion anonyme, Roger rencontre une association d'anciens de l'irgoun, camouflage barbouzarde, qui lui propose armes et mercenaires, mais payant. Et cher. L'O.A.S. n'a pas les moyens, la mission est un échec.

 

25 Mars 1962 :

Poursuite de la répression à Bab El Oued.

Plastics à Bône, Alger, Oran, Philippeville, Blida, Sidi bel Abbés.

Arrestation de Jouhaud, il la raconte ainsi dans " oh mon pays perdu ", fayard, ISBN 35-05-5094-01

Le dimanche 25 mars, j'avais rendez-vous avec Camelin et Pancho chez Claude Raymond qui nous recevait à déjeuner au Panoramic. Nous avions à prendre les dispositions que la situation à Oran exigeait. Je désirais aussi m'entretenir avec eux d'une demande d'armement formulée par Marc Payras qui m'avait envoyé en liaison le fils de l'amiral Jourdain, un jeune colon de Mostaganem. J'avais prié ce dernier de nous rejoindre après le repas.

A peine était-il arrivé que le bruit d'un hélicoptère nous fit aller à la fenêtre de la cuisine, pour déterminer le quartier survolé. Notre stupéfaction fut grande de distinguer sur les terrasses des immeubles avoisinants des soldats casqués, en armes, surveillant le nôtre avec des jumelles. Nous précipitant sur le balcon donnant sur le boulevard du Front -de- Mer, nous apercevions un dispositif imposant de gendarmes mobiles, C.R.S., troupes, automitrailleuses; des hommes du service d'ordre commençaient à envahir l'immeuble.

Que se passait-il? Une inspection d'appartement comme à l'ordinaire, mais inhabituelle un dimanche et surtout l'après-midi. Il devait être 14 heures et la plupart des locataires étaient absents, partis faire prendre l'air aux enfants. Les portes de ces appartements, démolies à coups de pic, volèrent en morceaux, ce qui permit avec élégance de visiter tout l'immeuble. Une équipe de C.R.S. pénètre chez Claude Raymond. Mains en l'air, vérification d'identité, tout se passait comme à l'accoutumée sans que Camelin ni moi-même ne paraissions les intriguer. La fouille de l'appartement, minutieuse, commence. Que recherchait-on? Je saurai par la suite que la police voulait mettre la main sur un poste émetteur que la gonio avait situé aux environs du Panoramic. Les C.R.S., dont l'attention était aussi attirée par l'argent, furent étonnés de trouver, dans un sac à main (et même dans une tirelire) une somme légèrement supérieure à un million ancien. Claude Raymond venait la veille de retirer à la Banque son solde et, d'autre part, collectionnait des billets français. Bien que la situation de sa famille lui permît de disposer de cet argent, tout devint suspect aux yeux des C.R.S. quand ils trouvèrent dans un tiroir notre édition spéciale O.A.S. de L'Echo d'Oran et, surtout, dans le portefeuille de Jourdain, un permis de conduire vierge.

Revenant vers Camelin et moi, un gradé commença à nous interroger moins sommairement. Tout le surprenait. J'avais un agenda de poche, il le regardait avec curiosité, comme s'il n'en avait jamais vu de sa vie. J'avais au surplus sur moi 120000 anciens francs, ce qui l'étonna, car il trouvait la somme exorbitante et, qui plus est, cinq ou six billets de cinq cents anciens francs neufs. Je lui expliquai, ce qui était exact, que je venais de faire la monnaie.

Son esprit s'orientait, avec un rare flair de policier, sur l'expropriation de deux milliards de la Banque d'Algérie, la veille. Les minutes passaient et la perquisition se poursuivait à tous les étages. Vers 18 heures, notre gradé nous annonça que nous devions nous considérer en état d'arrestation provisoire. Il était inutile de protester.

De notre 15éme étage, nous voici descendant au rez-de-chaussée.

" Que faisons-nous, demande un C.R.S., s'ils font un geste pour fuir?

- Il faut tirer, répond le gradé.

Cette descente, avec une vingtaine de C.R.S., mitraillette au poing, prêts à tirer, était poignante. La quasi- totalité des portes étaient abattues, les appartements saccagés et j'imaginais la stupeur de leurs propriétaires à leur retour. Mais il en était ainsi. Les ordres étaient de n'avoir aucun ménagement à l'égard des "Pieds-Noirs " .

L'attente au rez-de-chaussée dura une heure, car pour traverser Oran il fallait reformer le dispositif, encadrer les C.R.S. et les gendarmes mobiles avec des auto- mitrailleuses. Chaque incursion dans la ville donnait lieu à une opération de guerre et rien n'était laissé au hasard.

Nous étions là une dizaine de locataires dont la tête n'avait pas l'air de plaire aux C.R.S. et qui allaient connaître les joies de l'interrogatoire à la police judiciaire. Du boulevard du Front -de- Mer, dans le panier à salade, nous partons en convoi, remontant les boulevards Sébastopol et Paul Doumer.

Je crus, un instant, comme cela s'était souvent produit que nous allions être jetés en pâture dans la ville indigène. Bien de Français avaient été torturés ou avaient disparu "libérés" aux mains des rebelles! Non, nous semblions être dirigés hors de la ville et je saurai, par la suite, qu'au P .C. de Katz, un officier de gendarmerie avait suggéré de nous transférer vers un nouveau camp d'internement en cours d'installation, pour le "meubler" le nombre de locataires étant insuffisant. Mais dès la sortie d'Oran, attaqués par un commando de l'O.A.S., les gendarmes faisaient demi-tour .Arrêt pour reprendre les esprits au Parc à fourrage, et à notre grand étonnement, nous revenons vers le centre de la ville, très faiblement escortés. Nous étions bien des suspects ordinaires. Nous nous arrêtons plusieurs fois et, en particulier, face à la mairie où nous restons dix bonnes minutes à contempler les deux lions en bronze, mais surtout à attendre le miracle d'une équipe résolue nous sortant de ce guêpier, ce qui aurait été un jeu d'enfant, étant donné la faiblesse de l'encadrement policier.

Nous avions l'Impression que l'on ne savait pas où nous conduire.

C'est finalement à la P.J., la police judiciaire, que nous échouâmes, dans une maison assez sordide, où s'étaient réfugiés les services qui ne s'estimaient pas assez en sécurité à l'ancienne préfecture, place Kléber, pourtant transformée en bunker. Elle était située à une cinquantaine de mètres de Château-Neuf, abri du général commandant le corps d'armée.

Chacun de nous passa au greffe pour décliner son identité et confier ses papiers, sa montre, son portefeuille. Je compris, à ce moment-là, combien il nous serait difficile de ne pas commettre d'impairs dans notre identité clandestine. Comme le greffier me demandait décharge de mes objets personnels, je commençai à signer avec mon habituel paraphe E. Jouhaud. Je rattrapais la signature en L. Jerbert faisant une tache de surcroît, ce dont je m'excusais et tout sembla rentrer dans l'ordre. J'avais eu chaud en pensant à mon étourderie.

Nous restâmes fort heureusement un bon moment seuls avec le commandant Camelin, ce qui nous permit d'enregistrer nos noms de combat respectifs et de mettre au point notre emploi du temps de la journée.

Je fus interrogé par un inspecteur très courtois, qui dès l'abord me précisa "qu'à Oran, il n'y avait pas de barbouzes et, qu'en conséquence, tout le monde était correc" . Mes déclarations furent enregistrées. Elles paraissaient très normales et correspondre à la vie bien régulière de l'inspecteur de l'enseignement technique que j'étais. Du reste, à la fin de mon interrogatoire, l'inspecteur de la P.J. me demanda: "Mais, monsieur Jerbert, pourquoi vous a-t-on arrêté? - C'est une question que je désirais vous poser, répondis-je. - "Je me le demande, c'est une erreur regrettable dont je m'excuse. Mais je vous prie de ne pas nous en tenir rigueur. Ces CR.S. soupçonnent tout le monde. Je vais, du reste, vous faire rendre vos objets personnels et vous serez relâché dès demain. Ce soir c'est impossible, à cause du couvre-feu." Effectivement, quelques instants après, un fonctionnaire me rendait mes affaires en me regardant toutefois avec attention, ce qui, sur l'instant, ne me parut pas suspect.

Je rejoignais mes camarades d'infortune avec lesquels je partageais le classique repas que l'on nous avait servi, sandwiches et vin rouge, menu figurant dans la littérature policière. Nous prenions le café lorsque je fus appelé au premier étage où je fus mis en présence de deux chefs de la P.J. L'un d'eux rentrait en France et l'autre le remplaçait, la garde montante et la garde descendante.

Dès l'abord, je compris que leurs questions étaient plus précises et plus incisives que dans l'interrogatoire précédent. L'un d'eux, en particulier, regardait avec attention une photographie qu'il me permettait de voir: c'était la mienne. Vous ressemblez beaucoup, monsieur Jerbert, à un homme qui nous intéresse tout particulièrement. Et toute une série de questions suivirent sur mon activité, le nom des autorités du Rectorat, des directeurs et maîtres de l'enseignement technique, sur les contradictions légères, mais contradictions, entre mes déclarations et celles du commandant Camelin.

"Pourquoi insister, mon général, finit par me dire le chef de la P .J., regardez plutôt votre photographie. Si le bas de votre visage est parfaitement camouflé, le haut, malgré vos lunettes, vous trahit. Et curieusement un grain de beauté correspond fâcheusement au signalement du général Jouhaud. Nous allons vous faire identifier par des officiers qui vous connaissent, et au surplus, nous allons immédiatement vérifier vos empreintes digitales. Je ne pouvais continuer à nier. "

D'après Jouhaud, Oh mon pays perdu.

Avec le temps, il semble que la police était renseignée sur la présence de Jouhaud dans cet immeuble, par un de ses innombrables contacts, un officier d'aviation qui avait servi sous ses ordres.

L'opération avait été montée avec soins, l'officier informateur de l'OAS qui indiquait les actions prévues par les forces de l'ordre, identifié par elles, n'avait été mis au courant que de l'opération de couverture, la recherche d'un des postes pirate de l'OAS. Le parcours apparemment erratique des C.R.S. avec leurs prisonniers n'avait pour but que de déjouer une éventuelle attaque de commando et le point finalement atteint est celui où réside la mission C, celle qui a pour rôle d'arrêter les chefs, et qui normalement ne s'occupe certes pas des gens arrêtés au hasard.

De plus la concomitance avec le sac de Bab el Oued, l'arrestation de Guillaume, la fusillade de la rue d'Isly, l'échec du maquis de l'Ouarsenis, tout tend à prouver qu'il s'agit d'un plan d'éradication de l'O.A.S. déclenché après la signature de la déclaration d'intention d'évian.

A Alger Christian Fouchert annonce la fusillade du lendemain, à la télé, où son aspect haineux attire l'attention. "français d'Algérie, si vous vouliez revenir sur ce qui a été décidé, et conclu, vous vous attireriez la fureur du monde et vous en seriez les premiéres victimes: s'il lui faut châtier ceux qui se revoltent, la France le fera."

Il n'y aura pas d'archives à ouvrir pour confirmer ces points, il s'agit de faits qu'il faut interpréter à la lumière des méthodes policières des états totalitaires.

 Plastics à briey, Nice, Paris.

 

26 mars 62

En mars 1.962, les européens d'algérie et les musulmans pro français étaient désespérés de voir le gouvernement français continuer à traiter uniquement avec le FLN, sans tenir compte de leur existence.

Ils savaient pertinemment que ne leur resterait que le choix annoncé depuis 1.954, la valise ou le cercueil. L'O.A.S. avait décidé de gagner des territoires libres, espérant naïvement que cette possibilités obligerait De gaulle à les mettre à la table des négociations. Des tentatives dans des zones rurales ayant échoué, l'O.A.S. proclame le quartier le plus populaire d'Alger (un quartier qui rappelle le vieux Naples comme ambiance et comme géographie) Bab El Oued "indépendant". Des hommes en uniforme sont placés aux "frontières", il est interdit à l'armée d'y pénétrer. Le gouvernement ordonne de liquider cette résistance par tous les moyens, les avions staffent les terrasses, les gardes mobiles bouclent le quartier et commencent à fouiller les immeubles un par un, livrant parfois de véritables combats de rue.

L'O.A.S. demande à la population d'Alger de manifester son soutien à Bab El Oued et à l'O.A.S. en manifestant, en défilant jusqu'à Bab El Oued, pour "approvisionner le quartier affamé" et sans doute pour permettre à ses commandos de s'échapper. On notera que plus personne de l'OAS ne se souvient d'avoir decidé cette manifestation avoir redigé et diffusé le tract. Le nom du colonel Vaudrey a été avancé, mais il n'a jamais reconnu cette action.

Une foule très nombreuse se regroupe en plein centre d'Alger (à environ un kilomètre de Bab El Oued ) et se dirige vers le quartier en suivant les grandes artères parallèles à la mer, rue Michelet puis rue d'isly.

Les militaires (général polytechnicien Ailleret) mettent en place des barrages sur ces artères, en utilisant des troupes habituées au combat dans le bled, et n'ayant jamais pratiqué du maintien de l'ordre en zone urbaine. En particulier, au bas du plateau des gliéres, en face de la grande poste, il installe le 4éme régiment de tirailleur. On note qu'il disposait de 5 compagnies de CRS, et 11 EGM, spécialisés dans le maintien de l'ordre qu'il garde en "réserve".

 une vision de jean Brune :

La foule donc s'était avancée vers la rue d'Isly, et Sauveur avait suivi le cortège; chacun devinait que cette manifestation serait la dernière de l'Algérie Française, mais pour une fois elle n'avait aucun caractère politique; point de cris séditieux, peu de slogans; les bourgeois exprimaient leur solidarité aux prolétaires, voilà tout. La communauté européenne serrait les coudes, les différences de classe et de fortune étaient abolies; la troupe pouvait encercler Bab-el-Oued et l'isoler du reste de l'Algérie, le peuple se rejoignait néanmoins au-dessus de la barrière dans un élan fraternel.

Les pieds-noirs étaient en train de porter un coup fatal au principe sacro-saint de la lutte des classes.

La bourgeoisie de la rue Michelet qui passait pour mille fois plus réactionnaire que celle du XVIème arrondissement ou du boulevard Saint-Germain, venait, parce qu'elle était bourgeoisie, secourir le prolétariat de Bab-el-Oued, parce qu'il était le prolétariat. Ces médecins, ces avocats, ces fonctionnaires, ces commerçants allaient en procession religieusement, avec leurs femmes en robes d'été, leurs enfants bien peignés, et de vieux messieurs qui soufflaient sur leur rosette; ils marchaient, ces affreux bourgeois, sur un quartier ouvrier pour partager le destin des prolétaires... C'était là le vrai défi de la manifestation l'insupportable provocation à laquelle il fallait mettre fin et surtout sur laquelle il fallait faire ensuite silence...

...Que les assassins fussent des tirailleurs musulmans ne changeait rien à l'affaire, puisque ces derniers portaient l'uniforme français et étaient encadrés par des officiers français: la Transnonain, le faubourg Saint Antoine, la Commune, oui, bien sûr, mais les victimes de Bab-el-Oued, elles, ne seraient jamais réhabilitées. Aucun cortège, aucune délégation ne viendrait chaque année saluer les murs de la rue d'Isly. Nulle plaque de marbre n'attesterait aux générations futures le martyr de ceux qui étaient tombés là. Sauveur avait alors découvert dans toute son étendue l'aliénation des pieds-noirs ; plus totale que l'aliénation du prolétariat car la conscience universelle, pour une fois unanime, la jugeait comme le juste châtiment des Européens d'Algérie... Tous ceux qui avaient fait le sacrifice de leur vie pour l'Algérie Française étaient morts d'une mort inutile. ..

fin de la citation.

 détails de l'affaire : ICI photos

Ce régiment est composé à 60 pour cent de français de souche nord africaine quelques appelés et beaucoup d'engagés volontaires, (de nos jours on les appelle des "harkis") très anxieux de leur avenir.

Ce régiment était en opération le 18 mars, il est envoyé le 23 mars à Douera, passent la nuit à contrôler les voitures (!!) le 24 toute la journée il participe au bouclage de Bab El Oued, le 25 il est "au repos" à maison carré.

Bref les hommes sont dépaysés et fatigués. Deux sections de la sixième compagnie (quarante cinq hommes) sont placées à l'extrémité de la rue d'isly, alors que le dispositif arrêté ne prévoyait personne à cet emplacement.

Aucune raison n'a jamais été donnée à cette disposition non prévue, particulièrement imbécile s'il s'agissait de faire un barrage, vu la largeur du square à cet endroit qui ne permet même pas que les hommes se touchent , mais très commode pour tirer. On notera que le général Ailleret aurait pondu une note interdisant d'utiliser les tirailleurs en ville, note qui est introuvable aux archives militaires, et que certains affirment ne pas comporter cette interdiction. Par ailleurs, le colonel Caravéo, chargé par interim du secteur, prevenu seulement le 20 de cet interim, venu d'Orleanville et donc ne connaissant rien à Alger avait quand même eu le temps de regarder le dispositif dont il devait être responsable. Ayant reperé ce régiment de tirailleur, et qu'une autre unité était disponible, il décide le 25 de les échanger. Son patron le général De Menditte, lui donne l'ordre de ne rien changer, il refuse, il est convoqué par Ailleret qui devant son refus d'obeissance l'envoit à Saint Denis faire 60 jours d'arrêt de forteresse. Visiblement Ailleret avait déjà oublié sa note introuvable. Le colonel Caravéo restera sans affectation jusqu'en décembre 1968, puis il fût mis à la retraite.

On retiendra également le témoignage de l'excellent (et regretté) Joseph Hattab-Pacha, musulman converti, descendant du dernie bey d'Alger, maire de la casbah: "J'entends encore la réponse que m'a faite, en arabe, l'homme au fusil mitrailleur, celui qui a déclenché le tir: nous ne sommes pas des soldats français, nous sommes des FLN et nous sommes là pour tuer des français".

Aussi on lira avec interet dans le livre du prefet de police Cros (Le temps de la violence) l'aveu suivant: "la nouvelle que nous redoutions et esperions à la fois arriva, les tirailleurs avaient ouvert le feu". Au passage signalons que le préfet ment quand il écrit que trois soldats ont été tués; certains ont été blessés, aucun par balle.

Les premiers manifestants européens "forcent le barrage" sans difficulté c'est à dire qu'ils passent entre les tirailleurs qui ne peuvent les arrêter, et se regroupent sur les cotés.

A ce moment, (14 heures trente cinq) le commandement donne l'ordre aux différents barrages d'interdire tous mouvements, ce qui est fait sans difficultés, seuls les deux ou trois cent personnes qui ont franchi le "barrage" du quatrième RT sont sur la place de la grande poste et dans la rue d'isly.

C'est à 14 heures 45 que les tirailleurs ouvrent le feu sur la foule ils tirent à l'arme automatique pendant dix minutes, s'acharnant sur les blessés, malgré les ordres de "halte au feu" criés par leurs officiers. Ils tuent au moins 63 personnes, femmes et enfants compris, chrétiens juifs et musulmans, et en blessent une cinquantaine d'autres.

Les FM ne s'arrêtent de tirer qu'à bout de munitions.

 Les français d'Algérie ont parfaitement compris le message, les gaullistes ont repris à leur compte le slogan "la valaise ou le cercueil" il ne leur reste plus qu'à quitter la terre de leurs ancêtres.

Les rapports des militaires affirment que les premiers coups de feu ont été tirés des immeubles environnant. Aucun n'explique pourquoi pour répondre à des tireurs placés dans les étages des immeubles (sans même parler des terrasses) il faut tirer sur les gens à terre, ni pourquoi aucune douille ou autre preuve, sans même parler de coupables n'a jamais été apportées, qui pourrait étayer cette affirmation.

Une enquête menée par les parents des tués qui recoupe les éléments de l'enquête officiels, les témoignages des militaires et des civils, aboutit à la conclusion que si coups de feu initiaux il y a eu ce ne peut-être qu'à partir de la rue Alfred Lellouch, mais la dernière fenêtre à droite du dernier étage de la caserne Charron, occupée par l'armée française est aussi un candidat serieux, et qu'ils furent tirés sur la foule des manifestants et non sur les militaires.

(d'après " un crime sans assassins " de Dessaigne et Rey, éditions Confrérie Castille, ISBN 2 907 862 12 X). On trouvera ICI la conclusion du livre. Et là de nombreuses photos. Et aussi un plan d'alger tout autour de la grande poste.

voici aussi un témoignage qui est un appel à témoin:

Au procès du Petit-Clamart, Maître Tixier-Vignancourt a évoqué l'existence d'un Vietnamien. Il se nomme Tran Trong Doi, né le 25 juin 1932 à Hanoi. (d'après "le procès du Petit-Clamart" -compte rendu sténographique -Ed Albin Michel.)

Il se trouve que ma mère et moi-même avons reçu des informations à propos de ce Vietnamien le jeudi 29 mars 1962. Un semblant de vie reprenait dans la ville. Bien que ne j'en éprouve aucune envie, j'accompagnai ma mère chez notre coiffeur. Il était installé au fond d'un couloir au n° 8 rue Bedeau. Nous étions les seules clientes. Survint la petite apprentie. Elle habitait un immeuble voisin, je ne serais pas surprise qu'il s'agisse du no 8 rue Changarnier, mais je n'en ai pas la certitude. Voici le dialogue que j'ai entendu. Il est authentique.

"- Moi je sais qui a tiré le premier coup de feu! C'est un type de ma maison, en haut !

- Qu'est-ce que tu nous racontes ?

- Oui, parfaitement! C'est un Vietnamien! Il y avait à peine quelques jours qu'il était dans cet appartement, avec une bonne femme, une blonde. Ils avaient pas l'air tranquille. Nous, on a tout de suite compris que c'était une barbouze.

- Ca prouve pas qu'il ait tiré !

- Non! D'ailleurs on ne l'a pas vu tirer. Mais après ils sont venus, ils l'ont emmené sur une civière, il était mort. Et la femme elle est sortie sur le palier et elle n'arrêtait pas de gueuler.

- Qu'est ce qu'elle gueulait ?

- Elle hurlait! "Quatorze millions, ils lui ont promis pour tirer par la fenêtre! Quatorze millions! Il a exécuté les ordres, exactement, et au lieu de payer, ils l'ont tué! Non je ne me laisserai pas faire, il faudra qu'ils les crachent les quatorze millions!"

- Ils vont peut être lui donner les sous, je ne sais pas, en tout cas, le bonhomme, ils l'ont emporté mort!

- Qui c'est ces Ils"

- Eh ben! les flics bien sûr !

Le coiffeur nous regarda, consterné.

- Tais-toi ! Tu dis des bêtises !

- Comment je dis des bêtises! Ah ben ça alors! Demandez à ma mère si c'est pas vrai !

Et les voisins aussi, ils ont entendu! "

J'ai toujours cru que cette jeune fille disait vrai. Pourquoi aurait-elle inventé une telle histoire ? Et puis sans vouloir me vanter, je suis assez douée pour détecter le mensonge. De plus, il m'étonnerait beaucoup que Maître Tixier Vignancourt soit allé chercher ses informations chez cette gamine, pourtant leurs affirmations se rencontrent. !

J'ai trouvé le nom de ce coiffeur, Monsieur S di C... Hélas, il n'y a personne de ce nom sur Minitel. Dommage, il aurait confirmé et m'aurait peut être mise en rapport avec l'apprentie, ses parents ou ses voisins.

fin de la citation du livre "un crime sans assassin".

 46 morts au moins, (dont pas un militaire) 200 blessés (dont 4 militaires) 2000 cartouches tirées. Il s'agit là des chiffres officiels, mais d'autres morts ont été signalés qui ne figurent pas sur la liste, en particulier une jeune femme et son nourisson que de nombreux témoins ont vu. Le chiffre de 80 morts a été avancé par certaines associations de pieds noirs. On trouve ICI une liste de 62 morts.

Les morts sont hativement emportés par les militaires et enfouis dans une fosse commune. Les pellicules des journalistes sont saisies. Quelques jours après les parlementaires du groupe "unité de la république" (les partisans de l'algérie française) publient un livre blanc qui ne comporte que des témoignages signés par leurs auteurs, le gouvernement le saisi et le détruit.

Ce jour marque la fin des espoirs des pieds noirs, ils ont compris que le pouvoir gaulliste les a condamnés à l'exil, certains se jetteront dans le nihilisme et les attentats aveugles, les autres ne penseront plus qu'à sauver leurs peau et si possible leurs biens.

 

Jean Pierre FERRER , Témoin de la tuerie, raconte

LE 19 MARS 1962

Les accords d'Evian viennent d'être signés par les émissaires du gouvernement gaulliste et par ceux des terroristes du FLN; ces accords décrètent le cessez-le-feu en Algérie. Il faisait déjà chaud à Alger. Depuis plusieurs mois, la scolarité n'était plus assurée dans les écoles et les lycées. Quelques professeurs de mathématiques, Français-latin et physique donnaient quelques cours dans une annexe de la mairie, située dans une rue perpendiculaire à la rue Hoche qui descendait au Lycée Gautier. Nous n'étions qu'une poignée à nous y rendre car nous devions présenter théoriquement la première partie du bac en mai ou juin.

Alger était quasiment vide de ses occupants musulmans qui avaient fui depuis quelques mois le centre ville pour se mettre à l'abri chez des parents dans les faubourgs éloignés ou dans les villages environnant la ville. Les attaques de l'OAS contre les Gardes Mobiles, la chasse aux barbouzes venus de Paris, les plastics (chtrounga ) qui explosaient la nuit, les perquisitions , les concerts de casseroles scandant "Algérie Française " étaient notre lot quotidien. Nous écoutions, agglutinés autour d'un poste à transistors les informations, les messages codés, les encouragements de la radio pirate de l'OAS. Depuis la venue de De gaulle en 58, balcons et fenêtres étaient pavoisés de drapeaux tricolores. Nous étions français et nous n'avions pas honte de le montrer et de le chanter : tout était prétexte à entonner la Marseillaise et les Africains.

Les poubelles n'étaient plus ramassées. Des employés de la Mairie utilisaient les camions-poubelles et embauchaient les jeunes désœuvrés pour nettoyer la ville. Dans mon quartier de la rue Danton, nous étions quelques uns à avoir accepté de participer à cette action. Nous ramassions les ordures, chargions le camion et partions vers la déchetterie pour le vider. Les Algérois, généreusement, nous donnaient une pièce pour nous remercier de notre courage et civisme. L'odeur aigre des ordures était dure à supporter quand nous nous tenions à l'arrière du camion, debout sur le marche pied. Nous étions entourés de myriades de mouches attirées par le fin parfum que nous dégagions. Je n'ai pas eu de chance quand vint mon tour: notre ramassage terminé, le camion plein, nous roulions sur la route Moutonnière quand soudain survint la panne : Une partie de l'arbre de transmission traînait par terre... Il était donc impossible de continuer notre route vers la décharge. Nous nous assîmes sur le bord de la route en attendant qu'un autre camion monte d'Alger. Le temps passait lentement et malgré les encouragements et les plaisanteries de notre conducteur, André Pons, nous n'en menions pas large. Peu de voitures passaient et l'endroit était complètement désert. Nous imaginions tous, sans l'affirmer ouvertement, que nous faisions des cibles parfaites et je n'ai pas honte d'avouer que j'avais peur. Nous n'avions aucun moyen de communication embarquée. Nous étions donc condamnés à attendre. Soudain, nous vîmes arriver un camion-poubelle, benne vide qui avait sûrement terminé sa tournée et redescendait sur le Centre Ville. Le chauffeur s'arrêta pour nous demander si nous avions un problème; après quelques discussions, il accepta de nous ramener en ville. André attendrait qu'un autre camion vienne le remorquer . Je puais vraiment et c'est surtout en entrant dans la boulangerie de mes parents que je m'en rendis vraiment compte car l'odeur du pain chaud et des pâtisseries embaumait... Je faisais vraiment "tache" au milieu du petit magasin mais j'étais fier de mon aventure que j'enjolivais à loisir. Je me récurais sous la douche dont l'eau était chauffée directement par le four. Que c'était agréable de sentir bon la savonnette Cadum...!

L'après midi était plus amusant mais tout aussi important car des reliefs de poubelles et autres déchets jonchaient les rues. C'est toujours André Pons qui ramenait de la mairie les tuyaux de caoutchouc et les balais "officiels". Il possédait les clés des robinets d'arrosage. Nous lavions les rues, les escaliers, les trottoirs et guidions, à coups de balais, les cochonneries qui faisaient de la résistance, vers les bouches d'égouts. A vrai dire, nous nous arrosions autant que la rue, mais le soleil du début d'après-midi nous séchait rapidement. Nous prenions notre travail au sérieux tout en rigolant comme des gamins. Tous les jeunes participaient au nettoyage du quartier : Christian Richter, André Cuénoud, Mahfoud Allel, Dermen Belkacem, Bernard Ruffenack, Daniel Marti, Kader Bessalchi, (qui avait deux sœurs magnifiques...), Pierre Padovani, etc...

Etrangement, notre quartier ne s'était pas vidé de ses familles musulmanes et malgré la tension ambiante, nous continuions à vivre ensemble, à plaisanter et à faire comme si de rien n'était.

Plus loin à l'ouest, le quartier de Bab-el-Oued était, depuis plusieurs semaines, encerclé par l'armée Française. Le 23 Mars, de la piscine du RUA, où j'allais régulièrement, puisque j'étais inscrit à la section handball, j'aperçus des petits avions de chasse de l'armée française tournoyer au dessus de la Casbah et plonger en piqué sur Bab-el-Oued. De loin, nous entendions les explosions et apercevions des volutes de fumée s'élever dans le ciel : c'était la Cité des Eucalyptus qui était visée. Et touchée par les T6. C'était le général Ailleret qui dirigeait l'assaut, après les consignes de De Gaulle : "Il ne faut pas lésiner, rien ménager ".

 Des barbelés avaient été déroulés à chaque issue du quartier. Tanks et Half-tracks dissuadaient tout passage. Nul ne pouvait y entrer ou en sortir. Pas même les ambulances. Bab-el-Oued, quartier populaire et à majorité communiste, était une poche de résistance Algérie Française et des actions violentes s'y étaient déroulées. Les tanks de cette armée qui était venue nous défendre, avaient descendu les voies principales du quartier : Les avenues de la Bouzaréa et de Marignan et avaient écrasé tout ce qui faisait obstacle à leur passage. Les voitures et les motos stationnées le long des trottoirs avaient été laminées et les façades des immeubles criblées de balles. Toute la famille de ma mère vivait à Bab-el-Oued, où je suis né, et des cousins germains de mon père y avaient aussi une boulangerie, c'est dire que la moitié de mes oncles, tantes et cousins étaient là. L'approvisionnement alimentaire et en médicaments ne se faisait plus. Les boulangeries ne cuisaient plus leur pain, les boucheries ne débitaient plus leur viande et dans les cafés, même l'anisette et les tramousses commençaient à se faire rares... Déjà les habitants d'autres quartiers venaient apporter dans des couffins, du lait ou d'autres victuailles et tentaient de les faire passer entre les barbelés aux mains qui se tendaient de l'autre côté de la barricade ou les accrochaient aux cordes lancées depuis les balcons des immeubles proches. Mon père avait apporté du pain dans sa Simca P 60, un break noir et blanc qu'il utilisait pour faire ses livraisons.

Le mot d'ordre de nous rendre en cortège pacifique à Bab-el-Oued avait été diffusé sur la radio pirate et les tracts distribués toute cette semaine nous enjoignaient de nous y rendre nombreux afin de porter une assistance morale à nos familles ou amis interdits de sortie. Nous vivions depuis plusieurs années sous un couvre-feu qui n'empêchait ni explosions ni mitraillades chaque nuit ; nous devions nous y rendre le 26 mars après midi.

LE 26 MARS 1962

Comme une traînée de poudre, l'information avait circulé. D'un accord commun entre tous les copains du quartier, nous avions décidé de nous joindre à cette manifestation. ( je me demandais quand les Algérois travaillaient tant il y avait de manifestations, cortèges et autres réunions...). Ma sœur, Marie-Françoise, âgée de quinze ans et demi, s'était jointe à nous et moi même, je n'avais pas encore dix sept ans. Elle était la seule fille du groupe. Nous descendions la rue de Mulhouse insouciants et plaisantant comme il est bon de le faire à notre âge. Nous arrivions place Lyautey, ce carrefour qui est l'aboutissement ou le départ du Boulevard St Saëns, de la sortie du Tunnel des Facultés, de la fin de la rue Michelet et du début de la rue Charles Péguy. Cette dernière est intermédiaire entre la rue Michelet et la rue d'Isly. Nous longions les Facultés et l'Otomatic , brasserie mythique des étudiants Algérois. L'autre brasserie très fréquentée par la jeunesse : Les Quat Z'arts, lui faisait presque face. J.P. Soler (dont l'épouse Michèle est présidente du Cercle Algérianiste de Nice), D. de Ubéda et Paul Arfi se joignirent à nous.

Nous entendions la foule chanter la Marseillaise.

Une chenille immense descendait de la rue Michelet avec des banderoles affichant notre détermination de rester Français sur une terre française. L'Algérie n'était pas une colonie ordinaire; l'Algérie était découpée en plusieurs départements continuant la numérotation de ceux de Métropole, les plaques d'immatriculation des véhicules l'attestaient puisque nous suivions le Territoire de Belfort (90). Les immatriculations d'Alger étaient 91, Oran 92 et Constantine 93. Ceci avant de devenir 9A à 9H puisque la région parisienne nous avait déjà dépossédé d'une partie de notre identité. Les drapeaux Bleu Blanc Rouge apportaient de la couleur aux banderoles blanches. Comme à chaque cortège, les anciens combattants de 14/18 ou 39/45 ouvraient la marche et arboraient fièrement leurs décorations et médailles militaires, clairons et tambours en tête. Dans la foule, jeunes, vieux, parents avec leurs enfants sur les épaules se tenaient au coude à coude. Il n'y avaient pas que des Pieds Noirs, une population de toutes confessions se dirigeait vers Bab-el-Oued. Courageux, car ce n'était pas la porte à côté, il y avait bien sept à huit kilomètres des Facultés à Bab-el-Oued. Notre petit groupe se joignit au cortège en faisant en sorte de rester tous les uns près des autres. Comme d'habitude, Smaïn faisait le pitre et nous lui donnions des claques derrière une tête qu'il avait plate (nous l'appelions Khaplaté ). Le manque de rondeur de son crâne était compensé par un nez très busqué.

Nous marchions sous les platanes déjà feuillus et y allions de notre plus belle gorge pour chanter et clamer des slogans hostiles aux vendeurs de l'Algérie et bienveillants à ceux qui nous défendaient. En arrivant à hauteur du Coq Hardi, autre brasserie célèbre pour les inconditionnels du RUA, je fus surpris de constater que deux camions militaires étaient arrêtés perpendiculairement à la chaussée. Des barrières de fils de fer barbelés avaient été déroulées de telle manière qu'il était impossible de contourner les véhicules. Seul une ouverture existait entre eux, passage assez étroit, car également garni de barbelés et gardé par quelques soldats Français coiffés du képi de la Coloniale ou des Tirailleurs. Nous pouvions apercevoir, plus bas, d'autres camions kakis stationnés rue Monge. Le militaire chargé de nous laisser circuler, écartait à peine les barbelés empêchant ainsi le cortège de les traverser trop rapidement. Au moment où notre groupe passa, le jeune métropolitain prononça une phrase qui depuis quarante ans est restée gravée au tréfonds de ma mémoire, je l'entends encore aujourd'hui comme si j'y étais. Il dit le plus simplement du monde : "Allez, passez vite avant que ça ne commence…", phrase anodine sur le moment, passée inaperçue mais combien importante pour les minutes qui allaient suivre. Toujours ensemble, nous traversâmes le Plateau des Glières. Aucun car n'attendait ses voyageurs. Dans le jardin, derrière les arrêts d'autobus, la statue de Jeanne d'Arc, nous regardait passer avec son épée dirigée vers le ciel; elle semblait nous montrer le chemin .

Une chose nous avait complètement échappé : Toutes les rues transversales qui accédaient à la rue d'Isly étaient fermées par des barbelés. Ainsi, nous ne pouvions pas revenir par la rue Edouard Cat, la rue Ballay ou le boulevard Laferrière sur notre gauche. Il en était de même à droite si nous voulions accéder à la rue Chanzy ou à l'avenue du 9° Zouave. C'était incroyable, nous étions pris dans une souricière et personne ne semblait s'en être rendu compte... Nous approchions de la Grande Poste à l'architecture néo-arabe avec sa dizaine de marches pour y accéder. En face, assis à même le sol, devant la Maison de la Presse, je vis, sans vraiment y prendre garde non plus, une dizaine de militaires arabes, de toute évidence, dans une tenue vestimentaire qui ne ressemblait en rien à celle de notre armée, même en treillis. Leurs casques aussi étaient différents des casques français. Ils portaient juste au-dessus de la visière deux caractères blancs : W.3. Aucun militaire français n'avait d'inscription sur son casque. La marque distinctive de son arme est mentionnée sur la médaille pendue au bouton de la poche gauche de sa chemise ou sur un écusson de tissu cousu sur sa manche. W.3, W.3, W.3…!?! Mon Dieu , W.3, cela signifie Willaya trois... Des fusils mitrailleurs étaient posés devant eux, soutenus par leur trépied. L'armée française se faisait aider par l'ALN !!!

Comme je vous l'ai dit plus haut, il faisait déjà chaud. Je ne portais que des tongs, même pas des espadrilles qui auraient pu mieux tenir mon pied . Mon regard se dirigea inconsciemment vers les terrasses des immeubles. Ces constructions du début du siècle n'avaient que trois ou quatre étages . Des militaires armés y étaient postés nettement visibles…

Nous venions à peine de dépasser la Grande Poste, quand les premiers coups de feu claquèrent. On nous tiraient dessus. Une mitraillade très fournie … Qui ? D'où ? Des lapins! une cible d'une facilité infantile... Que faire ? Où se diriger? puisque toutes les issues aux rues supérieures ou inférieures étaient bouclées. Nous courûmes, nous courûmes, droit devant, mais pour aller où...? Le cortège s'était disloqué, les banderoles avaient été abandonnées, les trompettes s'étaient tues . Certains gravissaient à toutes jambes les escaliers de la poste pour se mettre à l'abri à l'intérieur. D'autres se cachaient derrière les arbres ou se jetaient par terre pour faire le mort . On entendait des cris : "Halte au Feu ! Halte au feu ! Au secours ! " Suppliques dérisoires pour celui qui ne veut pas entendre . Ma tête était vide... essayez donc de courir avec des tongs ; ma sœur! merde...! ma sœur...! Où était elle ? je ne la voyais plus .

Les mitraillettes crépitaient de tous cotés. Je m'arrêtai, terrifié, cherchant derrière, à droite ou à gauche. Je levai la tête pour essayer de voir plus haut, plus loin : Elle était devant, avec une partie des copains du quartier. Elle courait plus vite que moi. Des hommes, des femmes, des enfants tentaient d'ouvrir les entrées d'immeubles pour se protéger. Des militaires (français ? FLN ? ) les poursuivaient dans les entrées d'immeubles et leur tiraient dans le dos, c'était effroyable...! Des Français qui faisaient ça . Je ne pouvais le croire . Y pensais-je même ? Nous courions toujours, descendant la rue d'Isly. Nous passâmes le Milk-Bar, la place du Maréchal Bugeaud, sur notre gauche, avec sa statue; derrière lui , les bâtiments de la 10° Région Militaire. Nous traversâmes la place en diagonale et pénétrâmes dans un immeuble dont la porte était restée ouverte. Nous la refermâmes d'un coup sec et gravîmes un ou deux étages pour trouver un hypothétique abri : Un appartement qui s'ouvrirait pour nous accueillir. Rien, toutes les portes restaient fermées. Nous étions tous là, mais nous ne savions pas ce qui s'était exactement passé. Le calme, dehors, semblait revenir. Les coups de feu étaient moins fournis et paraissaient lointains. Nous redescendîmes au rez-de-chaussée pour sortir et tenter de revenir au quartier. Mal nous en prit car, alors que nous ouvrions la porte une salve partit de l'immeuble d'en face ou de la 10° Région et les balles s'écrasèrent sur le mur de l'entrée. Putain! Tirer sur des gosses !… Il nous fallait encore attendre. Nous étions assis sur les escaliers de marbre usés dans l'immeuble. Le calme revint complètement. Nous tentons une autre sortie, plus rien; plus un bruit; un silence assourdissant et pesant nous enveloppait .Tout était fini .

Cela avait duré douze minutes. Un siècle!

Des personnes au regard hagard, en larmes, erraient, perdues, déboussolées. Elles cherchaient ceux avec qui elles étaient il y a un instant. D'autres tiraient derrière elles des lambeaux de banderoles et des drapeaux maculés de sang .

Nous grimpâmes en courant les escaliers sur notre droite. Ils rattrapaient la rue Dupuch. Nous nous dirigeâmes vers le Bd du Telemly, les hauts murs du stade Leclerc s'élevaient sur notre droite. A l'intersection du Boulevard de Tassigny et du Telemly, près du Viaduc, quelques camions militaires étaient stationnés. Abrités derrière chaque roue, un genou à terre, armes au poing, des gardes mobiles semblaient attendre encore l'attaque d'un ennemi virtuel. Nous rîmes en passant près d'eux. Ils braquèrent vers nous leurs pistolets mitrailleurs et nous demandèrent si c'était fini. Oui, Messieurs, c'était fini : Vous aviez exécuté plus de cinquante personnes et fait des centaines de blessés, tous innocents... Notre seul tort était de vouloir rester Français . De retour au quartier, les gifles fusèrent, mais il y eut aussi beaucoup de larmes de joie. Nous étions tous revenus sains et saufs. Toute la manifestation et les événements avaient été retransmis en direct par Europe 1 et RMC, donc nos parents, savaient ce qu'il s'était passé; ils étaient restés les oreilles collées aux transistors, hébétés, impuissants. Aux actualités du soir, aucune information sur ce terrible après midi ne fut diffusée par Europe ou RMC. Les quotidiens et hebdomadaires nationaux furent censurés par le pouvoir gaulliste et retirés des kiosques.

Philippe Labro, dans son roman "Les Feux mal éteints" relate cette journée. Monsieur Labro faisait, à cette époque son service militaire comme correspondant des armées à Alger. Ce Monsieur nous raconte que les coups de feu sont partis de la foule. On pourrait donc conclure que, selon les termes de cet écrivain, ce jour là les Pieds Noirs se sont exécutés eux-mêmes… Pauvre Monsieur Labro...!

Jean-Pierre Ferrer est né à Alger en 45. Parti le 26 mai 62 , pour Marseille, Voiron, Nice, Tours. Je vis à St Laurent du Var après 6 ans passés à Nice et 26 à Six-Fours (83)

"En fait , le 26 mars 1962 fut une belle journée de printemps comme il en existe tant en Algérie…"

 

Le Provençal journal du grand humaniste Defferre titre "Emeute fasciste brisée à Alger".

 Conférence de presse de l'O.A.S. à l'hôtel Aletti (QG des journalistes, très chic, aucun d'entre eux ne quitte le bar, mauvaise influence d'Hemingway, et peur de se faire retourner par la réalité).

Avec le temps les langues se delient, en particulier on peut noter que dans son livre Titre : L'Apres De gaulle ; Notes Confidentielles, 1969-1989 Jean Mauriac rapporte page 41 les rancoeurs de Christian Fouchet:, le 28 Octobre 1969 "J'en ai voulu au général de m'avoir limogé au lendemain de mai 1968. C'était une faute politique. Il m'a reproché de ne pas avoir maintenu l'ordre: "Vous n'avez pas osé faire tirer." "J'aurais osé s'il l'avait fallu, lui ai-je répondu. Souvenez-vous de l'Algérie, de la rue d'Isly. Là, j'ai osé et je ne le regrette pas, parce qu'il fallait montrer que l'armée n'était pas complice de la population algéroise". "

A la télévision, De gaulle ose parler d'émeute.

 

 A Tunis le ministre des affaires étrangères approuve hautement et explique que : "décolonisation c'est dépeupler, l'algérie doit réduire considérablement le ramassis de portugais, de maltais, d'espagnols et d'italiens devenus les français d'algérie ".

Par radio, Boumedienne lance un appel à la désertion des musulmans engagés coté français et leur promet la vie sauve. En même temps il diffuse une instruction secrète "se montrer conciliant envers les harkis afin de ne pas provoquer leur départ vers la métropole, ce qui leur permettrait d'échapper à la justice de l'algérie indépendante. Les valets du régime ne trouveront de repos que dans leur tombe."

Ces instructions sont interceptées par l'armée et donc connues du gouvernement.

 De gaulle demande un support franc et massif à son référendum.

 

27 Mars 1962 :

17 morts, 88 blessés, parmi eux un Suisse à Alger.

Aussi Georges Garcia, 25 ans, tué d'une balle par une sentinelle du 10 ème dragon, alors qu'il venait d'executer sur le port d'Oran un égorgeur FLN.

Pas de journaux en algérie.

Deux grenades lancées dans la prison de Constantine, 64 blessés.

Les doyens des trois facultés d'Alger, sont suspendus pour mauvaises pensées.

 Pendant ce temps l'armée désarme : Citation:

En un autre secteur d'Algérie dans les Aurès, le capitaine Rivière explique que la harka d'Edgar Quinet au Nord-Ouest de Khenchela fut désarmée dans les mêmes conditions (entretien enregistré).

Selon Pierre Rivière, le général commandant la zone avait promis que les supplétifs de l'Aurès partiraient pour la France avec leurs armes dont ils ne se sépareraient que sur le bateau. Cette promesse ne fut pas tenue. Familles comprises, il y avait dans cet endroit quelques 2.500 personnes à évacuer. Le dimanche suivant le cessez-le-feu, la promesse du général fut renouvelée. Edgar Quinet, Bou Hamama, Bayou, Foum- Toub, Arris devaient être vidées de leurs harkis, familles comprises. Tous seraient emmenés dans des véhicules militaires. Le lendemain lundi, l'adjoint de Rivière se rendit à Edgar Quinet. Il en revint, une heure après, décomposé. Il ramenait quelques décorations glanées au hasard sur les routes. Les harkis désarmés à l'aube les avaient jetées en signe de mépris. "La harka... entourée par le bataillon français voisin avait été désarmée par surprise, au petit matin, sous la menace des 12.7 montés sur half-tracks. Les harkis désespérés avaient jeté à terre leurs décorations". On désarma Mechta Bayou, Arris, Baniane et Dissa, selon un scénario moins brutal, en faisant croire qu'il s'agissait d'une prise d'armes correspondant à une mutation sectorielle. On avait alors prétexté qu'il fallait vérifier l'état des fusils, moyennant quoi, ils devaient être déposés dans les camions. Une fois les armes rassemblées, les camions s'étaient retirés.

Pierre Rivière nous a fait remarquer que nombre d'officiers ayant organisé ces "prises d'armes" d'un genre particulier, étaient nouvellement nommés et ne comprenaient pas ce que représentait ce désarmement pour des gens qui se battaient contre le FLN depuis cinq ans.

Selon lui, beaucoup d'entre eux partageaient l'avis du général Buis, chef du cabinet militaire de Christian Fouchet qui pensait que les harkis "avaient un pied dans la rébellion", et s'entendraient sans trop de difficulté avec le FLN. Ce n'était certes pas le cas dans l'Aurès où les combats avaient été très durs et la rébellion extirpée au prix de beaucoup de difficultés. Pierre Rivière nous a dit que dans la nuit qui suivit le lundi fatidique, les premières familles de supplétifs arrivèrent dans la cour de la sous-préfecture pour demander asile et protection.

Il nous a indiqué néanmoins qu'en définitive, peu de massacres eurent lieu dans l'Aurès proprement dit. C'est à Khenchela, à Biskra, à Barika, à Corneille en bordure du massif que les harkis furent massacrés avec leurs familles. Dans la montagne, selon le général Paillard, la structure tribale des communautés aurésiennes limita les représailles.

Toujours la phase finale de la guerre d'algérie, Monneret, l'harmattan, ISBN 2-7475-0043-8

Ah les représailles furent limitées, 150.000 morts seulement.

Soulagement.

Et les politiques renforcent le FLN, les 2600 musulmans pro FLN du camp de Larzac (tous arrêtés en métropole) sont expulsés vers l'algérie (où beaucoup n'avaient plus d'attache) où ils sont libres de se venger des malheurs que leurs infligèrent les métropolitains sur les harkis et les pieds noirs. La plupart, ayant commis leurs exactions et recuperé ce qu'ils pouvaient, rejoindront à nouveau la métropole.

Puisque tout va bien, les députés d'algérie, tous algérie française, sont privés de la protection personnelle qui leur était attribuée.

Le Larzac peut ainsi commencer à accueillir les détenus Algérie française, Maurice l'Ardoise est surbooké.

La Croix, émue jusqu'aux larmes par le sort de la chrétienté en algérie titre sur le massacre de la rue d'isly: "le crime appelle l'oeuvre de justice; la pouvoir porte le glaive contre ceux qui combattent la paix. Force doit rester à la loi". Elle déplore que l'OAS ait transformé le clocher de la cathédrale d'Oran en point d'appui ce que le chanoine Carmouze dément, photo à l'éppui, la cathédrale n'ayant pas de clocher. Mais La Croix n'est pas convaincue, sans aucun doute la photo est truquée.

 

28 Mars 1962 :

Le corps de police est désarmé il était constitué de musulmans et de pieds noirs pro algérie française.

Une jeune fille enlevée, abondamment violée, assassinée à Oran.

FLN contre OAS à Médéa, 5 F.L.N. contre 2 OAS au tapis.

A deux heures du matin, un train spécial mis en oeuvre par l'O.A.S. emmène dans l'ouarsenis 80 hommes bien armés. (80 seulement, Montagnon se plaint du manque d'agressivité des pieds noirs qui sont réticent à quitter leur ville pour aller se battre dans les djebels, il en esperait 200 ils sont 70). Il y a treize officiers, dont 4 du premier REP.

Au petit matin, les hommes débarquent près de Lavarende où les attend le colonel Gardes. Des unités de la légion et les harkis de Boualem doivent rejoindre en masse. L'unité qui contrôle le secteur est complice. Les hommes, dans les auto mitrailleuses de cette unité font les 80 kilomètres qui les séparent de Lamartine, le fief du bachaga Boualem.

Le matin du 29 Mars, l'O.A.S. a récupéré sans un coup de feu trois postes militaires, elle libère les soldats du contingent et occupe les postes avec ses harkis.

Dés le 24 Mars, des élements precurseurs avaient été attaqués par un groupe FLN, à 1 kilomètre de Ben Chicao. Les fells ont 4 tués; l'OAS perd un ancien légionnaire, le sergent Sandor, hongrois ayant fui les communistes, et le jeune (18 ans) Roland Escriva.

 14 plastics en métropole.

 

29 Mars 1962 :

19 attentats, 13 morts, 10 blessés., 25 plastics.

Installation de l'exécutif provisoire au rocher noir, le président Farés sort juste de prison, le F.L.N. y a tous les postes importants, les figurants pieds noirs gaullistes regardent passer le train.

Sept hold up.

Reprise du travail dans les administrations.

Gardy remplace Jouhaud à Oran.

Le couvre feu de Bab el Oued est enfin levé.

Le Bachaga Boualem lance un appel par radio au ralliement des troupes au maquis de l'ouarsenis.

Au lieu des unités de légion promises, et le 5éme Régiment de Tirailleur Algérien du commandant Bazin, les avions de l'armée bombardent le 29 Mars un des postes tenus par le maquis O.A.S, conformément aux instructions du comité des affaires algériennes signées De gaulle données les 20 décembre 1961, et 8 février 1962. Le comando OAS éclate en petits groupes, épaulés chacun par des hommes de Boualem, à qui ils ont distribué les armes récupérées dans les postes. Une partie des hommes (Pouilloux, Bernard Delhomme) cherchent à regagner la vallée et des fermes européennes prévus comme points de replis, mais ils se font intercepter par les gardes mobiles. Il ne reste que 40 hommes, avec Montagnon, qui, éclatés en petit groupe nomadisent de mechta en mechta.

Très vite les équipes manquent de vivres. Le 3 Avril, l'armée monte une opération de bouclage ratissage des plus classique, le commando éclate en groupes de 3 ou 4 hommes qui se terrent dans les caches utilisées auparavant par le FLN.

Boualem se rend compte qu'une fois de plus les promesses des officiers ne seront pas tenues et le 5 Avril, ses harkis changent de coté et demandent au commando de quitter leur territoire. Le 6 Avril, lors d'une nouvelle opération bouclage-ratissage, les harkis abandonnent les combattants qui sont repérés et doivent se rendre.

Contre partie de cet abandon, Boualem et ses proches (environ 200 personnes) seront enlevés par avion militaire et déposés à la base d'Istres d'où ils rejoindront une propriété mis à leur nom à Mas Tibert. (si vous passez par là, un de ses fils tient un restaurant avec un couscous authentique, à ne pas manquer).

Les derniers débris de ce maquis, sous le commandement du commandant Bazin qui était resté dans la plaine, seront éliminés par le FLN requinqué par la force locale, le 10 Avril. Gardes rejoindra Alger, avec l'appui de Boualem dont il est l'ami personnel.

 Jean-Claude MARQUÉS. Jeune Algérois, militant de Jeune Nation. Appelé sous les drapeaux dans un Régiment de Tirailleurs à Blida, il déserte en avril 62 pour rejoindre l'Armée Secrète. Volontaire pour le Maquis de l'Ouarsenis, il disparait en combattant une katiba de l'ALN, sous les ordres du Commandant Bazin et de l'Adjudant-Chef Muzzati. On n'a plus jamais entendu parler de lui. Sa famille recevra en 1964 une lettre du Ministère des, Armées leur annonçant que Jean-Claude MARQUES était "Mort pour la France" ! Sans aucun détail et bien que son corps n'ait jamais été retrouvé. Luc Boivin et Hervé Cuesta

Plastics à paris, Lille dans le Vaucluse.

 

30 Mars 1962 :

15 attentats, 14 morts, 18 blessés, 13 plastics.

La base Alat de Sidi bel Abbés est attaquée par l'O.A.S. dans le but d'y récupérer des armes, avec la complicité de certains officiers qui se dégonflent, c'est un échec.

HADJADn Tayed, 2. Harki, Capturé le 30-03-1962 à Bouchegould (Guelma) par le F.L.N., il s'évade le 18-08-1962 après l'indépendance.

 Mise en place de l'executif provisoire, au Rocher Noir, la cité administrative fortifiée à vingt kilomètres d'Alger. Fouchet passe la main à Farés dont le premier discours fait date: " (...) vous avez donné l'exemple de sens civique et de maturité politique. (...) grace aux accords signés à Evian, et par leur sincére, totale et effective application nous edifierons les solides fondations de l'état algérien de demain. (...) L'executif provisoire sera celui de la paix des âmes, des copeurs, des esprits, et aussi celui de la reconciliation fraternelle de tous les Algériens".

Premonitoire

Jugement dans l'assassinat du commissaire Gavoury, Piegts (pied noir dont la participation ne fut jamais prouvée, et pour cause il n'y était pas) et Dovecar, légionnaire déserteur sont condamnés à mort. A l'époque on ne savait pas que la peine de mort n'a aucune valeur dissuasive, et l'opinion de Badinter n'était pas aussi formellement fixée.

 

31 Mars 1962 :

 huit attentats, 9 tués, 5 blessés.

Un echec de l'OAS: L'ordre de monter quelque chose de relativement important en Oranie était venu d'Alger, du Colonel Jean Gardes - avec l'accord de Roger Degueldre - à Marcel Careno, Patron du Réseau Bonaparte à Oran. J'étais le Chef du Groupe Action de ce réseau. Nous décidâmes d'attaquer l'ALAT à Bel Abbès, ayant quelques contacts avec cette unité. Je demandai de disposer d'une dizaine de légionnaires; on m'opposa que pour des raisons psychologiques il était meilleur de prendre des gars d'Oran.

Une huitaine de jours avant l'action fixée pour le 31 mars 1962 j'étudiai avec Axel GAVALDON - que je connus à ce moment-là - et le Lieutenant Guy Montéro qui venait de déserter de la Légion, la façon de monter cette affaire. L'idée était de rentrer dans la Base et de neutraliser le poste de police et ensuite d'ouvrir le portail et un camarade arrivé à pied de Bel Abbès rentrait dans le camp et chargeait les armes dans un dépôt situé près de l'entrée du camp pendant qu'une autre équipe enlevait le commandant de l'ALAT et le faisait disparaître. Pour rentrer dans le camp nous disposions d'une 403 noire avec trois hommes habillés en militaires de l'ALAT.

Axel et moi étions aussi en uniformes d'officiers de l'ALAT. La voiture nous déposa devant le poste de police, Axel et moi, et alla nous attendre derrière le poste de police. Nous entrâmes dans le poste et expliquâmes que l'on nous laisse faire, qu'il n'y aurait pas de casse. Mais à ce moment-là nous entendîmes des cris poussés par un soldat situé derrière le poste. Nous sortîmes, Axel et moi; une sentinelle située à une dizaine de mètres tira une rafale qui tua sur le coup Axel; je pris deux balles dans le bras; je neutralisai la sentinelle et gagnai le portail pour appeler le Commando qui était de l'autre côté de la route qui bordait le camp. Mais à ce moment-là la lumière s'éteignit et cela commença à tirer de tous les côtés. Malgré mes appels je ne retrouvai ni les trois hommes entrés avec moi, ni le Commando. J'ai réussi à franchir les barbelés qui entouraient le camp et retrouvai Montéro qui m'attendait avec quelques hommes. Il m'expliqua que lors des coups de feu ses hommes, pris de panique, s'étaient enfuis sur Bel Abbès. Nous rejoignîmes Bel Abbès. Montéro trouva une équipe de Légionnaires qui me portèrent dans une clinique où je fus soigné".

Jean Biraud alias "Capitaine Jean" qui fut condamné à mort part contumace.

En mars 27 000 pieds noirs ont quitté l'algérie, 36.000 depuis le début de l'année, 236 000 depuis le début des "événements".

En Mars on comptabilise officiellement 20 enlèvements de pieds noirs, surtout jeunes et jolies, dans toute l'algérie.

Il reste fin mars 40 500 harkis, 18 000 moghaznis, 9 600 GMS, 9 000 auto défense. Le reste a été licencié. 21 000 ont demandé leur réintégration dans la vie civile, avec prime, 15 000 n'ont pas demandé la prime, 1 000 se sont engagés dans l'armée d'active (les célibataires) 2 000 ont signé un contrat civil de 6 mois (en partie dans la force locale). source: Boualem, les harkis au service de la france, Editions france Empire, 1963

 Monsieur Bavaud déjeunait le 7 mars dans un restaurant de Tarbes, il s'amusa à dessiner sur la nappe en papier du resto une caricature de De gaulle. Dénoncé par le patron il est condamné ce jour pour offense au chef de l'état à quatre mois de prison. Il revint le 20 Mai refaire le même dessin dans le même restaurant, et cette fois la prison fut ferme.