Février 1957

 

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1 Février 1957 :

Rien.

 

2 Février 1957 :

Rien.

 

3 Février 1957 :

 Débat sur l'Algérie aux nations unies, Pineau réaffirme la position française (il s'agit d'une affaire intérieure).

Pineau accuse l'URSS et l'Egypte d'aider le F.L.N. matériellement (armes et argent) et politiquement.

 Le FLN ayant mis la main sur une forte quantité d'explosif fait sauter l'église de Nédroma pendant la messe, 10 morts, quatre blessés.

 

 4 Février 1957 :

 Rien.

 

 5 Février 1957 :

 Un agriculteur enlevé à Aumale.

 

 6 Février 1957 :

Rien.

  

7 Février 1957 :

 Rien.

 

8 Février 1957 :

Rien.

 

9 Février 1957 :

Rien.

 

10 Février 1957 :

Trois bombes sur deux stades dans la banlieue d'Alger (stade d'El Biar et stade municipal), dans la foule qui regarde le match, 12 morts et 45 blessés. Il faut un grand sang froid à la foule pour qu'elle ne se livre pas à des ratonnades aveugles en représailles de ces attentats non moins aveugles, aussi trois musulmans sont lynchés.

La police identifier assez rapidement les auteurs des attentats, comme toujours des femmes avaient porté les bombes, car elles n'étaient pas fouillées, pour ne pas froisser les susceptibilités. Une d'entre elle est arrêtée dès le 28 février, Hocine Baya. Condamnée à mort, le jugement est cassé en 58, rejugée c'est en janvier 59 la perpétuité, elle est libérée à l'indépendance et nommée députée.

Aumônier de la Xème division parachutiste, chargée de rétablir l'ordre durant la bataille d'Alger, le père Delarue évoque depuis le premier jour, avec ses soldats, les difficultés morales de la guerre du renseignement. Le 10 février 1957, au soir de l'attentat des stades, il rédige un texte qui sera diffusé dans toutes les unités.

"La France, depuis sa naissance en tant que nation, s'est vue mêlée à plus d'une guerre; en général, nos soldats s'en allaient, forts de l'approbation de tous les honnêtes gens. A ma connaissance, il n'y a pas eu, dans toute notre histoire, de conflit qui ait aussi profondément divisé les catholiques que cette lutte que nous menons en Algérie contre les fellaghas. Des journaux qui, hautement, se proclament "chrétiens", en contestent publiquement la légitimité; des laïcs, des ecclésiastiques "très avancés" en flétrissent les méthodes ( ...) il y a là un fait troublant, angoissant pour notre conscience de chrétiens; il est grand temps que nous nous efforcions d'y voir clair.

Nous nous retrouvons en face d'une guerre d'un type nouveau, d'une guerre révolutionnaire. Nos défenses habituelles: supériorité d'armement, courage et savoir-faire au combat, ont été tournées. Nous sommes en face du TERRORISME dans toute sa lâcheté, dans toute son horreur; Qu'on veuille bien se rappeler, parmi trop de cas similaires, les massacres d'El-Halia en août 1955, les enfants dépecés, les femmes violées, éventrées. ..Le mitraillage à dix heures du matin dans les rues de Kroubs, ces treize familles de fermiers massacrées en mars 1956à Palestro. ..Et l'on conviendra sans hésiter qu'à vrai dire il ne s'agit plus de faire la guerre, mais d'annihiler une entreprise d'assassinat organisée, généralisée. ..Dans ce cas, qu'exige de vous votre conscience de chrétien, d'homme civilisé? Ce qu'elle exige?

C'est que, d'une part, vous protégiez efficacement les innocents dont l'existence dépend de la manière dont vous aurez rempli votre mission et que, d'autre part, vous évitiez tout arbitraire. Il suit de là que:

1° Par souci de loyauté, de justice, c'est au chef responsable, entouré de ceux de ses collaborateurs qu'il juge particulièrement compétents et indispensables - et de ceux-là seuls - que revient la charge de diriger l'information.

2° Vous ne devrez jamais oublier que votre seul but doit être d'obtenir des renseignements et non pas d'assouvir votre colère,

3° On n'a le droit d'être dur avec un homme que dans la mesure où il est certain qu'il est coupable et doit savoir quelque chose,

4° Il n'est jamais permis de prendre au hasard un passant, le premier venu, et d'essayer par la violence de lui extorquer l'aveu d'une culpabilité dont on prétend le charger - sans avoir recueilli par ailleurs aucune véritable preuve. Il ne s'agirait plus, dans ce cas, de justice mais de l'arbitraire le plus odieux. ..Quand un homme n'a pas été pris sur le fait, qu'aucun témoignage valable, fourni par d'autres hommes ou par des preuves matérielles, n'a pu être retenu contre lui, on n'a pas le droit de le choisir arbitrairement comme bouc émissaire, ni de lui extorquer, par quelque moyen que ce soit, des aveux qu'il ne ferait pas librement, ni a fortiori de le condamner sur la seule foi de ces déclarations qu'il se serait résigné à souscrire. Il serait également indigne des chrétiens, des civilisés que nous sommes, de "tirer dans le tas", sous le prétexte que nous n'arrivons pas à déceler les coupables et qu'il faut faire un exemple.

5° Par contre, dans l'intérêt commun, presque tous les peuples civilisés ont maintenu la peine de mort, bien qu'il y ait des erreurs de jugement et que parfois des innocents aient pu être exécutés. Et, d'autre part, nous nous trouvons présentement en face d'une chaîne de crimes. En conséquence, puisqu'il est légalement permis - dans l'intérêt de tous - de supprimer un meurtrier, pourquoi vouloir qualifier de monstrueux le fait de soumettre un criminel - reconnu comme tel par ailleurs, et déjà passible de mort - à un interrogatoire pénible, certes, mais dont le seul but est de parvenir, grâce aux révélations qu'il fera sur ses complices et ses chefs, à protéger efficacement des innocents? Entre deux maux: faire souffrir passagèrement un bandit pris sur le fait - et qui d'ailleurs mérite la mort - en venant à bout de son obstination criminelle par le moyen d'un interrogatoire obstiné, harassant, et, d'autre part, laisser massacrer des innocents que l'on sauverait si, de par les révélations de ce criminel, on parvenait à anéantir le gang, il faut sans hésiter choisir le moindre: un interrogatoire sans sadisme mais efficace. L'horreur de ces assassinats de femmes, d'enfants, d'hommes dont le seul crime fut d'avoir voulu, par un bel après-midi de février, voir un beau match de football, nous autorise à faire sans joie, mais aussi sans honte, par seul souci du devoir, cette rude besogne si contraire à nos habitudes de soldats, de civilisés.

6° Le but de la justice est double: punir le coupable, décourager tous ceux qui sont tentés de l'imiter. Il suit, de là, qu'on a le droit d'interroger efficacement - même si l'on sait que ce n'est pas un tueur - tout homme dont on sait qu'il connaît les coupables, qu'il a été témoin d'un crime, qu'il a sciemment hébergé quelque bandit, s'il refuse de révéler librement, spontanément, ce qu'il sait. En se taisant - pour quelque motif que ce soit - il est coupable, complice des tueurs, responsable de la mort d'innocents pour non assistance à des personnes injustement menacées de mort. De ce seul fait, il n'a qu'à s'en prendre à lui-même s'il ne parle qu'après avoir été efficacement convaincu qu'il devait le faire. "

 

11 Février 1957 :

 Grenade dans un bar à Alger, trois mort deux chrétiens et un musulman.

Mine sur une piste un half-track saute, 7 militaires tués, deux blessés.

Fernand Yveton est executé dans la prison d'Alger, avec deux autres terroristes. Il sera le seul "européen" executé pour complicité avec le FLN (il avait posé des bombes) et comme tel érigé en héros par ses complices communistes et assimilés. En particulier on a eu droit, le 21 Avril 2004 sur fr3 (émission alea) à un numéro de maitre Smadja qui pretendit avoir assisté à l'execution (il n'y était pas seul maître Lainné son avocat y était) et il repeta pieusement les paroles éternelles qu'Yveton aurait prononcé.

Or, d'après le livre de son bourreau, publié en 1972, qui n'a aucune raison de mentir, et qui raconte cette execution au milieu de dizaines d'autres, Yveton aurait refusé le secours de la religion ("non je suis libre penseur") et repeté à plusieurs reprises les paroles de son avocat (l'opinion publique, l'opinion publique...).

Une fois de plus la propagnde ne recule pas devant le mensonge et cherche à credibiliser ses enjolivements par la méthode la plus simple et la plus efficace: "j'y étais, voici..."

 

 12 Février 1957 :

 Quatre terroristes guillotinés à Constantine.

Arrestation d'un réseau FLN à Alger, parmi eux 7 policiers, un bibliothécaire, un contrôleur des contributions et un avocat Ali Boumendjel.

 

 13 Février 1957 :

 Guy Mollet arbitre pour retirer les troupes françaises de Tunisie afin de renforcer l'algérie et promet qu'"il sera plus efficace de poursuivre les rebelles depuis l'algérie". Ce qu'il (ni personne) n'autorisera jamais.

  

14 Février 1957 :

 L'arrestation, par hasard, le 14 février, d'un nommé Bouchouchi Mahdi, qui était recherché, et qu'on trouva caché dans un placard d'une villa de Birmandreis, permit la découverte, dans la nuit du 14 au 15 février, chez un boulanger de la rue Mogador de 7 bombes, chez un épicier de la rue Duc de-Cars de 8 bombes, dans un garage du boulevard Saint-Saëns (sous un escalier) de 10 autres engins.

Plusieurs complices, livrés par Bouchouchi, furent arrêtés et interrogés le lendemain.

Les parachutistes appréhendent un maçon qui avait aménagé, sous la contrainte, des caches qui furent fouillées. Dans la nuit du 16 au 17 février, on découvrit, impasse Kléber, à la Casbah, au domicile du bachaga Bou Taleb, 8 bombes cubiques de 2,5 kilos et une autre de 3 kg 500.

Le 18 février, vers 18 h. 30, le frère du chef de la filière, Yacef Saadi et Marsali Abdelghami étaient appréhendés à la Casbah et interrogés. Les renseignements qu'ils fournirent amenèrent, dans la nuit du 18 au 19 février, rue Kléber, à la Casbah, et villa des Roses, à El -Biar, la découverte de 20 bombes, dont 5 du type "Betty" qui avaient été utilisées pour les premiers attentats du "Milk-Bar", et de la "Cafeteria" , rue Michelet.

 

 15 Février 1957 :

 Monsieur Icham kouider, ancien combattant de l'armée d'Italie, médaille militaire, croix de guerre six citations, porte drapeau de l'association des anciens combattants, assassiné par le F.L.N. à Mostaganem. Il est le premier des huit porte drapeaux de Mostaganem ainsi morts pour la France.

Toujours à Mostaganem, grenade dans un bar, le fils de 7 ans du propriétaire tué.

Un agriculteur assassiné à Petit.

Un retraité aussi, mais à Blida.

 

 16 Février 1957 :

 La résolution afro-asiatique sur l'algérie à l'Onu n'obtient pas la majorité requise pour être adoptée.

 Trois agriculteurs assassinés dans trois fermes de l'Oranais.

Un autre enlevé (on sait ce que cela veut dire) à Général-Gouraud.

Prés de Boghari une bande rebelle a enlevé 10 européens; accrochée par l'armée, ils sont tous assassinés.

  

17 Février 1957 :

 Rien

 

 18 Février 1957 :

 Les conjoints Gautheron, communistes qui se sont fait mutés en algérie (comme beaucoup) pour aider la rébellion, arrêtés.

 

 19 Février 1957 :

 Le chef du maquis de Perregaux tué en opération.

Un agriculteur assassiné près de Bône.

Un autre égorgé à Keddar.

Deux chauffeurs de camions égorgés sur la route de Laghouat, leurs camions incendiés.

  

20 Février 1957 :

 Rien

 

 21 Février 1957 :

 Témoignage de Sonia Herrero

Herrero Lucette, née le 24 août 1941, elle était étudiante (Ecole village Boudia). Elle habitait à Saïda au 22,rue Maillot.

Le 21 février 1957, Lucette et moi sommes allées au cinéma Vox en matinée; le film fini, nous sommes ressorties pour poster une lettre pour le collège que je fréquentais; nous étions cote à cote sur le boulevard Gambetta lorsque à hauteur du café Lopez, nous avons entendu des explosions. Lucette me dit en riant "tu te rends compte voilà que maintenant ils lancent des pétards"; nous étions bien innocentes et quelques secondes plus tard, une auto montait derrière nous à toute vitesse mitraillant tout sur leur passage; à hauteur de la station d'essence Paya.

Lucette gisait par terre, elle avait reçu toute la décharge de la mitraillette; à ses côtés je n'avais aucune égratignure, j'essayais de la soulever, le sang coulait abondamment, sa veste en mouton blanc était rouge, une ambulance est venue aussitôt nous conduisant à l'hôpital et là, un court instant après, un policier (M. Sanchez des Renseignements généraux) et un docteur m'annonçaient le décès de ma sœur. Sa montre m'a été rendue, elle marquait 17h30; là, je réalisais qu'il n'y avait plus rien à faire.

 Comment descendre à la maison et annoncer ce malheur à mes parents, l'ambulance nous ramenait à la maison, à la descente j'étais anéantie, je descendais et derrière moi Lucette gisait sur un brancard; Mme Carre empêchait mes parents d'entrer dans la chambre, Mme Fernandez avec une autre voisine ont habillé Lucette avec sa robe préférée que je leur avais donnée; Lorsque mes parents sont entrés leur douleur fut indescriptible; ils ne s'en sont jamais remis, moi longtemps j'ai été malade même à ce jour je ne m'en suis pas remise.

Je joins la photo d'anniversaire de Lucette à 15 ans, peu avant son décès.

 Pour comprendre le récit que je joins, j'ajoute ceci : Depuis quelques mois les attentats affluaient de toutes parts dans la région.

Néanmoins, la ville de Saïda n'avait pas encore été touchée, son entourage de fils barbelés, le couvre feu, et la Légion semblaient nous protéger des dangers. De plus, nos parents nous interdisaient de sortir de la ville; ainsi nous ne faisions plus nos promenades préférées vers le vieux Saïda, notre chère forêt, nous ne sortions presque pas et, beaucoup de jeunes gens craignaient papa, l'officier de police; aussi nos rencontres avec d'autres jeunes étaient limitées, nous allions au cinéma et quelquefois au bal chez Lopez mais avant la nuit tombante il fallait être à la maison; nous étions 3 filles: Lucette 15 ans fréquentait l'école au village Boudia, Annie 6 ans la maternelle, moi Sonia 18 ans continuais mes études au collège mixte commercial de Mascara.

 Je venais tous les week-ends voir mes parents et une grippe m'avait empêchée de reprendre l'école. Lucette et moi sortions souvent ensembles. C'était une belle et ravissante jeune fille malgré son jeune âge.

La vie en avait décidée autrement; 8 mois après le décès de Lucette le 19 octobre 57 à 12h30, Annie ma petite sœur décédait d'une crise d'acétone avec transport au cerveau.

 Dans le même attentat, deux hommes furent tués.

 

 22 Février 1957 :

 Rien

 

 23 Février 1957 :

 (Bataille d'Alger). Arrestation à Alger d'un certain nombre de personnalités, accusées de participation au FLN, on note un ancien président (musulman) de l'assemblée algérienne, un bachaga, un caïd, deux industriels. Parmi eux Ben M'hidi, chef de la zone autonome d'Alger, arrêté chez des amis européens grâce au système de quadrillage mis en place par Trinquier (chaque immeuble a son responsable, il doit signaler tout nouveau venu, les paras l'interrogent).

Le club des cinq qui vivait à Alger, souvent chez le docteur Chaulet, s'inquiète : "cette répression est illégale affirme Belkacem, inadmissible, il faut que nos amis interviennent". Abane veut prévenir la presse (le Monde et autres pro F.L.N.) mais il n'en a pas le temps, Chaulet arrive en sueur "nous avons été dénoncé, ils arrivent" le docteur conduit ses amis en Kabylie, qu'ils quitteront rapidement pour Tunis, les Chaulet iront en métropole, ils reviendront en algérie après l'indépendance, le temps (deux ans) d'être déçus.

La direction du F.L.N. en algérie a vécu, tout le monde est maintenant à Tunis.

Un officier de police assassiné à Sétif.

Un agriculteur tué à Teniet-el-Haad.

Un inspecteur de l'enregistrement à Menerville.

Un conducteur de travaux enlevé sur son chantier à Azazga.

 

 24 Février 1957 :

 Rien

  

25 Février 1957 :

 Rien

  

26 Février 1957 :

 Typologie des terroristes d'Alger (Bataille d'Alger) :

L'intellectuel. - Un instituteur de 44 ans, marié et père de cinq enfants. Ancien élève de l'Ecole Normale. Il était chef de groupe et chargé du noyautage des intellectuels- "Je m'attendais, a-t-il dit, à être contacté un jour ou l'autre, sans savoir où, mais malgré tout je ne fréquentais plus que les grandes artères, rue Michelet, rue d'Isly.

"Début juillet, je fus abordé, place du Gouvernement, par un homme que je ne connaissais que pour l'avoir rencontré une fois dans un café... Il semblait avoir une assez solide instruction et de l'autorité. Il ne me fit pas de discours, mais me demanda seulement quand j'allais, moi aussi, me décider "à aider" . "J'ai répondu que je pouvais verser une cotisation mensuelle. Il ne me donna pas de rendez-vous, me dit simplement qu'il était tous les soirs sur la place du Gouvernement... Dans les dix jours qui suivirent, je lui versais ma première cotisation (2 500 francs)." ...Dans le courant du mois de juillet, Abdelkader me dit un jour qu'il m'allait falloir penser à ramasser, moi aussi, de l'argent pour lui remettre".

C'est ainsi qu'il devint collecteur de fonds: Et la menace qui pesait sur lui-même, il lui fallait s'en servir pour trouver des cotisations.

"Je n'ai jamais agi par conviction. Ma seule conviction c'est ma famille: ma femme, mes cinq enfants, ma fille malade. J'ai cru agir par sécurité, comme pendant la grève, quand je suis resté chez moi.

" Si vous me relâchez, je partirai en France avec ma famille. Je ne demanderai pas un poste d'instituteur. Je chercherai du travail me permettant d'élever ma famille. C'est tout."

 Le commerçant. - Il a 28 ans. Il raconte : "Il y a six mois, le café situé au 3, place Rabbin-Bloch, appartenant à ma mère et où je travaillais fut mitraillé vers 21 heures. Peu avant, un jeune garçon était venu à deux reprises me rappeler que le F.L.N. interdisait de jouer aux cartes dans les cafés. Or, je laissais mes clients jouer afin de gagner ma vie.

"Un mois après, un homme est venu devant le café. Il m'a interpellé me disant qu'il voulait me parler. Je suis sorti avec lui et le suivis. Arrivés au coin de la rue, deux autres sont intervenus me menaçant chacun d'un pistolet. Ils m'ont bandé les yeux et me passèrent des menottes, puis ils m'ont dit de faire ma prière en disant qu'ils voulaient me tuer ..."

Dans une maison où il est emmené, on lui montre un insigne, celui de l'A.L.N., des pistolets, deux pistolets mitrailleurs, des grenades et des chargeurs. Il est séquestré, battu et obligé de manger du sel pendant une semaine.

"Ils disaient que j'étais un ami de la France parce que je buvais du vin, je ne faisais pas ma prière, parce que j'avais une maîtresse... "

On le relâche, avec menaces contre lui et sa famille s'il parle. Puis, on vient le chercher pour faire le guet pendant qu'un autre met le feu à une voiture dans un garage. Guetteur au cours de deux autres attentats, il devient tueur pour ne pas être tué.

"...L'attentat a eu lieu rue de Chartres, au début de l'après-midi. J'ai tiré une cartouche. L'homme a été blessé seulement. Comme je m'enfuyais, Rich a voulu tirer à son tour, mais son revolver n'a pas fonctionné. Quand Ladjarem m'a rejoint, il m'a frappé parce que j'avais raté mon coup..." L'homme est faible et terrorisé. II finira par dire: "Quel dommage que les parachutistes ne soient pas arrivés plus tôt, je n'aurais jamais été dans cette situation."

 "L'ouvrier. - Celui-ci est peintre et a 22 ans. Il habite, avec sa jeune femme, chez ses parents. Il a un camarade d'enfance, fFamel, qui, un jour, lui apporte un pistolet et lui ordonne d'aller abattre un Européen à El-Biar. Il refuse. On menace, il accepte. Il rate son coup, rentre chez lui épouvanté et charge sa mère de camoufler son arme.

 "Le voyou. - il était chef de cellule. C'est un joueur de "chik-chik " renommé. Son enfance s'est passée parmi les souteneurs, les filles, les voleurs, la pègre de Bab-el-Oued. Mauvais garçon, il est aussi mauvais fellagh. Sa cellule n'a jamais rendu. Il dénonce volontiers. Il a livré avec la même facilité ses armes."

 Arrestation par la police de Lebjaoui Mohamed, chef de la willaya de france. Il a participé à la réunion de la Soumam, membre du CNRA, il prend la direction en france en décembre et est arrêté deux mois après, ce qui montre bien le niveau de pénétration de la police à cette époque. Libéré en 62, il reste en france et y meurt en 92.

Avec lui est arrêté son collègue Louanchi, kabyle, ancien chef des scouts musulmans, qui lui rejoindra Alger en 62 où il dirigera le quotidien " Le Peuple ".

 

27 Février 1957 :

Réunis au Caire, les chefs d'état de la ligue arabe donnent tout leur appui au FLN.

Une fois la nuit tombée, un abbé, un tantinet nerveux, encombré de lourdes valises, se présente, à Hydra, au P.C. de Massu et demande à parler en personne au général dans le plus grand secret, celui de la confession. Il demeure longtemps dans le bureau du Patron puis s'en va plus souriant et surtout plus léger, c'est-à-dire sans valise. Qu'a bien pu apporter ce furtif curé? Des tracts, des détonateurs, des bombes? On peut s'attendre à tout puisque, ces jours derniers, les traces des pétroleuses du F.L.N. et du P.C.A. ont mené les légionnaires de Brothier aux portes de tous les couvents de la banlieue d'Alger.

Sur ce, Massu me fait appeler . Je le trouve littéralement noyé dans les liasses de billets. Il y en a partout, sur son bureau, sur les sièges, par terre même! Massu rigole de son gros rire et moi du mien. "C'est le trésor du F.L.N. que l'abbé avait en dépôt. Je n'ai jamais vu tant de fric". " Moi non plus, mon Général ". Ensuite, tous les deux nous avons fait le compte et entassé les liasses dans l'armoire destinée aux dossiers des officiers de la Division. En gros, une cinquantaine de millions de francs du moment!

Cette manne tombée du ciel, via l'archevêché, a permis à Madame Massu de mener à bien la conquête de ses sœurs musulmanes et de dépanner nombre de leurs rejetons. C'est, sans nul doute, dans une large mesure grâce à cette entreprise menée tambour battant avec beaucoup de punch, qu'en mai 58, tant de fatmas, qui, toutes, n'étaient pas des grues, ont marqué leur volonté d'avoir enfin elles aussi leur mot à dire. La caisse noire ainsi constituée a duré assez longtemps pour que, en Mai 1958, Godard fasse un don important aux gaullistes de l' "antenne".

Relevé dans les notes de Godard, sans doute un livre qu'il n'a jamais fait publier.

 

  28 Février 1957 :

 Annonce officielle de l'arrestation à Alger de Larbi Ben M'Hidi, un des chefs historiques.

Arrestation à Sedan de chefs MNA, dénoncés par le FLN.