Mars 1960

 

 

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1 Mars 1960 :

A Duzerville un agriculteur et son fils tués dans leur ferme, son frère laissé pour mort.

 

2 Mars 1960 :

Rien.

 

3 Mars 1960 :

De gaulle entame une de ses " tournées des popotes " destinée à prendre le pouls de l'armée et de la rassurer, depuis sa nouvelle avancée l'algérie algérienne, et la purge qui a suivi les barricades.

C'est le moment où les fellaghas de l'intérieur, complètement surclassés par l'armée française cherchent des contacts pour se rendre (c'est le début de " l'affaire Si Salah ".)

Il déclare, ce jour, à Redjaz, à tous les officiers de la 25éme D.P., "achevez de prendre les armes des rebelles. La France ne quittera jamais l'algérie.". Les journaux d'Alger titrent sur une autre phrase: "il n'y aura pas de Dien Bien Phu en algérie, la france restera.

Le lieutenant Kayanakis, dans l'excellent livre qui résume sa thèse de troisième cycle (" Algérie 1960, la victoire trahie, ISBN 3-932711-16-5, éditions Atlantis ") raconte le souvenir personnel suivant.

"De gaulle écrit : " Du trois au sept Mars 60, je vais revoir l'armée d'Algérie ...Aux points les plus sensibles des zones les plus actives : ..., Catinat, col de Tamentout, Batna..." (Mémoires d'espoir, La renaissance, op. cit.). "

Au col de Tamentout, le Lt Nicolas Kayanakis avait été chargé, le 3 mars, de protéger la D.Z. avec sa compagnie portée, non sans la recommandation. "Dirigez vos mitrailleuses vers la foret et non vers l 'hélicoptère qui doit se poser." Mais De gaulle a préféré pour endoctriner les officiers de la 25e D.P., se poser, en dernière heure, dans la plaine de Redjaz, sur le terrain privé de Gratien Faure, vice-président de l'Assemblée algérienne. La "mémoire" peut préférer les programmes aux réalisations."

A Azziz, devant des officiers étonnés, De gaulle inaugure une nouvelle phase de langue de bois, " l'algérie sera algérienne ". on rappelle les étapes: Juin 1958 : "Français à part entière... terre française aujourd'hui et pour toujours... Vive l'Algérie française!" Octobre 1958 : la "paix des braves". Septembre 1959 : l'autodétermination à trois branches, la sécession condamnée. Janvier 1960 : "la solution la plus française". Mars 1960 : la "francisation" est écartée, l'Algérie sera "algérienne". Juillet 1960 : l'Algérie aura son gouvernement. Novembre 1960 : elle sera un État. Avril 1961 : cet État sera indépendant. Décembre 1961: en tout état de cause, on " dégage" et on s'en va! 4 Septembre 1963, pour féliciter Ben Bella de son "élection" à la présidence de la république algérienne : " je vous adresse mes félicitations et forme des vœux pour votre bonheur personnel, le succès de votre mission ainsi que pour l'heureux avenir du peuple algérien car cette indépendance nous l'avons voulue et aidée.

 

4 Mars 1960 :

A Batna, dans sa tournée des popotes, De gaulle déclare : "Ce que les gens de Ferhat Abbas appellent l'indépendance n'est pas concevable, car l'algérie séparée de la france ne vivrait pas. Ce serait la misére, la clochardisation, la catastrophe".

Le service de presse de De gaulle donne aux journaux d'algérie la déclaration suivante "il n'y aura pas de Dien bien Phu en algérie, la France restera. "

 A Drancy, en banlieue parisienne, bataille rangée entre algériens, 7 morts 8 blessés.

 

5 Mars 1960 :

Rien.

 

6 Mars 1960 :

Le F.L.N. s'offusque des propos de De gaulle. Pour le calmer Terenoire, alors ministre de l'information, souligne: "Il convient de n'accorder aux propos du général De gaulle que l'importance d'une conversation privée nullement destinée à être reproduite"

 

7 Mars 1960 :

De retour à Paris, De gaulle, heureux de la publicité faite à son algérie algérienne, change de langage et communique : "rien n'est changé dans la politique algérienne de De gaulle, en particulier l'offre de cessez-le-feu est maintenu."

A cette date, les trois options offertes après le cessez le feu (qui dans l'esprit de personne n'était unilatéral) ont changé, il ne s'agit plus de l'intégration, ni même de la francisation du 16 septembre, mais du "retour à la domination directe". La sémantique a décidément été le point fort de De gaulle, bien relayé par toute la presse et les médias.

 

8 Mars 1960 :

Rien.

 

9 Mars 1960 :

Le train bleu (rapide paris Nice) déraille à Serezin (Isère) suite à un sabotage du FLN. 13 blessés dont 4 très graves.

La police arrête 13 FLN.

Lors de la réunion du comité des affaires algériennes il est examiné la campagne sur la torture en algérie.

Bien des années plus tard Krim Belkacem indiquera que cette campagne lui a coûté 3 millions de nouveaux francs, mais refusera d'indiquer les noms des bénéficiaires. Le comité décide de diffuser une note sur "les méthodes de coercitions physiques dans les interrogatoires".

Le même comité lance l'industrie sidérurgique de Bône. (1,2 milliards).

En ce qui concerne les élections cantonales, le comité fixe le nombre de cantons, le mode d'élection (proportionnelle avec un talon de 5% dans les centres urbains où il y a au moins 20 % d'européens, majoritaire de liste ailleurs). Les listes devront comporter, si le corps électoral comporte plus de 3 % d'européens, un nombre d'européens compris à l'intérieur de fourchettes que fixe le comité. C'est l'affirmative action en faveur des européens.

 

10 Mars 1960 :

La radio rebelle du Caire déclare le 9 mars 1960: "Les Français en Algérie sont des intrus dans notre pays. Ils sont étrangers pour nous. Ils n'ont rien de commun avec nous."

Ferhat Abbas dans une interview publiée le 4 novembre, dit qu'en fait d'Européens il pourrait en rester dans l'Algérie indépendante " peut-être un tiers, peut-être plus ".

 

11 Mars 1960 :

Rien.

 

12 Mars 1960 :

Rien.

 

13 Mars 1960 :

Boumedienne, ayant réorganisé l'A.L.N. extérieure, lance une premiére tentative de franchissement du barrage, mortel echec, détails ICI

 

14 Mars 1960 :

A Tunis, le GPRA regrette que "De gaulle ait fermé la porte à la négociation et à la paix… nous poursuivrons le combat jusqu'à l'indépendance ".

Toutes les avancées faites par De gaulle en direction des terroristes, sans doute sur l'assurance qu'elles suffiraient, n'ont servi à rien. Une des explication de la catastrophe fut la totale incomprehension par les français de la mentalité des terroristes algériens.

Un inspecteur de police arrêté à Aix en Provence, il vendait des papiers au FLN.

 A Blida un militaire et trois jeunes femmes enlevés par le FLN.

 

15 Mars 1960 :

Rien.

 

16 Mars 1960 :

Rien.

 

17 Mars 1960:

Embuscade à Affreville, 4 gardes territoriaux tués, un blessé. (les territoriaux sont des français d'algérie mobilisés sur place).

Si Salah, patron de la willaya 4 (algérois) et trois de ses principaux cadres rencontrent le cadi (fonctionnaire français) de Médéa, nationaliste modéré (c'est à dire partisan de l'indépendance mais obtenue par les voies démocratiques) et lui exposent leur intention de discuter les conditions de la paix des braves. Le cadi en parle à sa hiérarchie (le procureur général à Alger) qui en parle à son ministre (Michelet) qui rend compte à Debré. Il a un document signé de Si Salah et des autres cadres, "le porteur de ce document est autorisé à porter à votre connaissance ce qui suit : des officiers de l'A.L.N. exprimant théoriquement les vues d'une grande partie des maquis et représentant officiellement un fort contingent des combattants veulent étudier les moyens de réaliser l'entente entre ceux qui, dans chaque camp se battent véritablement, sur les fronts politiques et militaires, pour l'émancipation de l'algérie."

L'affaire Si Salah est lancée.

 A la demande de la France, perquisitions et expulsions dans les milieux FLN de Berne.

 

18 Mars 1960:

Commando FLN à Sétif, cité Levy, 3 morts dont deux femmes, 5 blessés.

Un chef de chantier chrétien et un ouvrier musulman assassinés sur un chantier à Rovigo.

 

19 Mars 1960:

Rien.

 

20 Mars 1960:

L'armée délivre un sergent enlevé par les rebelles, elle poursuit la bande qui détient encore une jeune femme belge et un homme.

 Arrestation en seine saint Denis de 8 FLN, accusés d'avoir massacré la famille Ben Salah à Drancy.

Dans le treizième arrondissement de Paris, où résident 5000 musulmans originaires d'algérie, la police vide certains des hôtels occupés par eux, les recase dans le dix huitième et en banlieue et occupe ces hôtels réquisitionnés par d'autres musulmans, une centaine en tout, vêtus comme les policiers, mais avec un calot bleu au lieu du képi.

Il s'agit des harkis (ils préfèrent se nommer "policiers" et d'ailleurs officiellement ils sont des policiers auxilliaires) du capitaine Montaner, un pied noir parlant arabe et kabyle comme une dizaine de mosquées, qui viennent d'entrer en fonction.

La plupart ont été recrutés dès Décembre dans des SAS parmi les volontaires désireux de s'engager et à qui on a proposé cette aventure. Ils ont été formés à Romainville, au fort de Noisy. Par une coïncidence pas croyable, ce fort abrite aussi la branche action du SDECE, dont les exploits ont été baptisés par les journalistes du nom de main rouge.

Montaner était responsable de la SAT de Nanterre, un organisme social, sans but répressif, mais faisant du renseignement. Il avait plusieurs fois proposé la création de ces harkas pour mieux pénétrer le milieu algérien, plusieurs fois cela avait été rejeté, mais l'amélioration de la situation en algérie et sa détérioration en france avait conduit Debré a (enfin) en décider la création. Il aura jusqu'à 400 hommes, tous ne seront pas en tenue. On trouverz ICI une remarquable étude sur cette force de police auxiliaire.

L'un d'eux, Belaï Mohamed est griévement blessé par balles rue Richard Lenoir, il decedera en mai à la clinique des gardiens de la paix.

 

21 Mars 1960:

Règlement de compte à Jeuncot, deux morts un blessé.

Grève de la faim de 150 FLN détenus aux baumettes à Marseille.

 

22 Mars 1960:

55 peines de mort prononcés envers les coupables du meurtre et des tortures infligés à trois sous officiers et cinq hommes de troupe à Timimoun.

Le comité des affaires algériennes crée une "direction des affaires politiques" auprès du délégué général Delouvrier, pour le contrôler. Le poste est donnée à Coulet.

Soustelle est viré de l'UNR qu'il avait largement contribué à créer. On lui demande de démissionner, il refuse.

 

23 Mars 1960:

Nombreux enlèvements de musulmans. (il s'agit pour le F.L.N. de recruter de force, les volontaires étant insuffisamment nombreux).

 

24 Mars 1960 :

Un couple d'agriculteur est enlevé dans les environs de Philippeville. Ils seront retrouvés le lendemain, l'homme égorgé, la femme éventrée après avoir été abondamment violée.

Bitterlin s'installe à Alger, il se fait embaucher à la radio avec un statut assez vague pour avoir le temps de s'occuper du Mouvement pour la Coopération, filiale algérienne du Mouvement pour la communauté de Dauer. Bitterlin est là pour s'occuper de soutenir l'action de De gaulle, il commence par débarquer Le Tac, ancien de la France libre, algérie française et crée des sections locales, du moins autant que possible. Il fera campagne pour le oui au référendum de janvier 61, et essayera, sans succès notable de regrouper des musulmans.

Fin 61, sous son impulsion, le MPC tournera à l'officine barbouze.

 

25 Mars 1960:

Rien.

 

26 Mars 1960:

C'est ce jour dit-on que le ministre Michelet aurait averti le GPRA des négociations commencées avec Si Salah et la willaya 4. Le GPRA qui l'alimente depuis déjà longtemps de nombreuses paroles de bonne intention, (mais jamais d'acte) se trouve obligé de faire semblant de négocier, le 18 Juin à Melun, le temps que Si Salah soit assassiné.

 

27 Mars 1960:

Un gardien de ferme européen et deux ouvriers musulmans arrêtés pour avoir vendu des armes aux fells.

Un gardien de la paix assassiné à Guelma.

Le monde arabe mobilise des volontaires pour l'algérie, 200 égyptiens sont envoyés en Tunisie.

 

28 Mars 1960:

Une très remarquable opération des services secret aboutit à la destruction de toute la willaya 5 (oranie). La rébellion intérieure réclamant des hommes et des armes, le F.L.N. extérieur avait décidé que les trois patrons officiels des willayas réfugiés à l'extérieur devaient rejoindre leur poste. Avertis par un agent double, le deuxième bureau cible Lofti, patron de la willaya 5, dont le trajet par le sud Oranais permettait de monter une opération de substitution plus facile que pour les patrons des willayas une et deux, obligés de franchir le barrage avec tout ce que cela implique. Le groupe venant du Maroc, passant par le grand sud pour éviter le barrage, est petit pour échapper aux recherches,(une vingtaine d'hommes) mais muni d'un poste de radio et d'un code connu. Cela permet de le suivre, puis dans une zone favorable, de l'encercler et de le détruire. Pendant plusieurs mois les hommes du deuxième bureau prendront sa place, inventant des incidents qui justifient qu'il ne rejoigne pas ses troupes, et, grâce aux cachets et aux signatures retrouvés, donnant des ordres à ce qui subsiste de la willaya 5.

Le 20 Avril, un groupe de liaison envoyé par l'extérieur tombe dans une embuscade, le responsable accuse de trahison une partie de ses troupes et exécute 200 de ses hommes.

Par contre les ordres que le soi-disant Lofti donne à ce qu'il reste de fell à l'intérieur ne sont souvent pas exécutés, les hommes épuisés et désespérés, quittant l'oranie pour rejoindre Si Salah et la willaya 4, qui négocie son ralliement avec les français.

Le faux Lofti réclame des renforts, ils ont la malchance de tomber systématiquement dans des embuscades, cela coûte plusieurs centaines d'hommes à la rébellion, sans compter les "responsables" de l'échec qui sont punis de mort..

En Juillet cependant les fells comprennent qu'ils ont été joués. En cliquant ICI vous lirez comment l'auteur de cette manipulation, le général Jacquin raconte cette affaire.

Premier rendez-vous à la préfecture de Médéa entre les représentants de la willaya 4 et ceux du gouvernement français.

 

29 Mars 1960:

Rien.

 

30 Mars 1960:

Un gardien de la paix est assassiné à Colombes, en région parisienne par un groupe de six FLN, rapidement arrêtés.

Dans deux valises, on découvre en région parisienne les restes de trois algériens coupés en morceau, le FLN fait des économies.

 

31 Mars 1960:

 Cent morts dus au FLN en métropole ce mois de mars.

Comme ça se passe pour l'essentiel dans les bidonvilles, entre "nords-africains" ça n'interesse parsonne.

Parmi eux, ce jour, Lakkal Boualem, harki de Paris, tué par balles au cours d'une mission.

C'est courant Mars que Challe se heurte brutalement à Debré et à De gaulle. Il quitte son poste à regret (de n'avoir pu finir ses opérations dans l'est, de ne pas suivre jusqu'au bout l'affaire Si Salah, de ne finalement pas aller remplacer Ely mais de se retrouver dans la cage dorée de l'O.T.A.N. ...) Il a fait un planing qui le méne, de ceremonies d'adieu en passage de consignes, jusqu'au 23 Avril. ON lui demande de faire plus vite, il refuse. Début avril Debré debarque avec la grande croix de la légion d'honneur et la valeur militaire et lui demande après une grandiose ceremonie de quitter Alger sous deux jours. Challe refuse le tout. Challe campe sur ses positions Delouvrier intercéde, le temps passe, finalement le 21 avril De gaulle donne son accord pour un départ le 23 (!). Pas chien il remettra à Challe les décorations promises le 6 Mai aux invalides.